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RDC : quels scénarios possibles et envisageables à l’issue des consultations lancées par le président Tshisekedi ?

Première rencontre entre le Président de la République Felix Tshisekedi et son prédécesseur Joseph Kabila depuis la cérémonie de remise et reprise le 25 janvier 2019 au Palais de la Nation.



Quels scénarios possibles et envisageables à l’issue des consultations politiques lancées par le Président Félix Tshisekedi en marge de la crise de la coalition FCC-CACH ?

C’est un secret de polichinelle, plus rien ne va dans la coalition entre le FCC de Joseph Kabila et le CACH de Félix Tshisekedi. Formée à la suite des élections chaotiques de décembre 2018 dont les résultats sont encore contestés jusqu’à ce jour, cette coalition n’était pas créditée d’une longue espérance de vie par plusieurs analystes et observateurs parce qu’elle a mis ensemble les deux formations politiques (l’UDPS du côté de CACH et le PPRD pour le compte du FCC) qui se sont toujours situées aux deux extrémités de l’échiquier politique congolais et dont les bases se sont mutuellement attaquées avec des méthodes les plus violentes; alors que, paradoxalement, ils sont tous les deux d’idéologies socialistes sur papier.
Comme on pouvait donc s’y attendre, nous ne sommes même pas encore à la moitié de ce quinquennat que la pseudo coalition a déjà essuyé plusieurs turbulences politiques accompagnées des déclarations appelant à la rupture. La dernière crise en date a été provoquée par les nominations et les mises en place effectuées au sein des cours et tribunaux et plus spécialement au sujet des nouveaux juges nommés à la Cour constitutionnelle.
Ignoré par ses partenaires du FCC qui ont contesté ses ordonnances nommant les juges constitutionnels et qui n’ont pas participé à la cérémonie de prestation des serments de ces derniers, Félix Tshisekedi a fait une adresse à la nation le 23 octobre 2020 annonçant son intention de mettre fin à la coalition FCC-CACH qui, selon lui, bloque le bon fonctionnement du pays. Il a préconisé de mettre en place une « union sacrée » autour de sa présidence. Pour ce faire, il s’est proposé de consulter les acteurs politiques et sociaux les plus représentatifs [selon ses propres termes] afin de décider par la suite du sort de son partenariat avec le FCC.
Qu’attendre de ces consultations ? Quels sont les schémas envisageables, réalistes et possibles à l’issue de ces rendez-vous réguliers qui se déroulent au palais de la nation?
Sans prétention d’être exhaustif, nous pensons que Félix Tshisekedi aura à faire le choix entre quelques quatre (4) scénarios. On nous excusera de ne pas adopter dans ces écrits une approche académique et juridique classique compte tenu du laconisme de nos arguments et de la dimension hautement politique des pistes de réflexion. Ainsi, cette analyse n’a aucune connotation strictement juridique. C’est tout simplement un exposé de ces scénarios que nous trouvons envisageables, réalistes et possible ; auxquels nous associons, le cas échéant, de nos suggestions et recommandations comme si nous étions aussi à la place des consultés.

  1. Premier scénario: De la dissolution de l’Assemblée nationale

A moins qu’il veuille créer un chaos et attendre de celui-ci qu’il soit régulateur, l’option de la dissolution de l’Assemblée nationale nous semble être la peu probable sur la table de Félix Tshisekedi, et ce, pour deux raisons principales.
Primo, sur le plan strictement juridique et constitutionnel, les conditions pour dissoudre la chambre basse du Parlement congolais ne sont pas réunies.
En effet, selon l’article 148 de la Constitution, le Président de la République n’a pas le pouvoir de dissoudre l’Assemblée nationale motu proprio. Il est astreint à quelques conditions de fond et de forme.
D’abord, sur le fond, la dissolution de l’Assemblée nationale requiert l’existence d’une crise persistante entre le Gouvernement et l’Assemblée nationale. Cette crise au sens de l’article 148 de la constitution renvoie à toute situation qui installe un conflit dans les rapports entre l’assemblée nationale et le gouvernement au point qu’elle impacte sur la gouvernabilité du pays. De plus, le constituant a souligné que cette crise doit être persistante. Ce qui sous-entend, selon nous, que la situation qui oppose l’Assemblée nationale et le Gouvernement ait résisté dans le temps et à plusieurs tentatives de conciliation par le Président de la République.
Ensuite, au cas où ces deux premiers éléments (crise persistante) seraient remplis, il faudrait, sur la forme, que le Président consulte préalablement le Premier ministre et les Présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat, pour prononcer la dissolution de l’Assemblée nationale.
Pourtant, dans notre cas sous examen, le Gouvernement qui est dirigé par un membre du FCC n’est pas en crise avec l’Assemblée nationale qui est aussi majoritairement constituée des membres du FCC.
Il y a encore un autre élément de taille à prendre en ligne des comptes : c’est le fait que, selon l’article 79 (in fine) de la Constitution, l’acte présidentiel décidant de la dissolution de l’Assemblée nationale doit être contresigné par le Premier ministre. Comment contraindre ce dernier à contresigner l’ordonnance présidentielle portant dissolution de l’Assemblée nationale si cet acte ne respecte pas les conditions requises dont l’existence d’une crise persistante et la consultation des autorités citées par l’article 148 de la Constitution?
De ce qui précède, il est constitutionnellement inconcevable d’imaginer que les consultations de la classe politique lancées par Félix Tshisekedi donnent lieu à la dissolution de l’Assemblée nationale. Ce d’autant que, pour l’heure, c’est le Président de la République qui semble être en conflit avec ses partenaires du FCC qui sont majoritaires à l’Assemblée nationale et au Gouvernement. Dirigé par le Premier ministre (article 90 de la Constitution), le Gouvernement n’est pas en crise avec l’Assemblée nationale et vice-versa. Et dès lors qu’il n’y aurait pas une crise persistante et que le Premier ministre et les Présidents de deux chambres du Parlement ne seraient pas consultés, Félix Tshisekedi n’aurait aucun moyen constitutionnel de dissoudre l’Assemblée nationale.
Secundo, sur le plan politique, il ne sera pas non plus dans l’intérêt du Président Tshisekedi de dissoudre l’Assemblée nationale. Ceci aurait pour conséquence de convoquer des élections législatives dans les 60 jours qui suivront selon l’alinéa 2 de l’article 148 de la Constitution. Or, son parti (l’UDPS) et sa coalition politique (le CACH déjà affaiblie et en lambeau par l’arrestation de son allié et directeur de cabinet Vital Kamerhe) nous paraissent ne pas être préparés pour participer aux élections législatives et gagner la majorité à l’Assemblée nationale.
L’autre difficulté du scénario de la dissolution serait financière et technique. Avec quels moyens financiers organisera-t-on des élections après la dissolution de l’Assemblée nationale ? Déjà que le ministre ayant les finances dans ses attributions n’a pas arrêté d’alerter ces derniers temps sur le déficit budgétaire et la faible mobilisation des recettes suite la gestion entre autres de la pandémie de la covid-19. De plus, avec quelle commission électorale nationale indépendante organisera-t-on ces législatives anticipées ? Nous le savons tous, l’actuel Bureau de la CENI est démissionnaire et le processus pour le remplacement du nouveau Bureau est bloqué – toujours par les querelles de même nature entre le FCC et le CACH.
Donc, si par surprise le Président de la République annonçait la dissolution de l’Assemblée nationale, non seulement qu’il violerait les prescrits de l’article 148 de la Constitution [avec tous les risques que cela comporte], il n’est pas exclu qu’on se retrouve avec une Assemblée dissoute qui termine ce quinquennat faute d’organiser des législatives anticipées et compte tenu de l’article 103 de la Constitution qui rappelle : « (que) Le mandat de député national commence à la validation des pouvoirs par l’Assemblée nationale et expire à l’installation de la nouvelle Assemblée ».
Nous le répétons, une fois de plus, la dissolution de l’Assemblée nationale est le scenario le peu probable pour nous. Nous prenons le risque de l’écarter.

  1. Deuxième scénario: De la reconstitution d’une nouvelle majorité au sein de l’Assemblée nationale 

D’aucuns [et c’est même la tendance dominante selon notre observation] conseille à Félix Tshisekedi de « débaucher » (c’est le terme qui est utilisé) quelques députés du FCC pour reconstituer une nouvelle majorité en coalition avec le groupe Ensemble de Moïse Katumbi et l’AFDC-A de Bahati Lukwebo.
Nous commençons par rappeler que nous relevons en cette tactique politicienne une indécence et un problème d’éthique qui n’honore pas un Président de la République qui est issu des rangs d’un parti politique qui a toujours prétendu combattre contre la dictature et les antivaleurs pendant ses 38 ans de lutte dans l’opposition. Car, comme tout observateur averti de la scène politique congolaise peut le savoir, ce « débauchage » – trop souvent pratiqué par le régime Kabila – sous-entend systématiquement qu’un nombre de députés FCC soient corrompus pour rejoindre la nouvelle « union sacrée » du Président de la République.
Qu’à cela ne tienne et s’il faut faire abstraction de ces considérations liées à l’éthique, ce scénario de la reconfiguration de la majorité soulève aussi quelques questionnements :
Comment peut-on reconfigurer une majorité parlementaire à mi-mandat et alors que le Gouvernement issu de cette dernière est déjà (encore) en place ? Cela est-il possible au regard de la Constitution du 18 février telle que modifiée à ce jour? Le Président de la République peut-il au cours d’une législature nommer un nouvel informateur pour identifier une nouvelle majorité au sein de l’Assemblée nationale telle que certains le préconisent ?
Sur le plan strictement juridique, nous pensons que le changement de majorité à l’Assemblée nationale est aussi impossible dès lors qu’il n’y a pas une crise qui impacte sur la gouvernabilité du pays.
Normalement, selon les articles 3 et 5 de la loi n°07/008 portant sur le statut de l’opposition et l’article 26 du règlement intérieur de l’Assemblée nationale dûment déclaré conforme à la Constitution, un député national élu dans le cadre d’un parti politique ne peut faire une déclaration d’appartenance à la majorité ou à l’opposition. Ceci est l’apanage du parti ou du regroupement politique dans lequel le député appartient. De ce fait, les députés appartenant aux partis politiques ayant déclarés être de la majorité (FCC) sont censés les rester jusqu’à la fin de la législature. Ce qui veut dire, en principe, que la majorité qui avait été identifiée au début de cette législature et de laquelle émane le Premier ministre et le Gouvernement doit normalement la rester jusqu’à l’organisation des élections législatives prévues en 2023. Et ce, même si leurs partenaires du CACH arrivent à rompre la coalition.
Une autre disposition qui renforce l’argument de la cristallisation de la majorité parlementaire est l’article 110 (in fine) de la Constitution. Il y est rappelé que « tout député national ou tout sénateur qui quitte délibérément son parti politique durant la législature est réputé renoncer à son mandat parlementaire obtenu dans le cadre dudit parti politique ». Comme on peut le remarquer, cette disposition pourrait être utilisée comme une épée de Damoclès suspendue sur la tête des députés nationaux appartenant aux partis politiques inscrits sur la liste de l’actuelle majorité (FCC).
Ainsi, à mon avis, la possibilité qui reste au Président Tshisekedi est – non pas de débaucher des députés de manière personnelle – mais plutôt d’influencer [je préfère ce terme à celui de « débaucher »] les partis et regroupements politiques qui peuvent convaincre leurs députés à se désolidariser du PPRD et du FCC pour suivre cette nouvelle dynamique de l’union sacrée.
Si Félix Tshisekedi arrivait à cristalliser cette nouvelle dynamique au sein de l’Assemblée nationale, il n’aura qu’à impulser à travers celle-ci une motion de censure contre le Gouvernement.
Ainsi, Félix Tshisekedi pourrait profiter de l’adoption de cette motion censure et de cette éventuelle crise de la gouvernabilité pour nommer par la suite une mission d’information censée identifier la nouvelle majorité qui se serait créée entre-temps au sein de l’hémicycle. Nommer un informateur directement au sortir des consultations comme certains le suggèrent [alors qu’il n’y a aucune crise et que le Gouvernement est en place] c’est non seulement impossible mais c’est aussi et surtout une incongruité juridique.
A défaut de faire tomber préalablement le Gouvernement par une nouvelle dynamique acquise à sa cause à l’Assemblée nationale, Félix Tshisekedi n’aurait pas beaucoup de marges de manœuvres quant à cette tactique de la reconfiguration de la majorité.
Pour réussir son coup, tous ses calculs doivent tourner autour du départ du Premier ministre. Cependant, la Constitution ne prévoit aucun mécanisme qui donne la possibilité au Président de la République de démettre le Premier ministre contre son gré. Ce dernier ne peut présenter sa démission au Président de la République que soit volontairement, soit après une motion de censure jugée recevable par la majorité absolue des voix à l’Assemblée nationale (articles 146 et 147 de la Constitution). C’est cette deuxième voie qui est exploitable au cas où il le Président aurait réellement convaincu la majorité des partis et regroupements politiques à l’Assemblée quant à son idée de d’union sacrée.
Néanmoins, au-delà de tous ces calculs juridico-politiciens, nous ne pouvons éluder un détail important : certains députés et groupements politiques qui constituent actuellement la majorité à l’Assemblée donnent l’impression d’être attachés au FCC pour des raisons autres que politiques. Ils sont là pour leur vie voire pour leur survie. Il n’est pas exclu qu’ils pensent que l’anéantissement de leur majorité les exposerait à des risques des poursuites et de représailles compte tenu de ce qu’ils auraient pu commettre durant le régime Kabila. Pourquoi scieraient-ils donc l’arbre sur lequel ils sont assis?
La politique étant dynamique, tout peut basculer. Et surtout si le Président de la République promet aux autres regroupements de la majorité actuelle sa protection et quelques intérêts politiques pour les pousser à tourner le dos au PPRD qui est très souvent vu comme le parti glouton qui s’accapare de tous les grands avantages au FCC.

  1. Troisième Scénario:  Félix Tshisekedi peut se retrouver bloqué et obligé de renégocier avec son partenaire Joseph Kabila en essayant juste de monter les enchères pour ne pas perdre la face

Cette hypothèse est plus que plausible. Le Président ne serait-il pas bloqué et partagé entre l’envie de violer la Constitution (dissolution) et le besoin de renégocier ? Et si ces consultations avaient participé à une tactique du salami (consistant à dépiécer le FCC par petit bout)?
Dans ce dernier cas, il est possible que le Président ait agité le cocotier en organisant ces consultations dans le seul but de brouiller la carte et de faire consommer ses ordonnances contestées du 17 juillet 2020 à ses partenaires. Parce que, après cette petite crise, même si les deux partenaires se rencontraient pour discuter et aplanir les divergences quant à l’avenir de la coalition FCC-CACH, il est difficile d’imaginer qu’on revienne encore sur le cas de ces juges nommés à la Cour constitutionnelle. Ce serait déjà un acquis. Félix Tshisekedi aurait donc gagné en mettant son partenaire Joseph Kabila devant un fait accompli.
Plus encore, ces consultations de Félix Tshisekedi ont été le thermomètre pour montrer à ses partenaires du FCC l’étendue de la colère de la population et d’une partie de la classe politique contre les tenants du régime passé.
Comme le cochon Napoléon qui terrorisait les autres espèces au sujet du retour du fermier M. Jones à « la ferme des animaux » [écrit par Georges Orwel en 1945], nous pensons que le Président Tshisekedi a compris le bénéfice de jouer à l’exacerbation de la peur contre le retour de Joseph Kabila au pouvoir. Il profite de la colère de la population contre les tenants du régime passé pour faire passer n’importe quelle tactique contre son partenaire.

À ce jour, même les violations de la loi et de la Constitution peuvent lui être tolérées par une certaine opinion dès lors que son action semble contribuer à mettre à mal le FCC. Ce qui est dangereux selon nous car participant au processus de la maturation d’une nouvelle dictature.
Qu’à cela ne tienne, Tshisekedi peut profiter de cette posture pour ainsi renégocier en position de force avec son partenaire Joseph Kabila après les consultations. Il y partirait avec un pas d’avance, fort de la classe politique et de l’opinion publique derrière lui.
Selon nous, sans vouloir prendre le risque d’éclabousser leur accord et inscrire le pays dans la voie de l’incertitude [ce qui pourrait avoir un effet contraire contre lui-même], il n’est pas exclu que Tshisekedi se limite à tout simplement demander à son partenaire des avantages supplémentaires par rapport à leur accord initial.
L’envers du décor par rapport à cette position est que Félix Tshisekedi pourrait apparaître devant sa base et devant une grande partie du peuple congolais comme ayant perdu la face. Parce que, sans nul doute, depuis son adresse à la nation du 23 octobre 2020; alors qu’il a désigné la coalition FCC-CACH comme la cause de blocage du pays, beaucoup de congolais s’attendent à des mesures d’envergure de sa part. Dans le même ordre d’idées, plusieurs cadres de son parti ont fait des déclarations intempestives prônant la fin de la coalition FCC-CACH.
A cet effet, s’il opte pour la négociation, pour ne pas perdre complètement sa crédibilité par rapport à la posture va-t-en-guerre qu’il a adoptée, ça ne nous étonnerait pas que le Président demande à son partenaire que lui soit servie sur un plateau soit la tête de Jeannine Mabunda [qui est trop souvent présentée, à tort ou à raison, comme celle qui bloque son action ou contestent son autorité] ; soit celle de Sylvestre Ilunga Ilunkamba [pour que les deux partenaires mettent ensemble un autre Gouvernement avec des nouveaux quotas].
On peut se tromper sur les intérêts dont ils seront l’objet mais, s’il y aura lieu, la renégociation entre les deux partenaires donnera absolument lieu à un troc.

Ce sera une bonne manière pour les deux de se renvoyer dos-à-dos jusqu’à la prochaine crise politique qui va encore les opposer. De toute manière, tous les esprits avertis avaient déjà anticipé l’ambiance conflictogène qui devrait caractériser ce quinquennat.
Mais, sauf à nous étonner, nous pensons que l’hypothèse la moins plausible dans le cadre de la renégociation serait de voir Félix Tshisekedi rompre sa coalition avec le FCC pour s’inscrire dans le schéma de la cohabitation.

Son parti et lui-même ont besoin des moyens financiers [pour les prochaines échéances électorales] qu’ils feraient tout pour rester au Gouvernement si les deux premiers scénarios (dissolution et reconfiguration de la majorité) n’arrivaient à être retenus par lui.

  1. Quatrième Scénario : Félix Tshisekedi peut étonner en convoquant un dialogue national

Un autre scénario est que Félix Tshisekedi convoque un dialogue politique national. Il faut dire que pendant ces consultations, alors que l’action du Gouvernement est mise au frais et qu’il ne s’organise aucune réunion du Conseil des ministres, le Président de la République a pris goût de voir tout se cristalliser autour de son action voire de sa personne.

Pour voir cette sensation continuer, il peut être tenté de convoquer un dialogue politique.
L’envers du décor est qu’un dialogue autour de sa personne ne règlerait pas la crise. Ce ne serait qu’un autre moyen de faire durer le suspense. Comme nous le savons bien, son élection et sa légitimité posent encore problème jusqu’à ce jour face à Martin Fayulu qui estime avoir été le vrai gagnant de la présidentielle [selon le rapport de la crédible mission électorale de la CENCO] et qui se considère comme le Président élu.
De ce fait, Félix Tshisekedi ne pourra pas organiser un dialogue autour de lui pour s’attaquer seulement à la légitimité des députés et du Gouvernement issu de la majorité FCC [qui sont l’émanation des mêmes élections que lui] sans révéler ses propres fragilités.
Pour justifier l’idée du dialogue politique, nous pensons que Félix Tshisekedi doit accepter de perdre quelques plumes en dénonçant sa propre élection et celle du Parlement.

. Il doit avoir le courage d’accepter qu’il y a une crise de légitimité due aux élections de décembre 2018 et, par-là, s’en remettre à une facilitation régionale ou internationale comme la SADC ou l’UA pour convoquer les assises qui mettront toute la classe politique autour d’une table.
Cette facilitation internationale ou régionale sera un élément essentiel pour la participation de Martin Fayulu par exemple qui considère, jusqu’à ce jour, que Félix Tshisekedi est lui-même un élément à la crise et qu’il ne peut être juge et partie comme c’est le cas actuellement avec la posture prise par lui quant aux consultations.
De plus, selon nous, le scénario du dialogue inclusif serait bénéfique à Félix Tshisekedi dans la mesure où ça lui donnerait une certaine ascendance sur son partenaire du FCC dans une approche extra-institutionnelle qu’il faudrait ensuite institutionnaliser.
Ainsi, pour voir cette idée se matérialiser, le Président doit se montrer ferme contre les extrémistes de son camp qui contesteraient à coup sûr son ouverture vers Martin Fayulu. Pourtant, ce qui semble être sûr, c’est que l’organisation du dialogue va rabattre les cartes et déprécier la valeur de la majorité FCC au sein de l’Assemblée nationale.

On pourrait même assister à loisir à la formation d’un Gouvernement de coalition/d’union nationale qui n’aurait pas besoin de se conformer à l’article 78 de la Constitution compte tenu de son caractère « sui generis » comme ce fut le cas du Gouvernement Badibanga et Tshibala. 

Cette hypothèse ne sera plausible que si le FCC accepte de jouer le jeu et décide de participer à ce dialogue. Car la crise au départ est une crise qui oppose le Président Tshisekedi au FCC. 

La résolution de cette crise ne peut se faire sous forme d’un dialogue dont le FCC ne serait pas partie prenante. Or l’absence du FCC à un dialogue risque de polariser davantage la crise politique.

Les résolutions d’un dialogue étant politiques, elles pourraient être confrontées à la posture résistante légaliste qui fonde actuellement l’argumentaire politique et diplomatique d’un FCC, devenu désormais l’activiste du respect de la Constitution qu’il a souvent torpillée durant la présidence de Kabila.


Dans tout ça il ne faut pas perdre de vue la situation socio-économique macabre qui sévit dans le pays.

La misère doublée à la crise politique laisse la porte ouverte à toutes sortes des schémas inattendus qui peuvent venir soit de l’armée soit d’un mouvement populaire.

Par Aimé GATA-KAMBUDI (Diplômé d’études supérieures en Droit public approfondi. Il est également analyste, consultant et expert des questions juridiques et politiques au sein du Think tank DESC-WONDO.ORG) / Tél. : +33 7 62 02 63 07 ; e-mail : aime.gata22@gmail.com.

Oscar BISIMWA

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