Photo : UNICEFDans le bidonville de Kibera à Nairobi, au Kenya, les habitants reçoivent de l’eau et du savon pour se laver les mains afin d’aider à stopper la propagation du coronavirus.
Selon une étude de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) publiée lundi 31 août 2020, le nouveau coronavirus a de graves répercussions sur les services de santé essentiels.
« 90 % des pays ont connu des interruptions de services de santé essentiels avec la pandémie de Covid-19 », souligne l’Agence onusienne, en publiant cette première enquête indicative sur l’impact du virus sur les systèmes de santé. Selon cette enquête basée sur les rapports de 105 Etats, les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire ont signalé les plus grandes difficultés.
La santé n’est plus une équation à une seule alternative – Dr Tedros, Directeur général de l’OMS
Dans la plupart des pays, de nombreux services de routine et électifs ont été suspendus, tandis que les soins intensifs – tels que le dépistage et le traitement du cancer et la thérapie du VIH – ont connu des interruptions à haut risque dans les pays à faible revenu.
« L’enquête met en lumière les failles de nos systèmes de santé, mais elle sert aussi à éclairer de nouvelles stratégies visant à améliorer la prestation des soins de santé pendant la pandémie et au-delà », a déclaré le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, Directeur général de l’OMS.
D’après le Chef de l’OMS, la pandémie devrait permettre à tous les pays de comprendre que « la santé n’est plus une équation à une seule alternative ». Car les données recueillies sont édifiantes. Par exemple, les services d’urgence, susceptibles de sauver des vies, ont été perturbés dans près d’un quart des pays qui ont répondu à cette enquête.
C’est le cas des services d’urgence (24 heures sur 24), qui ont été interrompus dans 22 % des pays. Dans le même temps, les transfusions sanguines urgentes ont été interrompues dans 23 % des pays, la chirurgie d’urgence a été touchée dans 19 % des pays.
La Covid-19 perturbe les traitements du paludisme et du VIH/Sida
En moyenne, les pays ont connu des interruptions dans la moitié d’un ensemble de 25 services étudiés. Les domaines les plus fréquemment perturbés sont la vaccination systématique. Près de 70 % des services de proximité ont été touchés, mais aussi le diagnostic et le traitement des maladies non transmissibles (69 %), la planification familiale et la contraception (68 %), le traitement des troubles mentaux (61 %), le diagnostic et le traitement du cancer (55 %).
Des effets néfastes sur la santé de la population à court, moyen et long terme – Étude OMS
Les pays ont également fait état de perturbations dans le traitement du paludisme (46 %), de tuberculose (42 %) et le traitement antirétroviral (32 %). Si certains domaines des soins de santé, tels que les soins dentaires et la réhabilitation, ont pu être délibérément suspendus conformément aux protocoles gouvernementaux, l’interruption de nombreux autres services devrait avoir « des effets néfastes sur la santé de la population à court, moyen et long terme ».
Par ailleurs, 76 % des pays ont fait état d’une réduction de la fréquentation des soins ambulatoires en raison d’une baisse de la demande et d’autres facteurs tels que le blocage et les difficultés financières. Le facteur le plus souvent cité du côté de l’offre est l’annulation de services électifs (66 %).
Parmi les autres facteurs signalés par les pays figurent le redéploiement du personnel pour assurer la relève de Covid-19, l’indisponibilité des services en raison des fermetures et les interruptions de l’approvisionnement en matériel médical et en produits de santé.Un bébé dort dans les bras de sa mère dans un centre de santé maternelle et infantile en Mauritanie pendant la Semaine africaine de la vaccination.
Mieux se préparer aux situations d’urgence
De nombreux pays ont commencé à mettre en œuvre certaines des stratégies recommandées par l’OMS pour atténuer les interruptions de service. Il s’agit notamment du tri pour identifier les priorités, le passage aux consultations en ligne des patients, la modification des pratiques de prescription et des stratégies d’information sur la chaîne d’approvisionnement. Toutefois, seuls 14 % des pays ont signalé la suppression des frais d’utilisation, que l’OMS recommande pour compenser les difficultés financières potentielles des patients.
L’épidémie risque de s’étendre et de s’atténuer au cours des prochains moi – Dr Tedros, Directeur général de l’OMS
Compte tenu de la demande urgente d’assistance des pays pendant la réponse à la pandémie, l’OMS a développé une plateforme en ligne qui permettra de partager des expériences et de tirer des enseignements des pratiques nationales innovantes susceptibles d’éclairer la réponse collective mondiale.
« Nous devons mieux nous préparer aux situations d’urgence, mais aussi continuer à investir dans des systèmes de santé qui répondent pleinement aux besoins des personnes tout au long de leur vie », a insisté le Dr Tedros.
Plus largement, cette enquête souligne la nécessité d’améliorer le suivi en temps réel des changements dans la prestation et l’utilisation des services.
« Car l’épidémie risque de s’étendre et de s’atténuer au cours des prochains mois, et d’adapter les solutions en conséquence », met en garde l’OMS.
Par CR/Canu