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RDC-Adolphe Muzito : “Plus que d’un simple collectif budgétaire, la RDC a besoin d’un programme triennal”

Il en est de la médecine comme de l’économie. C’est le diagnostic qui commande la thérapie. Ainsi, après avoir passé au crible les fondamentaux actuels de l’économie rd congolaise, l’économiste Adolphe Muzito doublé d’expérience avérée notamment à la tête du Gouvernement est formel : « le pays a besoin non d’un collectif budgétaire, mais d’un programme triennal voire quinquennal ».

En termes clairs, la RDC ne souffre pas que de soubresauts inhérents au Covid-19. Le pays, soutient l’opposant battant pavillon LAMUKA, est malade bien avant la pandémie.

Dans le landernau politique kinois où le débat se focalise autour des personnes,m. Le mérite du leader de Nouvel Elan est de mener une opposition de propositions assortie d’une offre politique alternative. L’interview qu’il vient d’accorder à Forum des As et Econews en est une illustration.

Le gouvernement Ilunkamba prépare un collectif budgétaire à présenter au Parlement dans les semaines qui viennent, pour réajuster le budget 2020 et tenir compte de la récession économique que le choc de la pandémie COVID-19 va imposer à l’économie nationale et à la situation sociale des populations de la RDC. Qu’en pensez-vous ?

Adolphe Muzito: Ce n’est pas d’un collectif budgétaire que le pays a besoin, mais d’un programme triennal voire quinquennal pour faire face aux effets économiques et sociaux de COVID-19 et aux défis traditionnels de la RDC. Le pays est doublement malade. Il l’était déjà avant COVID-19. Il faudrait réajuster le programme du gouvernement à cet effet.

.Pourquoi un programme et non un collectif budgétaire ? 

Parce que les effets du COVID-19 s’inscriront non pas dans le court, mais dans le moyen et long terme (2 à 3 ans).Le réajustement du budget 2020, aura la faiblesse de se limiter aux six prochains mois et à revoir à la baisse le niveau des recettes propres de l’Etat et ne pourra nullement prendre en charge les conséquences économiques et sociales de la pandémie. Lesquelles exigent plus des ressources que le pays ne saurait mobiliser à l’interne et plus de temps pour amortir le choc.

.Il faut donc un programme ?

Oui, un programme, à court, à moyen et long terme, chiffré et reprenant l’ensemble des besoins du pays et proposant leur mode de financement. Tout ceci assis sur des réformes institutionnelles, économiques et sociales, gage de bonne gouvernance et du redressement économique et social.Eco news: Les réformes impliquent des sacrifices autant pour les élites que pour la population. Comment peut-on s’y prendre, pour obtenir leur adhésion.A.M.: La réponse à votre question se trouve dans le plan de sortie de crise proposé à la nation par le Président élu, Monsieur Martin Fayulu. Il faut un consensus entre la minorité au pouvoir (FCC-CACH) et la majorité populaire représentée par LAMUKA, pour élaborer les réformes et en assurer le suivi avec l’appui d’un vrai contre- pouvoir populaire que nous représentons et que nous continuerons à représenter jusqu’aux prochaines élections.

Pourquoi la RDC ne peut-elle pas, comme les font les Occidentaux, créer la liquidité monétaire pour soutenir son économie ?Monsieur Tshisekedi a terminé l’année 2019 avec un déficit de plus d’un demi-milliard de $ US. Au premier trimestre, il a fait un déficit de près de 300 millions des $ US, qu’il a financé par la planche à billets dont on constate l’effet sur la valeur du FC aujourd’hui. Notre monnaie n’est pas convertible. Il faut recourir aux ressources extérieures pour éviter les avances de la BCC. Pour cela, il faut un plan d’aide internationale dont j’ai parlé abondamment dans mes deux dernières tribunes (23ème et 24èmes).

.La RDC venait de sortir avec votre gouvernement en 2010, d’un grand endettement. Va- t-on encore se surendetter ?

Le Congo a une grande capacité d’endettement qui peut aller de 6 à 50% de son PIB actuel, lequel s’élève à 55 milliards $ US en 2020, face à une dette extérieure qui s’élève à 3,5 milliards des $US. Le ratio du service de la dette est largement en dessous du seuil acceptable, qui est de 15% des recettes en moyen des paiements internationaux. La RDC peut s’endetter jusqu’à 30 milliards des $ US, pourvu que cet endettement soit affecté à des projets productifs et aux infrastructures de base.

.Quels sont les secteurs prioritaires de ce programme ?

Ce programme ne devrait pas porter sur les seules finances publiques, mais aussi sur les économies publique et privée et donc pour la mobilisation à leur profit des ressources extérieures. Dans ce cadre la Banque Centrale devrait être recapitalisée pour servir de support automne au système financier du pays. Ce qui suppose des réformes dans tous ces secteurs.Le programme aura en annexe le collectif budgétaire qui va couvrir notamment le second semestre de l’année 2020 et sera la première composante du programme triennal ou quinquennal à partir de juin 2020 tel que le prévoit le programme informel en cours avec le FMI et BM.

Le gouverneur de la Banque centrale demande au gouvernement de respecter le plan de trésorerie pour les 9 mois à venir, partant de mai à décembre 2020, pour espérer conclure le programme formel avec le FMI en janvier 2021. Qu’en dites-vous ?

Cela signifie que le programme de référence a échoué. Le gouvernement et la Banque Centrale semblent faire l’impasse sur les causes de l’échec. Quant au respect du plan de trésorerie, les mêmes causes produisant les mêmes effets, le gouvernement ne saura ni éviter le dépassement, ni réussir l’équilibre entre les dépenses et les recettes, moins encore réaliser des marges de trésorerie.Bien au contraire les choses vont empirer. Il suffit des bruits des bottes à l’Est pour que l ‘équilibre du plan de trésorerie soit rompu.

Que dites-vous de la décision de l’institut d’émission qui promet d’injecter la liquidité en devises convertibles pour stabiliser le franc congolais?

Ce n’est pas avec 300 ou 400 millions des $ US que ce pouvoir va stabiliser le franc congolais d’ici la fin de l’année. Avec plus d’un milliard des $US de réserves de change, entre 2012 et 2018, ils n’ont pas réussi à soutenir la monnaie nationale qui a perdu plus de 50% de sa valeur extérieure.En effet, ils ont hérité de mon gouvernement début 2012, de 1,700 milliards des $ US des réserves de change. En 2018 le pays n’avait plus que 700.000 $ US.

La Banque Centrale demande au gouvernement d’émettre le bon du trésor pour résorber la surliquidité monétaire enregistrée par le système bancaire, n’est-ce pas une bonne mesure pour redresser le taux de change ?

Il s’agit d’une opération à somme zéro car la sur kiliquidité épongée par les bons du trésor sera réinjectée par le gouvernement à travers de nouvelles dépenses. Pour rembourser ces bons du trésor, l’Etat devra encore imprimer de nouveaux billets.

.Le Gouverneur de la BCC préconise l’entrée au programme formel avec le FMI en début 2021 à condition de respecter le plan de trésorerie. Cela sera- t-il possible ?

Le pays ne doit pas attendre 2021 pour entrer en programme avec le FMI et la BM, sinon entre mai et décembre 2020 la monnaie va se casser la figure, avec toutes les conséquences sur le pouvoir d’achat des populations et des agents de l’Etat.Le gouvernement doit préparer dès à présent son programme, le défendre parallèlement auprès du parlement et des institutions de Bretton Woods.Commencer les négociations dès le mois de juin et espérer conclure un programme formel en septembre 2020.Le franc congolais n’étant pas une monnaie convertible et la BCC étant en difficulté, la stratégie de soutien à l’économie par expansion monétaire est à exclue pour la RDC..

Seul le recours aux avoirs extérieurs par l’endettement, tel que dit ci-haut, en profitant du contexte international peut permettre à la RDC de sortir de sa situation.

Oscar BISIMWA

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