Les vingt plus grandes puissances économiques mondiales, réunies en sommet virtuel, ont dit « soutenir pleinement » les dispositifs mis en place par l’OMS pour assurer que les vaccins ne bénéficient pas qu’aux pays les plus riches.
Les dirigeants du G20 ont promis, dimanche 22 novembre, de « ne reculer devant aucun effort » pour garantir un accès « abordable et équitable » aux vaccins, tests et traitements contre le Covid-19, selon la déclaration finale d’un sommet virtuel au ton résolument consensuel mais pauvre en détails concrets. S’exprimant en clôture du sommet virtuel du G20, la chancelière allemande, Angela Merkel, s’est dite « inquiète » de la lenteur des discussions pour fournir le vaccin contre le nouveau coronavirus aux nations les plus pauvres.
Le président français, Emmanuel Macron, a, lui, appelé ses homologues à « aller plus loin, plus vite », selon l’Elysée, en faisant don de doses, en nouant des partenariats industriels ou encore en partageant la propriété intellectuelle. L’ONG Oxfam a, elle, critiqué auprès de l’Agence France-Presse (AFP) un « décalage total entre les appels [des Européens notamment] à faire du vaccin un“bien public mondial” et la course au vaccin qu’ils entretiennent ».
Le sommet des vingt plus grandes puissances économiques mondiales se tient cette année sous un format virtuel qui lui enlève beaucoup de son éclat. L’ombre des atteintes aux droits humains en Arabie saoudite, royaume ultraconservateur, plane également sur le sommet, dont Riyad espérait faire une vitrine fastueuse. Notamment pour l’ambitieux programme de réformes économiques, censé réduire la dépendance à la manne pétrolière, orchestré par le prince héritier Mohammed Ben Salman. Son ascension s’est accompagnée d’une répression accrue contre les voix dissidentes qui embarrasse les partenaires internationaux de Riyad, de l’assassinat du journaliste critique Jamal Khashoggi à la détention de militantes féministes comme Loujain Al-Hathloul.Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le Covid-19, premier opposant au prince héritier saoudien « MBS »
Alors que la pandémie a, désormais, tué près de 1,4 million de personnes dans le monde, les présidents ou chefs de gouvernement ont dit « soutenir pleinement » les dispositifs mis en place par l’Organisation mondiale de la santé pour assurer que les vaccins ne bénéficient pas qu’aux pays les plus riches. Les membres du G20 promettent de « combler les besoins de financement encore existants », au moment où eux-mêmes mettent déjà sur les rails des campagnes de vaccination à grande échelle.
28 milliards de dollars réclamés par les Nations unies
Les Etats-Unis ont annoncé dimanche qu’ils espéraient commencer la leur avant la mi-décembre. Les laboratoires privés et les Etats du G20 rivalisent depuis plusieurs jours d’annonces sur l’état d’avancement de leurs futurs vaccins. Mais le sommet n’a pas mentionné explicitement le montant de 28 milliards de dollars (23,6 milliards d’euros), dont 4,2 milliards en urgence, réclamé par les Nations unies pour faire face à la pandémie.
Autre sujet sur lequel le G20 était attendu au tournant : la dette des pays pauvres, qui flambe en raison du cataclysme économique engendré par la pandémie. Les dirigeants du G20 « promettent de mettre en œuvre » une initiative de suspension du service de la dette déjà adoptée, qui permet aux pays pauvres d’interrompre jusqu’en juin 2021 le paiement des intérêts de leur dette. Mais alors que les Nations unies espéraient que ce délai soit étendu jusqu’à la fin 2021, le sommet des puissants s’en remet à ses ministres des finances pour « examiner » cette question au printemps prochain.
Nulle mention non plus d’une autre solution, également réclamée par l’ONU : recourir aux « droits de tirage spéciaux », une sorte de monnaie créée par le Fonds monétaire international (FMI) pour soutenir les pays en difficulté.Lire aussi Un G20 inédit, en format virtuel, dominé par la question des vaccins contre le Covid-19
Regret d’« un manque de participation des créanciers privés »
A ce jour, seuls 46 pays – sur les 73 éligibles – ont vu leur paiement des intérêts différé, pour un montant de 5,7 milliards de dollars. Une goutte d’eau par rapport aux 11 000 milliards de dollars dépensés par les pays du G20 pour lutter contre la pandémie due au nouveau coronavirus, dénoncent les ONG. « Alors que la réaction du G20 avait été rapide en avril, à présent, il nie l’urgence. Pourtant, on parle de sauver des vies », a réagi Louis-Nicolas Jandeaux, porte-parole d’Oxfam France, joint par l’AFP.
Conscients que le moratoire ne suffirait pas, les grands argentiers du G20 ont ouvert la voie la semaine dernière à une restructuration de la dette de certains pays. Un accord« historique » selon la France car impliquant pour la première fois la Chine, de loin le premier créancier des pays pauvres (63 %), et les créanciers privés. « Mais il ne prévoit des annulations que de manière exceptionnelle et les créanciers privés ne sont toujours pas contraints à y participer », a déploré Lison Rehbinder, du CCFD-Terre solidaire.
Le G20 a, par ailleurs, regretté, dans son communiqué final, « un manque de participation des créanciers privés ». Mais il n’est pas question de les contraindre, seulement de les « encourager fortement » à prendre part aux restructurations à venir.
« Faire face aux défis environnementaux les plus pressants »
Au-delà de la pandémie, la déclaration finale adopte un ton à première vue un peu plus harmonieux sur le climat et le commerce, chevaux de bataille favoris d’un Donald Trump aujourd’hui surtout occupé à contester sa défaite à la présidentielle américaine. En ce qui concerne les échanges commerciaux, « il est plus important que jamais de soutenir un système commercial multilatéral »et d’assurer des « règles du jeu équitables », écrivent également les leaders du G20.
Sur l’environnement, exit le paragraphe séparé que les Etats-Unis avaient fait insérer dans le texte concluant le sommet d’Osaka l’an dernier, pour bien marquer leur différence en la matière. Dans celui qui conclut le G20 sous présidence saoudienne, les grandes puissances promettent de « faire face aux défis environnementaux les plus pressants ».
Mais le reste de la déclaration fait soigneusement la différence entre les signataires de l’accord de Paris et les autres, donc les Etats-Unis – même si le président élu Joe Biden a promis de faire revenir son pays dans le dispositif. Donald Trump, qui avait rapidement quitté les débats samedi pour aller jouer au golf, a profité d’une intervention dimanche devant ses homologues pour fustiger une nouvelle fois l’accord de Paris qui, selon lui, « n’a pas été conçu pour sauver l’environnement. Il a été conçu pour tuer l’économie américaine. »Article réservé à nos abonnés Lire aussi Au G20 de Riyad, le retour en grâce avorté de « MBS »
Le Monde avec AFP