Du rapport Mapping ayant documenté 617 entre 1993 et juin 2003 de crimes de guerre et crimes d’humanité à multiples crimes graves documentés par le HCDH et le BCNUDH dans différents Rapports notamment à l’Est de la RDC, à Yumbi et dans le Kasaï, plusieurs cris se lèvent pour demander justice transitionnelle. D’aucuns n’ignorent pas que la Commission Vérité et Réconciliation de la Transition en RDC avait étouffé dans l’oeuf le projet de Loi sur les Chambres mixtes spécialisées.
Docteur Denis Mukwege, Prix Nobel de la RDC a demandé la création du Tribunal pénal international pour les crimes graves commis en RDC. La Résolution du Parlement européen a formulé des recommandations à l’attention de la RDC et des États membres de l’Union européenne pour améliorer la gouvernance minière et le respect des droits de l’homme dans les Zones d’extraction minière et Zones de conflits.
Peut- on espérer voir un Tribunal pénal international de la RDC voir le jour?
La question de la création d’un Tribunal pénal international pour la RDC est une préoccupation fondamentale pour la majorité de Congolais et Congolaises qui ont soif de la paix et la sécurité, denrées rares dans ce pays apparemment pris en otage par des Milices qui sèment terreur et désolation.
D’emblée, s’il n’y pas de volonté politique de créer les Chambres mixtes spécialisées, qui peut décider de la création du Tribunal pénal international pour la RDC ?
L’histoire du Droit international renseigne sur quelques Tribunaux internationaux notamment Nuremberg, Ex- Yougoslavie, Arusha, Liban… Comment et pourquoi la Communauté internationale à travers le Conseil de sécurité de l’ONU est-elle parvenue à décider de la création de ces juridictions?
Nous allons y refléchir avec l’institution de la « Responsabilité de Protéger ». La paix en RDC semble un leurre tant que les souteneurs des Groupes armés ne seront jamais mis à découvert.
La demande du Président de la République, Félix Antoine Tshisekedi, mérite une attention au-delà du discours mais la nécessité pressante de protéger des vies humaines dans cette partie du monde et pour des milliers de personnes en insécurité pendant des décennies.
La question reste posée : avec le contexte politique, socio-économique, sécuritaire et diplomatique de la RDC peut-on espérer que le Conseil de sécurité et le monde sont disposés à créer un Tribunal pénal international pour la RDC?
Les crimes graves commis après 2003 ne peuvent-ils pas être pris en compte d’autant plus que le doute plane sur les poursuites judiciaires exemplaires pour décourager les responsables de l’insécurité et les graves violations des droits de l’homme?
L’UE plaide pour la création d’un tribunal pénal international pour la RDC
-Pour juger les auteurs de crimes perpétrés dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC) et les cas avérés de violations des droits de l’homme remontant à avant 2002.
Le parlement européen a soutenu jeudi le plaidoyer du prix Nobel de la paix (2018), Denis Mukwege, pour la création d’un tribunal pénal international (TPI).
Le parlement européen a soutenu jeudi le plaidoyer du prix Nobel de la paix (2018), Denis Mukwege, pour la création d’un tribunal pénal international (TPI) pour juger les auteurs de crimes perpétrés dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC) et les cas avérés de violations des droits de l’homme remontant à avant 2002.
Dans sa première résolution de l’année sur la situation en RDC, le parlement de l’UE invite les États membres du Conseil de sécurité des Nations unies à « demander la création d’un tribunal pénal international qui ferait progresser les cas avérés de violations des droits de l’homme remontant à avant 2002 et les cas avérés de violations des droits de l’homme remontant à avant 2002 ».
En outre, la même instance invite l’UE à « maintenir les sanctions à l’encontre des auteurs de violences et de violations des droits de l’homme en RDC et demande l’extension de ces sanctions aux auteurs des crimes cités dans le rapport des Nations unies du projet mapping ».
Les eurodéputés soutiennent dans la même résolution dont Anadolu dispose d’une copie, les propositions visant à créer des « chambres mixtes spécialisées dans les tribunaux de la RDC afin de permettre au pouvoir judiciaire de la RDC et à la communauté internationale de coopérer et de poursuivre en justice les auteurs d’atteintes aux droits de l’homme ».
Au gouvernement de la RDC, le parlement demande de « réexaminer les travaux de sa précédente commission pour la vérité et la réconciliation » et dit soutenir « pleinement la demande adressée par le président Tshisekedi à son gouvernement en vue de la mise en place d’un mécanisme de justice transitionnelle qui jugerait les crimes les plus graves et espère vivement que les deux projets de décrets, à l’examen depuis plusieurs mois, seront adoptés en temps utile par le Conseil des ministres ».
Les eurodéputés ont, en outre, demandé à la représentation de l’UE en RDC de renforcer son « soutien visible » aux défenseurs des droits de l’homme en danger en RDC, « à l’aide de tous les instruments disponibles ».
Mukwege est l’un des défenseurs du « Rapport Mapping » publié en 2010 par Bureau du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme. Il documente plus de 600 graves crimes qui se sont produits dans l’est de la RDC entre 1993 et 2003.
Ces crimes sont attribués notamment aux groupes armés dont certains ex-leaders font partie de la classe politique ou dirigeante. Mukwege a reçu des menaces de mort dans le passé et survécu à une grave tentative d’assassinat en octobre 2012.
Tueries en RDC: Dr Mukwege en croisade contre l’impunité dix ans après
Le Nobel de la paix 2018, Dr Denis Mukwege, s’adresse à la foule à son retour à Bukavu, le 27 décembre 2018. Avec le prix Nobel de la paix Denis Mukwege, des Congolais vont réclamer justice ce jeudi pour les tueries et les viols perpétrés depuis près de 30 ans dans l’Est de la République démocratique du Congo, à l’occasion du 10e anniversaire d’un rapport-choc resté lettre morte.
Des manifestations sont prévues dans quelques villes congolaises, dont Bukavu le fief du docteur Mukgwege, pour les 10 ans de cette enquête des Nations Unies sur « les violations les plus graves des droits de l’homme » en RDC (ex-Zaïre) entre 1993 et 2003.
Le rapport proposait entre autres « l’instauration d’un tribunal international pénal pour la République démocratique du Congo », rappelle le docteur Mukwege dans une tribune publiée par le journal français Le Monde.
« Nous déplorons qu’aucune initiative ne soit concrétisée à ce jour pour appliquer ces recommandations », ajoute-t-il dans cette tribune co-signée avec l’ancienne procureur général du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie et pour le Rwanda, Louise Arbour.
La justice est indispensable « pour briser le cycle des violences et de l’instabilité », avance le gynécologue congolais.
Plus de 1.300 personnes ont encore été tuées au cours du premier semestre 2020 dans les trois provinces de l’Est (Ituri, Nord et Sud Kivu), rappelle-t-il en citant les Nations unies.Lire aussi : Des hommes armés attaquent un centre d’examens et tuent deux écoliers au Nord-Kivu
Le docteur Mukwege regrette que d’anciens miliciens aient été intégrés dans les forces régulières au fil des programmes de démobilisations des groupes armés.
« Des promotions ont été accordées à ceux qui devaient répondre de leurs actes devant la justice nationale ou internationale ».
Le débat est d’une actualité brûlante. Le président Félix Tshisekedi tend la main aux groupes armés congolais toujours actifs dans les trois provinces de l’Est.
Certains ont répondu à son appel, moyennant un « cahier des charges » qui demande souvent l’amnistie et l’intégration de leurs combattants dans l’armée régulière.
« On ne peut pas continuer à récompenser les tueurs. Il ne faut pas récompenser le crime (…) Il faut qu’il y ait une forme de justice », estime la représentante des Nations unies en RDC, l’Algérienne Leïla Zerrougui.
Enfoui depuis dix ans dans les tiroirs, le rapport des Nations unies est devenu l’arme de guerre du gynécologue Denis Mukwege dans son combat contre l’impunité dans son pays.
Violence et manifestations en RDC
« Tués dans leur lit »
Cette enquête des Nations unies « a répertorié 617 incidents violents qui pourraient être qualifiés de ‘crimes de guerre’, de ‘crimes contre l’humanité’ voire de ‘crimes dé génocide’ si les faits étaient portés à la connaissance d’un tribunal compétent », rappelle-t-il.
Le célèbre gynécologue a lui-même la voix nouée quand il évoque le massacre d’une trentaine de patients dans l’hôpital de Lemera près de Bukavu le 6 octobre 1996.
« Tous ceux qui n’ont pas pu se sauver ont été tués dans leur lit. Les infirmiers qui n’ont pas pu quitter Lemera ont été aussi tués », témoigne-t-il dans une vidéo 23 ans après les faits.
Ce massacre a lancé l’un des conflits les plus meurtriers au monde depuis la deuxième guerre mondiale.Lire aussi : Dr Mukwege reçoit des « menaces » après la dénonciation d’un récent massacre dans l’Est
Une ONG américaine, International Rescue Committee, a avancé le chiffre controversé de 5,4 millions de morts entre 1998 et 2007.
Un bilan contesté par les démographes mais qui a marqué l’esprit de nombreux Congolais, persuadés que les conflits dans l’Est ont fait « six millions de morts ».
Le rapport cite les auteurs présumés de chaque crimes. Ils se trouvent parmi tous les acteurs congolais et étrangers impliqués dans les deux guerres du Congo (1996-98, puis 1998-2003).
Il y a la rébellion congolaise des AFDL de Laurent-Désiré Kabila, qui prend le pouvoir en mai 1997 en renversant les forces régulières en débandade du vieux maréchal Mobutu.
Il y a les alliés de l’AFDL, l’Ouganda de Yoweri Museveni et le Rwanda de Paul Kagame, deux leaders toujours au pouvoir en 2020.
Après un retournement d’alliance en août 1998, le Rwanda et l’Ouganda ont continué à contrôler l’Est de la RDC, soit directement, soit par milices interposées.
A sa publication il y a 10 ans, le rapport des Nations unies avait été dénoncé avec virulence par le Rwanda et l’Ouganda.
La position de Kigali n’a guère changé. « On ne peut pas partir d’un projet de rapport contesté comme celui-ci pour lancer un tribunal pénal international », a déclaré le ministre rwandais des Affaires étrangères Vincent Biruta, dans un entretien à Jeune Afrique.
Mukwege relance le débat sur la création d’un tribunal pénal international pour la RDC
Le 18 septembre 2019 à Luanda, le Prix Nobel de la Paix congolais, Denis Mukwege, prenant part au Forum panafricain pour la culture de la paix; a appelé à la création d’un tribunal international pour la RDC, en vue de rendre justice à des millions de Congolais victimes des cycles des violences au pays.
Que faut-il entendre par Tribunal international pour la RDC?
En vertu de la souveraineté dont jouit les Etats, lorsque des crimes sont commis dans un pays c’est la justice de ce pays qui est chargée d’enquêter pour connaître les auteurs et d’organiser un procès. C’est à la justice de ce pays de punir les coupables en application de ses lois.
Cependant, pour des crimes qui concernent toute l’humanité comme les Génocides, Crimes contre l’humanité, crimes de guerres et/ou lorsqu’il peut être difficile à la justice du pays où ces crimes ont été commis de faire son travail sereinement, ou impartialement comme cela était le cas en Allemagne , en ex-Yougoslavie, en Centrafrique ou encore au Rwanda; les pays du monde, à travers l’ONU, peuvent décider de créer des Tribunaux pénaux internationaux.
Ainsi, les tribunaux pénaux internationaux sont des juridictions créées dans le cadre des Nations unies, à la suite des violations flagrantes du droit humanitaire international. Ils sont chargés d’identifier et de punir les responsables de ces violations.
Comment ça fonctionne?
De manière général, les tribunaux pénaux internationaux naissent d’accords internationaux (Cas de Nuremberg et des chambres Africaines extraordinaires), d’une résolution des Nations Unies (Cas du Tribunal pénal international pour le Rwanda et l’ex Yougoslavie) , ou encore d’une loi nationale (Cas de la cour pénale spéciale de la Centrafrique).
Les tribunaux pénaux internationaux ont un mandat spécial et ont un caractère temporel.
Ils fonctionnent avec des magistrats nationaux et internationaux. Ainsi, par exemple le colonel – juriste Toussaint Muntazini Mukimapa, membre du Parquet militaire de la République démocratique du Congo (RDC) a été nommé Procureur de la Cour pénale spéciale (CPS) de la Centrafrique.
Ils sont généralement constitués de plusieurs chambres (d’instruction, d’accusation, d’assises, d’appel, etc), d’un parquet spécial et d’un greffe.
Tribunal Pénal international pour la RDC: manque de volonté politique?
Il sied de préciser que le Docteur Mukwege n’est pas le premier à demander la création d’un tribunal pénal international pour la RDC.
En effet, depuis plusieurs années, la création d’un Tribunal pénal international pour le Congo est réclamée non seulement par de nombreuses associations congolaises mais aussi des organisations internationales.
Pour les défenseurs de cette cause, depuis la fin des années 90 , la population congolaise de RDC a payé un lourd tribut au cours des multiples conflits : un « rapport mapping » de l’ONU parle de 6 millions de morts. Il est incontestable que l’Est de la RDC a vécu de nombreux massacres de masse. Des massacres qui se sont transformés au fil du temps en guerre entre différents groupes rebelles cette tragédie n’a jamais été reconnue à sa juste valeur par la communauté internationale. Le Rwanda a eu son Tribunal pénal international… pas la RDC. Un sentiment d’injustice partagé par Denis MUKWEGE.
Du côté du gouvernement, il faut noter qu’en 2011, un projet de loi portant création de la cour spécialisée des droits de l’homme; qui entendait mettre en place un tribunal spécial pour juger les auteurs et commanditaires des violations massives des droits de l’homme tels que des crimes contre l’humanité, de guerre, de génocide commis en RDC depuis 1990 à ce jour, avait été soumis par le ministre de la Justice de l’époque , LUZOLO BAMBI, au sénat (qui l’avait rejeté).
Peut on dire qu’il manque de volonté politique? En tout cas le Dr. MUKWEGE relance le débat sur cette question et l’affaire reste à suivre.
Avec Audf-rdc.org/Nadia Chahed (aa.com)/AFP/Leganews