En République démocratique du Congo, Jeanette Buse Lasi, veuve et mère de quatre enfants, est assise avec ses enfants dans un abri communal dans un camp de personnes déplacées à Bunia.
L’Agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) a alerté mardi 2020 ur le nombre croissant de violentes attaques menées par des groupes armés contre des civils déplacés dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC).
« Nous appelons les autorités à renforcer la présence policière et des forces armées, avec l’appui de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en RDC (MONUSCO) pour améliorer la sécurité et traduire les responsables en justice », a déclaré le porte-parole du HCR, Babar Baloch, lors d’un point de presse à Genève.
La RDC a l’un des taux les plus élevés de déplacement interne au monde. Plus de cinq millions de personnes sont devenues des déplacés du fait de l’insécurité à l’intérieur du pays, tandis que près d’un million de Congolais ont rejoint, en quête de sécurité, des pays voisins en tant que réfugiés.
Le HCR reçoit des témoignages sur la façon dont les groupes armés sèment la terreur parmi les personnes qui ont fui leur foyer et qui se trouvent dans les sites de déplacement et les zones d’accueil, ou parmi celles qui sont de retour chez elles. Les récits font état de tueries, de mutilations, de violences sexuelles et de pillages.
En raison de son soutien présumé envers les militaires, la population déplacée subit des attaques de représailles de la part de groupes armés, qui reviennent terroriser les villages après la fin des opérations de libération menées par les forces armées qui ont quitté ces zones.
De multiples attaques au cours des huit dernières semaines
Au cours des huit dernières semaines, le HCR et ses partenaires ont enregistré de multiples attaques perpétrées par des groupes armés dans des sites et des villages hébergeant des déplacés, principalement dans le territoire de Djugu dans la province de l’Ituri, dans les territoires de Fizi et Mwenga dans la province du Sud-Kivu, et dans les territoires de Masisi et Rutshuru dans la province du Nord- Kivu. Durant les six derniers mois, les violences ont déplacé plus d’un million de personnes dans ces régions.
Lors d’une attaque menée les 17 et 18 juin dans le territoire de Djugu, deux enfants, deux hommes et une femme ont été brutalement assassinés et décapités à la machette. Plus de 150 maisons ont été incendiées par des groupes armés dans deux villages qui hébergeaient des déplacés.
Puis le 23 juin, près de 5.000 personnes ont été forcées de fuir leurs maisons en une seule journée dans la province du Nord-Kivu en raison de combats persistants entre deux groupes armés dans la ville de Mweso. Les assaillants ont pillé des écoles où les villageois avaient trouvé abri. Des groupes armés occupent actuellement des dizaines de villages.
Dans le Sud-Kivu, un site de déplacés à Mikenge, dans le territoire de Mwenga, a été attaqué à deux reprises par des groupes armés en mai et en juin. Des membres d’un groupe armé s’y étaient cachés, mettant en péril le caractère civil de ce site, alors que les résidents étaient impuissants face aux agissements des milices.
« Les attaques actuelles viennent aggraver une situation de déplacement déjà complexe dans l’est de la RDC, posant des risques considérables pour les personnes qui ont fui leurs foyers », a dit M. Baloch. Ces nouveaux déplacements viennent encore alourdir les pressions pesant sur les zones d’accueil de déplacés internes. Les sites d’accueil sont à court de services essentiels et ressources élémentaires, tels que la nourriture, l’eau et les services de santé.
Les femmes et les jeunes filles sont parmi les plus menacées, avec un accroissement du nombre d’abus et de violences sexuelles et sexistes à leur encontre durant les derniers mois. Au cours du mois dernier, plus de 390 cas de violences sexuelles ont été enregistrés dans les provinces de l’Ituri, du Nord-Kivu et du Sud-Kivu. La plupart de ces abus sont attribués aux groupes armés, mais nombre d’entre eux semblent également avoir été perpétrés par des membres des forces de sécurité congolaises.
Difficile accès à l’aide en raison du conflit
Du fait du conflit en cours, les populations ont du mal à accéder à l’aide. Les attaques contre les dispensaires et le pillage des kits prophylactiques post-exposition – des antirétroviraux destinés au traitement de personnes potentiellement exposées au VIH – font obstacle aux efforts engagés pour apporter des soins aux survivants.
Malgré les difficultés d’accès à certaines zones, le HCR continue de travailler avec les autorités locales et les agences humanitaires pour faciliter le transport des personnes ayant survécu à des violences sexuelles vers les centres de santé les plus proches afin d’y recevoir des soins appropriés dans un délai de 72 heures.
Le HCR continue d’apporter une aide aux personnes déracinées, majoritairement des femmes et des enfants, en mettant à leur disposition des abris, des articles de secours et des allocations d’aide en espèces.
« Nous venons en aide aux membres des communautés déplacées et à leurs hôtes qui jouent un rôle essentiel, afin de répondre aux besoins de leurs communautés en matière de protection », a expliqué M. Baloch. « Leurs efforts améliorent leur qualité de vie, en leur assurant davantage de liberté face aux milices qui prennent leur contrôle et en permettant parfois de traduire en justice les auteurs de violences sexuelles. Leur documentation régulière est une importante source d’informations pour la réponse humanitaire ».
Les besoins sont gigantesques et ne cessent de croître. Le HCR recherche des soutiens financiers supplémentaires en vue de ses opérations qui demeurent sous-financées. L’agence onusienne n’a reçu que 21% des 168 millions de dollars nécessaires aux fins de notre opération en RDC.
Par CR/Canu