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Bruxelles, 17 janvier – La première rencontre entre le président Félix Tshisekedi avec deux poids lourds de la politique congolaise, Jean-Pierre Bemba et Moïse Katumbi, le samedi 26 décembre dernier, avait fait jubiler tous les fanatiques de Limete.
Les uns et les autres avaient vite conclu que l’Union sacrée et donc la nouvelle majorité parlementaire recherchée par leur champion était dans la poche.
Le premier concerné lui-même ne s’était pas dédit. Cinq jours plus tard, le 31 décembre, il nommait un informateur, Modeste Bahati Lukwebo, fraîchement débarqué de Kingakati avec armes et bagages pour venir prêter main forte à la nouvelle dynamique.
Bien plus, au vu des transhumances en cascade, même des personnages les moins attendus tels ces inconditionnels de Joseph Kabila, à savoir Ngoy Kasanji, Charles Okoto et surtout le volubile Lambert Mende Omalanga, les observateurs les plus optimistes ne donnaient plus que 48 heures à l’informateur pour boucler le dossier.
L’ordonnance nommant Bahati, on le sait, lui accordait pourtant un délai de 30 jours de manoeuvre, renouvelable une fois.
Si les tractations étaient entièrement menées de façon totalement hermétique et que très peu d’informations ne filtraient, le report sine die de la première conférence de presse de l’informateur, conjugué avec celui de la plénière de l’Assemblée nationale présidée par le Bureau d’âge, était un signe qui ne trompait pas.
Le coup de massue est tombée avec la nouvelle rencontre Tshisekedi-Bemba-Katumbi, élargie au président à.i. de l’Udps Jean-Marc Kabund, mercredi 13 janvier, qui aurait accouché d’une souris, à en croire les indiscrétions.
Un coup dur si les hommes à Bemba et Katumbi faisaient défection
Pour les proches de l’homme fort Moïse Katumbi, en effet, Ensemble et le MLC se retiraient de l’Union sacrée. Avec de lourdes conséquences pour l’avenir de cette nouvelle composante dans laquelle le chef de l’État fondait tout son espoir, après avoir divorcé du FCC de l’ancien président.
Ainsi, ceux qui sont habitués aux injures, sans la moindre analyse des événements, se sont vite répandu en invectives en direction de Bemba et Katumbi. Mais il était pourtant évident que ces deux politiciens de longue date, de surcroît étrangers à CACH, ne pouvaient faire le long déplacement de Kinshasa pour les beaux yeux de qui que ce soit.
Forts du nombre de leurs députés et convaincus que le président Tshisekedi ne pouvait rien sans eux, il était prévisible qu’ils puissent monter la barre haut. Même très haut.
Et très haut, c’est bien l’équilibre des forces et le partage équitable des responsabilités au sein de la future Union sacrée entre le CACH (présidence, 48 députés) et ses principaux alliés potentiels, à savoir Ensemble (70 députés), l’AFDC-A de Bahati (41) et le MLC (29).
Pour ceux qui ont l’esprit lent, cela passe, outre la présidence de la République naturellement dévolue à CACH, que le chef de l’État lâche du lest en confiant la Primature, la présidence de l’Assemblée et au moins un poste-clé – Intérieur, Finances, Affaires étrangères ou Défense – à chacun des trois nouveaux partenaires. C’est la logique la plus implacable.
Agir dans le sens contraire de cette adéquation est simplement faire preuve d’insolence béate et de comportement infantile, surtout lorsque l’on n’a visiblement pas toutes les cartes entre ses propres mains.
On ne peut gagner à tous les coups
Il est vrai que Félix Tshisekedi a fait preuve de dextérité imparable pour avoir réussi à asséner des coups – presque mortels – à un FCC que d’aucuns croyaient une forteresse imprenable. Mais il ne faut jamais croire – tous les sports le démontrent – que le plus grand champion du monde est appelé à l’emporter à tous les coups.
Les difficultés apparentes qu’éprouvent aujourd’hui le président Tshisekedi et son informateur à franchir la première étape de la construction de l’Union sacrée devrait interpeller.
En tout cas, la transhumance, aujourd’hui suspecte, d’un trop grand nombre de kabilistes vers l’Union sacrée, n’augure rien de bon. Et, de la couleur que prendra le Bureau définitif, dont l’élection tant attendue est digne d’un film d’Alfred Hitchcock, dépendra sûrement l’optimisme ou alors la désillusion des Congolais.
Aussi, si Tshisekedi échoue à cette occasion à se constituer une majorité – nous n’y sommes pas encore heureusement – la cohabitation avec l’unique FCC sera la seule voie de sortie. Car on voit mal le président dissoudre l’Assemblée et organiser des élections anticipées dans les 60 jours, aux termes de la loi, dans un pays financièrement exsangue. Nous n’aurons alors que nos yeux pour pleurer.
Par Jean-Cornelis Nlandu-Tsasa (Photos ACP)