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RDC: un rapport épingle de graves entorses à l’état de siège en Ituri et au Nord-Kivu

Des casques bleus de la Monusco patrouillent dans la province d'Ituri.(photo d'illustration)

Les Casques bleus de la mission d’organisation des Nations-unies pour la stabilisation du Congo (MONUSCO), ont repoussé une attaque de la milice Coopérative pour le Développement du Congo « CODECO » dans la nuit du mardi 22 à ce mercredi 23 juin 2021 au village Rhoo situé à une soixantaine de kilomètres au nord de la ville de Bunia, dans le territoire de Djugu.

L’état de siège proclamé par le président Félix Tshisekedi en mai 2021 dans les provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu est émaillé de dérapages, violations des droits de l’Homme et corruptions des magistrats militaires. Cette fois, c’est l’Assemblée nationale qui met en exergue ce sombre tableau via sa commission Défense et sécurité, dans un rapport émis après audition des membres du gouvernement impliqués dans la gestion de l’état de siège. Le texte d’une quarantaine de pages a été dévoilé fin septembre aux députés et nous est parvenu samedi 30 octobre 2021.

Le constat des députés est direct: l’état de siège avait été proclamé dans des circonstances atypiques à savoir sans plan d’action stratégique et sans montage financier. Plusieurs semaines plus tard, les forces de sécurité ne sont toujours pas déployées. Les premiers décaissements, quelque 37 millions de dollars, ont été dépensés pour liquider les arriérés de paie des militaires et la moitié a été répartie entre les états-majors, à Kinshasa !

Même après le déploiement des responsables militaires, la chaîne de commandement de l’armée a continué à fonctionner « comme à l’ordinaire et cela pose problème vue la situation de l’état de siège », relève le rapport. 

« Divorce entre l’armée et les populations civiles »

Au cours des auditions, les députés ont relevé par exemple qu’il y a insuffisance et vieillissement des effectifs réels sur le champ des opérations et qu’il n’y a pas d’unités formées pour des opérations spéciales. Conséquence, les populations souffrent sur le terrain. Parfois indique le rapport, elles sont victimes des bombardements collatéraux dus à de mauvais ciblages.

La commission affirme avoir décelé un sentiment de « divorce entre l’armée et les populations civiles ». Les députés dénoncent également les tracasseries administratives nées de la multiplicité des barrières. Sur certains tronçons du Nord-Kivu, des taxes illégales dites « taxes de l’état de siège » sont créées et des fonds collectés.

Les membres du gouvernement, en commençant par le ministre de la Défense, ont reconnu la faiblesse des effectifs et des moyens financiers.

Le général d’armée, Célestin Mbala, chef d’état-major Général des FARDC, a insisté sur les difficultés inhérentes à l’état de siège en épinglant notamment « les faibles moyens financiers et logistiques, l’inexistence d’unités de réserve, le déficit des capacités de la Police Nationale Congolaise (PNC) appelée à assurer la sécurité et la protection de la population et de leurs biens ainsi que l’irrégularité de la prise en charge sanitaire et la prime des militaires au front ». 

Le chef d’état-major général a plaidé pour la « constitution rapide » d’unités militaires de réserve et celles de la police de proximité.

Le ministre de la Défense, Gilbert Kabanda, dément toutefois qu’il y ait une hausse du taux de criminalité dans les grandes agglomérations depuis l’instauration de l’état de siège. Ce qui est vrai, toujours selon le ministre, est que l’ennemi a été chassé de ses anciens bastions et s’est rapproché des axes routiers pour « poser des actions spectaculaires afin de démontrer sa résilience au regard des pertes infligées. »

Les magistrats militaires pointés du doigt

En plus de problèmes financiers et logistiques, doublés d’insuffisances des troupes sur le terrain, le rapport fait état de 156 cas d’extorsions, plusieurs cas de viols et des arrestations arbitraires.  Les magistrats militaires sont pointés du doigt pour le monnayage des procédures et pour des actes de concussion, notamment dans la province de l’Ituri. 

La commission demande à la ministre de la Justice, Rose Mutombo, de faire « libérer immédiatement » les militants des droits de l’Homme, en détention pour avoir réclamé la paix et la bonne gouvernance. 

Lors des auditions, les députés ont, par ailleurs, relevé que les militaires sont accusés de collaborer avec les groupes armés dans les territoires de Masisi, Rutshuru, Walikale, Djugu, Irumu et Mambasa, une collaboration qui se poursuit, affirme la commission dans son rapport. La ministre de la Justice affirme que des enquêtes sont en cours pour vérifier ces allégations.

En dépit du démenti du ministre de La Défense, la commission spécialisée conclut que, dans l’ensemble, depuis l’instauration de l’état de siège, les tueries, massacres, viols, braquages et incendies des véhicules se sont intensifiés. Elle propose une mission d’enquête à Kinshasa sur la traçabilité des fonds alloués aux forces armées, à la police et autres services de sécurité dans le cadre de l’état de siège. Des fonds, précise le rapport, « consommés à 68 % par les différents états-majors » dans la capitale.

Du correspondant de RFI à Kinshasa, Pascal Mulegwa

angelo Mobateli

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