Cette fois c’est sans appel. Jean-Pierre Bemba ne sera pas candidat à la présidentielle du 23 décembre 2018 en RDC. La Cour constitutionnelle (CC) a donné raison à la Commission électorale lundi soir 3 septembre, et confirmé l’inéligibilité de l’ancien chef rebelle en raison de sa condamnation pour subornation de témoin par la CPI. A ce stade, la Haute Cour a statué sur quatre des six recours qui lui ont été soumis, et a suivi les réquisitions du Ministère public. Sur les six candidats recalés par la Céni, deux ont été repêchés.
« Sans l’alternance, le chemin du travail bien fait et du progrès économique et social, que la kabilie a hermétiquement fermé, risque de ne plus jamais s’ouvrir pour notre pays », a aussitôt réagi le professeur Freddy Matungulu (opposition), candidat à la présidentielle de décembre prochain.
Les dés sont déjà jetés
Il y a 3 mois, personne ou presque n’avait imaginé Jean-Pierre Bemba dans la course à la présidentielle. Dès l’annonce de son acquittement pourtant, l’ex-chef de guerre fédère sur son nom l’espoir d’une possible alternance. Il n’est pas revenu en RDC depuis plus de 10 ans, n’est pas encore candidat et même assez discret sur ses intentions, mais on le dit déjà favori.
Mi-juillet, le MLC, son parti, l’investit officiellement. Rumeurs et déclarations sur son inéligibilité ne tardent pas à se multiplier, mais Jean-Pierre Bemba ne baisse pas les bras. Le 1er août, il s’offre un retour triomphal, quoique mouvementé. On lui interdit les bains de foule, et de loger dans sa résidence familiale située en plein quartier présidentiel. L’ex-vice-président semble bien encombrant.
Mais qu’importe dès le lendemain, il dépose à la Céni son dossier de candidature. Il est même le premier à le faire. Un dossier finalement rejeté le 24 août. Jean-Pierre Bemba a beau avoir été acquitté de crime contre l’humanité, sa condamnation pour subornation de témoin le poursuit.
Lorsque la semaine dernière, on apprend que la CPI rendra une décision dans ce dossier, le 17 septembre, soit 2 jours avant la publication des listes définitives des candidats, certains veulent croire à un nouveau retournement de l’histoire. Mais, les dés sont déjà jetés. Ce lundi la Cour constitutionnelle l’a définitivement exclu de la course pour cette présidentielle. Une partie s’achève pour Jean-Pierre Bemba, peut-être pas la dernière.
« Si on n’a pas une stratégie commune, ce n’est pas possible de sauver le Congo. Nous sommes en face de personnes qui ne respectent pas les règles », estime Eve Bazaiba, Secrétaire générale du MLC.
Adolphe Muzito « pas surpris »
Derniers espoirs envolés également pour l’ex-Premier ministre Adolphe Muzito. Le premier à être fixé sur son sort hier. La Céni l’avait écarté de la course pour conflit avec son parti le PALU qui ne l’a pas désigné candidat. L’ex-Premier ministre avait pourtant démissionné de ce parti dans un courrier daté du 4 août, quelques jours avant de déposer sa candidature. Démission validée par un huissier de justice. Mais, les juges de la Cour constitutionnelle ont estimé que ce calendrier, serré, semait la « confusion ».
« Je ne suis pas surpris par cette décision, je m’y attendais… », réagit Adolphe Muzito.
Deux heureux : Badibanga et Ifoku
La Haute Cour fait en revanche deux heureux. L’ex-Premier ministre, Samy Badibanga, recalé par la Céni au motif qu’il n’avait pas apporté la preuve de sa nationalité congolaise d’origine. Or, la cour estime que ces preuves sont bel et bien dans le dossier et ordonne que son nom soit réintégré dans la liste des candidats. Même scénario pour Marie Josée Ifoku qui se trouve réhabilitée.
Freddy Matungulu : « La kabilie a hermétiquement fermé l’alternance »
Réagissant à la décision de la Cour constitutionnelle invalidant les candidatures de Jean-Pierre Bemba et d’Adolphe Muzito à la présidentielle 2018, le professeur Freddy Matungulu accuse « la kabilie (d’avoir) hermétique fermé l’alternance » en RDC, dans une déclaration politique parvenue à congoreformes.com.
« Processus Electoral : Déclaration Politique »
« Je viens d’apprendre ce soir (lundi 3 septembre 2018) les invalidations des candidatures des compatriotes Jean-Pierre Bemba et Adolphe Muzito à la présidentielle du 23 décembre.
Après la mise à l’écart de Moïse Katumbi, ce développement éloigne un peu plus la nécessaire inclusivité du processus électoral. Bien plus, les invalidations écornent davantage un processus électoral déjà fortement handicapé par des financements insuffisants, l’obstination de la CENI à faire usage de la machine à voter rejetée par nos populations, un fichier électoral pipé, et une capacité logistique de déploiement du matériel électoral incertaine. J’en suis profondément préoccupé.
Face à ce sombre tableau, j’appelle à une large évaluation de l’ensemble du processus électoral par l’opposition. Nous devons en effet définir une position commune quant à la suite du processus. L’union demeure la seule clé de succès de notre quête pour l’indispensable alternance voulue par nos populations. Sans l’alternance, le chemin du travail bien fait et du progrès économique et social, que la kabilie a hermétiquement fermé, risque de ne plus jamais s’ouvrir pour notre pays.
L’heure est donc grave. Notre peuple doit rester vigilant et déterminé.
Fait à Kinshasa, le 3 septembre 2018
Freddy Matungulu Mbuyamu Ilankir, Mwalimu
Candidat-président »
RFI/CR
RDC-Présidentielle 2018 : Bemba et Muzito exclus, « la kabilie a hermétiquement fermé l’alternace » (F Matungulu)
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