Depuis le 2 novembre 2020, le président Félix Tshisekedi a entamé des consultations politiques et sociales en vue de « la refondation de l’action gouvernementale autour des principes de participation à la gestion du pays », soit une nouvelle dynamique propre à l’accompagner durant le reste de son mandat.
Ce processus a soulevé beaucoup d’espoirs dans la population congolaise, qui, fin 2018, voulait en finir avec 17 ans de pouvoir Kabila et qui se rend compte aujourd’hui qu’en fait elle en a repris pour cinq ans. L’accord secret passé entre Joseph Kabila et Félix Tshisekedi, qui accordait au second la Présidence en échange du pouvoir législatif pour le premier, accord présenté comme une « alternance » au sommet de l’Etat, est en effet rapidement apparu comme un piège pour le plus néophyte des deux protagonistes.
On ignore quand Félix Tshisekedi s’est rendu compte que, comme dans le mythe de Faust – qui avait vendu son âme au diable en échange de 12 années durant lesquelles Lucifer mettrait sa puissance au service de cet homme – il n’a que l’apparence du pouvoir, pas sa réalité.
Pour défaire la puissance de Kabila, son successeur à la tête de l’État, il doit violer les règles écrites. Et quelle légitimité a-t-il pour le faire, n’ayant pas plus été élu que les députés pro-Kabila qui ont une large majorité dans toutes les assemblées législatives du pays?
On se rappelle que la Ceni (Commission électorale nationale indépendante; acquise à Kabila) n’a jamais fourni les résultats détaillés des élections de 2018, alors que les comptages parallèles de ceux-ci, effectués par l’Eglise catholique et des ONG, donnaient perdants Tshisekedi et le candidat kabiliste, et la victoire à Martin Fayulu.
Bien sûr, Félix Tshisekedi pourrait avoir lancé ce processus de consultations pour réveiller à son profit le fort sentiment anti-Kabila des Congolais. Il laisse ainsi le président ad interim de son parti, Jean-Marc Kabund, « annoncer officiellement » à Kikwit, le week-end dernier, que « la coalition n’aura plus lieu ». Rouler ainsi des biceps attise certainement les passions des foules mais que faire de celles-ci ensuite?
De nouvelles élections? Il n’y a toujours pas de nouvelle Ceni pour les organiser. Et pour dissoudre l’Assemblée en place, le Président doit avoir le contre-seing du Premier ministre, un kabiliste.
Acheter des députés à son profit? Félix Tshisekedi a-t-il l’argent pour le faire alors que les budgets sont pulvérisés par les dépenses indues, que les prévisions économiques annoncent une chute de 25% des rentrées de la RDC en 2021 et que Joseph Kabila a accumulé les richesses durant ses 17 ans à la Présidence?
Le chef de l’Etat entend-il mener le Congo sur la voie de nouvelles confrontations violentes? Ou laisser ses consultations accoucher de changements purement cosmétiques, pour donner le change? Prévues pour être clôturées le 8 novembre, elles sont toujours en cours dix jours plus tard; un indice du degré de préparation de l’opération, qui ne laisse pas d’inquiéter.
Par Marie-France Cros (afrique.lalilbre.be)