Vital Karmehe est soupçonné du détournement de près de 50 millions USD de deniers publics.
Suspendu le 7 août 2020, le procès de Vital Kamerhe reprendra à Kinshasa le 15 février 2021, devant la Cour d’Appel de Kinshasa-Gombe.
Rappelons que l’ancien directeur de cabinet du président Félix Tshisekedi comparaît dans l’affaire des maisons préfabriquées qui avaient été commandées dans le cadre du programme dit des cent jours du chef de l État.
En première instance, le leader du parti UNC (Union pour la nation congolaise), une formation bien implantée au Kivu, avait été condamné à vingt ans de travaux forcés pour détournement de 50 milions de dollars, corruption et blanchiment de capitaux.
La première phase des démêlés de Kamerhe avec la justice avait déjà fait couler beaucoup d’encre : le juge Raphaël Yanyi, chargé de l’affaire et qui entendait bien « balayer large » et enquêter sur toutes les complicités éventuelles, avait trouvé la mort dès les premiers jours du procès, peut-être empoisonné.
Lorsque la sentence fut prononcée en première instance, Vital Kamerhe n’était pas seul devant les juges ; un homme d’affaires libanais Jamal Samih fut condamné également de même qu’un banquier de nationalité américaine Erwin Blattner mais les deux hommes furent rapidement autorisés à quitter le pays.
L’ancien directeur de cabinet, qui avait négocié l’accord de coalition avec Kabila et l’accession de Tshisekedi à la présidence en échange de la promesse de pouvoir être candidat aux prochaines présidentielles de 2023, eut moins de chance : il fut envoyé à Makala, le centre pénitenciaire de Kinshasa où son état de santé se dégrada rapidement.
Plusieurs demandes d’évacuation sanitaire furent refusées, ses avoirs furent gelés, son avocat français Pierre-Olivier Sur, chargé de sa défense au temps où le « Dircab » pouvait encore le payer, fut privé de visa alors qu’il dénonçait « des accusations à l’emporte pièce et le manque de preuves ».
L’avocat déclara alors à son client : « votre procès n’en est plus un. Quand on prive un homme du droit de se défendre, ce sont ses accusateurs, ses juges et leurs chefs qui sont dégradés et même déshonorés ».
Par la suite, alors que Kamerhe dépérissait en prison (il a aujourd’hui perdu 22 kilos et se trouve sous assistance respiratoire) les fameuses maisons préfabriquées furent retrouvées, abandonnées dans les ports, attendant d’être débarquées sitôt payés les frais de douane. Ce qui démontre, au minimum, qu’elles avaient bien été commandées…
LA ROUE TOURNE VITE AU CONGO
L’homme, qui comparaîtra devant les juges de la Cour d’appel, n’aura plus rien à voir avec le fringant directeur de cabinet, époux de la belle Hamida Shatur : physiquement affaibli, ruiné et discrédité, il devra assurer lui-même sa défense. Mais surtout, il ne représentera plus un danger politique pour le chef de l’Etat qui s’est assuré une majorité parlementaire toute neuve en débauchant les députés des partis concurrents, dont certains membres de l’UNC qui se présentaient jadis comme les meilleurs amis de Kamerhe.
Quant au nouveau directeur de cabinet du président, Guylain Nyembo, un économiste venu de Belgique, il a publié, dès son entrée en fonctions et peut-être imprudemment, le même communiqué que son prédécesseur, interdisant provisoirement tous les recrutements et toutes les nouvelles dépenses dans la fonction publique, à l’exception des rémunérations du personnel.
Lorsqu’il s’agissait de charger Kamerhe, cette décision conservatoire avait été retenue comme une volonté de paralyser les institutions.
Par Colette Braeckman (Le Soir)