La RDC compte 26 provinces, dont quatre sont particulièrement touchées et meurtries par l’activisme de ces groupes. Il s’agit des régions Nord-Kivu, Sud-Kivu, Ituri et Maniema.
La partie orientale de la République démocratique du Congo (RDC) demeure l’une des régions les plus ensanglantées du monde. Les bruits de bottes n’ont jamais cessé de s’y faire entendre depuis plus de deux décennies, empêchant toute sorte de développement ou d’activité économique favorisant un meilleur avenir.
La RDC compte 26 provinces, dont quatre sont particulièrement touchées et meurtries par l’activisme de ces groupes. Il s’agit des régions du Nord-Kivu, du Sud-Kivu, de l’Ituri et de Maniema.
L’identité des groupes et groupuscules est très variable. Certains sont originaires de la RDC, d’autres sont étrangers, venant du Rwanda, de l’Ouganda, du Soudans-sud, de la Centrafrique, du Burundi, etc. Aussi, leur hostilité diffère d’un groupe à l’autre. Certains sont trop sanguinaires, d’autre le sont moins et d’autres, encore, sont de simples pilleurs de bétail…
Les rebellions étrangères
Les formations étrangères armées sont connues.Les Forces démocratiques alliées (ADF), les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), et l’armée de résistance du Seigneur (LRA), les Forces nationales de libération du Burundi (FNL) sont les rebellions étrangères qui sévissent en RDC depuis les années 90 et restent actifs jusqu’à ce Jour.
ADF : C’est un groupe armé issu depuis fin 2007 de la dissolution de l’Armée nationale de libération de l’Ouganda (Nalu), qui fut longtemps son allié.
Actifs sur le sol congolais depuis 1995, les ADF sont accusés d’être les auteurs d’une série de massacres de civils dans le territoire de Beni (province du Nord-Kivu) depuis octobre 2014. Son commandant Jamil Mukulu a été arrêté en 2015 en Tanzanie sans jamais être extradé vers la RDC.
FDLR : Créés en 2000 sur le sol congolais par des ex-soldats et miliciens génocidaires rwandais qui s’étaient réfugiés dans l’est de la RDC en 1994, les FDLR semblent être sujets de la création de plusieurs groupes armés locaux dans cette contrée.
Le groupe est crédité de plusieurs graves exactions contre des civils congolais dans les Nord et Sud-Kivu, provinces frontalières avec le Rwanda. Les FDLR sont aujourd’hui affaiblis après plusieurs dissensions internes, reddition et rapatriement de ses combattants.
LRA : Créée vers 1988, la LRA est l’une des rebellions les plus sanguinaires au monde, selon l’ONU qui la crédite d’au moins 100.000 morts. La LRA a également enlevé plus de 60.000 enfants dans le Nord-est congolais, au Soudan du Sud et en Centrafrique. La rébellion avait pour objet de renverser le président ougandais Yoweri Museveni pour le remplacer par un régime fondé sur les dix commandements du « Seigneur ».
Son chef Joseph Kony a été inculpé en 2005 par la Cour pénale internationale (CPI) pour crimes contre l’humanité et crimes de guerre. En RDC, la milice est connue pour ses kidnappings de masse, tueries et vols de bétail dans les provinces situées dans le Nord-est (Ituri, Haut-Uélé, Tshopo).
FNL : C’est la rébellion la moins nocive. Les forces nationales de libération (FNL) s’affichent très hostiles au régime du président Pierre Nkurunzinza. La rébellion sévit dans les plateaux d’Uvira dans la province du Sud-Kivu frontalière au Burundi.
Elle excelle dans le vol de bétail et les pillages. Selon la société civile locale, elle aurait reçu des renforts depuis le début de la crise au Burundi en 2015. Un rapport de l’ONU mentionne que les FNL se sont divisées et affaiblies depuis le début de l’année 2013.
Les Groupes armés locaux
Les plus tristement célèbres en RDC sont les «Maï-Maï», un terme qui Vient du lingala (langue parlée dans l’Ouest) et qui signifie «eau» en Français. Ce terme renvoie à la croyance à l’invincibilité des miliciens lors des combats.
Formés sur une base essentiellement ethnique, la plupart de ces groupes avaient été armés par le pouvoir pendant la deuxième guerre du Congo (1998-2003), pour combattre les envahisseurs ougandais ou rwandais. Mais le pouvoir n’a jamais réussi à tous les désarmer.
Maï Maï Simba : Les origines de ce groupe remontent à 1964. Il serait le plus ancien groupe armé congolais, d’après le projet Enough. Il est dirigé par deux officiers réfractaires de l’armée congolaise et autoproclamés « général ».
Le groupe opère dans les provinces de l’Ituri, Haut-Uélé dans le Nord-est et de Maniema (Est). Le groupe revendique le combat pour une RDC selon les idées politiques du tout premier ministre congolais Patrice Emery Lubumba.
Nyatura : Créée en 2010, Nyatura est une milice Hutu congolaise présente dans les territoires de Masisi, Rutshuru et Lubero, dans la province du Nord-Kivu (Est) et s’affronte régulièrement à tous les groupes Maï-Maï hostiles à la présence des rwandophones dans l’Est de la RDC.
Les autorités congolaises et l’ONU ont récemment établi l’existence d’une coalition active de cette milice avec les FDLR.
Mazembe : Cette milice se réclame défenseur des Nande, une ethnie répandue dans le Nord-Kivu. Elle existe depuis peu, mais elle s’est faite remarquée après le massacre début janvier 2016 d’une dizaine de personnes issues de la communauté Nande par des FDLR, à Miriki, dans le territoire de Lubero au Nord-Kivu.
Mazembe et Nyatura excellent en représailles et en contre-représailles des peuples rwandophones, d’une part et Nande, Hunde et Kobo dans le territoire de Rutshuru (Nord-Kivu), d’autre part.
APCLS : Créée en 2008, l’Alliance des patriotes pour un Congo libre et souverain (APCLS) est structurée et dirigée par le «général» Janvier Karayiri, un officier transfuge de l’armée régulière. Elle sévit essentiellement dans le territoire de Masisi et Walikale dans le Nord-Kivu et composée de combattants appartenant à l’ethnie Hunde.
Nduma defense of Congo (NDC) : Constituée en 2009, NDC se dit vouloir « libérer les mines » situées dans le Nord-Kivu en les soustrayant au contrôle du gouvernement. Mais la milice est active dans le territoire de Walikale et se veut protectrice de la communauté Nyanga.
Son chef, Ntabo Ntaberi Sheka qui s’est récemment rendu auprès de l’ONU et transféré à Kinshasa, fut candidat malheureux aux législatives de 2011 et avait soutenu la candidature du président Kabila à la présidentielle. La milice compte aujourd’hui moins de cent hommes qui affrontent régulièrement sa faction dissidente, le «NDC rénové».
Raïa Mutomboki : En swahili « Peuple en colère ». C’est une milice formée en 2005 dans le Sud-Kivu (Est) pour protéger les civils contre les attaques des FDLR. Le mouvement s’est ensuite exporté au Maniema et au Nord-Kivu. Raia Mutomboki sévit aussi dans la province du Maniema.
Mai-Mai Yakutumba : Du nom d’un ancien officier supérieur de l’armée régulière qui s’est proclamé «général» en 2007, les Maï-Maï Yakutumba font bruit dans une partie de la province de Tanganyika (Sud-est) et la province du Sud-Kivu précisément dans les territoires de Fizi et Uvira qui ont servi pendant longtemps de maquis à Laurent-Désiré Kabila, tombeur en 1997 du dictateur Mobutu Sese Seko et père de l’actuel président Joseph Kabila.
La milice est également connue sous le nom de coalition nationale du peuple pour la souveraineté du Congo (CNPSC), ou encore Alliance de l’article 64 (AA64) et Justifie sa lutte par l’ambition de chasser Joseph Kabila du pouvoir.
Son chef, le général William Amuri Yakutumba se contente de contrôler divers trafics avec la Tanzanie à travers le lac Tanganyika, qui sert de frontière naturelle entre ces deux pays, selon les experts de la région.
FRPI : Créées en 2002, les Forces de résistance patriotique de l’Ituri (FRPI), est le groupe armé le plus important de la province de l’Ituri (Nord-est). Le groupe a surtout fait son nom dans les conflits entre les communautés Hema et Lendu dans cette province riche en or.
L’un de ses chefs, le général Germain Katanga a déjà été condamné à 12 ans de prison par la Cour pénale internationale (CPI) et fini de purger sa peine depuis janvier 2016.
Cela étant, le phénomène des groupes reste difficile à cerner, compte tenu de la difficulté d’accès et de l’inexistence de source fiable d’information.
Toutefois, selon une étude publiée en 2015 par le Groupe d’étude sur le Congo (GEC), un projet de recherche du Centre de coopération internationale de l’Université de New York, ces groupes ce sont morcelés pour passer d’une vingtaine en 2008 à plus de 70 ultérieurement.
Dans la première décennie ayant suivi la prise de pouvoir par le président Joseph Kabila, plusieurs groupes ont abandonné la lutte armée en échange d’une intégration de leurs combattants ou commandants au sein de l’armée régulière ou la police. Mais depuis l’adoption de la loi de réforme de l’armée de 2011, Kinshasa refuse de tels arrangements.
La fragmentation de ces principaux groupes armés, la persistance des conflits interethniques, la tension avec des pays limitrophes, la crise politique ainsi que le trafic illicite des minerais, sont les principaux facteurs qui expliquent la prolifération de ces groupes armés, selon plusieurs rapports concordants.
Par Esma Ben Said/Pascal Mulegwa (aa.com.tr/fr/Afrique/RDC)