Les élections de 2018 sont entrées dans l’histoire comme celles qui ont été les plus difficiles à organiser. Reportées plusieurs fois, elles ont eu lieu le dimanche 30 décembre 2018. Mais, quels sont les autres rendez-vous électoraux organisés dans le pays? Nous allons les brosser succinctement pour les cadrer dans le temps et dans l’histoire.
Congo belge
1957
Le premier scrutin dans l’histoire du Congo a lieu le 8 décembre 1957. Appelées consultations, ces élections municipales ne sont organisées que dans trois villes à savoir Léopoldville (Kinshasa), Elisabethville (Lubumbashi) et Jadotville (Likasi). Elles sont ouvertes aux femmes, aux Congolais et aux Belges âgés au moins de 25 ans et résidant de façons stable dans la ville où ils sont candidats. Faits saillants, plusieurs partis politiques voient le jour après le scrutin. Élu bourgmestre de la commune de Dendale, Joseph Kasa-Vubu est intronisé le 20 avril 1958. Il prononce à cette occasion un discours dans lequel il déclare : « La Belgique doit reconnaître la nationalité congolaise ou l’autonomie interne du pays afin de permettre aux Belges et étrangers établis au Congo depuis de longues années d’acquérir cette nationalité et assurer ainsi l’exercice des droits qu’ils ont acquis chez nous. (…) L’instauration de la démocratie ne sera établie que dans la mesure où nous obtiendrons l’autonomie, fût-ce interne. (…) Il n’y a pas de démocratie tant que le vote n’est pas généralisé. (…) Le premier pas n’est donc pas encore accompli. Nous demandons des élections générales et l’autonomie interne. »
1959
Des élections municipales au suffrage universel sont tenues après les émeutes du 4 janvier pour élire des conseillers municipaux et des membres des conseils des territoires dans les milieux ruraux. Elles sont boycottées par plusieurs partis politiques dont les leaders sont plus préoccupés par les revendications de l’indépendance. Au 1er décembre de cette même année, le Congo compte 36 partis politiques.
1960 : Élections générales
Après les émeutes sanglantes du 4 janvier 1959 qui ont ouvert la voie à la Table ronde de Bruxelles, des élections législatives, sénatoriales et provinciales sont organisées. Elles se déroulent du 11 au 22 mai 1960 dans le cadre de l’indépendance prévue le 30 juin. Plusieurs partis politiques présentent leurs candidats à plus de 2 millions de Congolais. Avec 137 sièges obtenus, le MNC et ses alliés raflent la majorité au Senat et à la Chambre. Patrice Lumumba est de facto nommé Premier ministre tandis que Joseph Kasa-Vubu est élu Président de la république par le parlement avec 78,7 % des voix au détriment de Jean Bolikango (21,2 %).
République du Congo / Congo Léo
1964
Du 25 juin au 10 juillet est organisé sous l’’egide de Kasa-Vubu le premier référendum de l’histoire du Congo. Le peuple est appelé à se prononcer pour ou contre la Constitution de Luluabourg en remplacement de la Loi fondamentale léguée par la Belgique après l’indépendance. Le vote se fait par le biais d’un bulletin « pour » de couleur verte et d’un bulletin « contre » de couleur noire. Le oui l’emporte à une large majorité avec 90,82 % des voix. Le 1er août, le Congo-Léo devient la République démocratique du Congo.
RDC
1965 : Élections générales
Du 18 mars au 30 avril ont lieu les élections législatives, sénatoriales et provinciales en prélude à l’élection présidentielle à venir. Le cartel de la CONACO mené par Moïse Tshombe se taille la part du lion (122 élus sur 167) devant tous les partis dont l’Abako du président Kasa-Vubu. Mais les résultats sont contestés par plusieurs formations politiques dans certaines villes. La cour d’appel de Léopoldville annule le scrutin au Kivu Central, Goma-Rutshuru, Cuvette Centrale, Fizi, Kwilu et Maniema pour les organiser entre le 8 et le 22 août. Ces élections pluralistes sont les dernières car l’armée met fin au processus démocratique par le coup d’État du 24 novembre.
1967
La seconde élection référendaire est organisée par Mobutu devenu président près de deux ans plus tôt. Du 4 au 10 juin, les Congolais sont appelés à se prononcer sur la Constitution de 1967 qui instaure un parlement monocaméral et impose un mandat présidentiel de sept ans renouvelable indéfiniment. Les électeurs votent par le biais d’un bulletin « pour » de couleur rouge et d’un bulletin « contre » de couleur noire. La nouvelle constitution est adoptée avec 98,44 % des voix.
1970
Mobutu règne depuis cinq ans. Faisant suite aux résolutions du premier congrès extraordinaire du MPR et après avoir éliminé ou éloigné ses concurrents les plus sérieux, Le part-État organise les premières élections présidentielles congolaises les 31 octobre et 1er novembre. Dans le système monopartite qu’il a introduit, Mobutu est le seul candidat à sa propre succession. Les électeurs doivent choisir entre un bulletin vert du oui ou un bulletin rouge du refus. C’est un plébiscite.
Mobutu obtient 100,3 % des voix. Impossible n’est pas MPR, car même s’il n’y avait que 10.101.330 de Congolais enregistrés dans les listes électorales, ils étaient 10.131.826 à déposer leurs bulletins dans l’urne en faveur du Guide. Le premier miracle de la révolution du MPR étant accompli, Mobutu est reconduit à la tête de l’État pour les sept prochaines années. Les élections législatives se déroulent le 15 novembre soit deux semaines après la présidentielle. Les candidats au scrutin sont sélectionnés lors du congrès du MPR. Ils sont élus au scrutin de liste dans les 35 circonscriptions électorales du pays.
Zaïre
1975
Ces élections législatives sont les premières organisées sous le nouveau nom du pays. Le parlement s’appelle désormais Conseil législatif et les députés sont des commissaires du peuple. Les candidats sont tous membres du MPR et ont versé une caution de 200 dollars. Le scrutin se déroule le 2 novembre dans les circonscriptions afin de pourvoir 244 sièges dont 27 sont réservés aux femmes. L’élection se fait par acclamation publique au cours des rassemblements populaires. Cette méthode remplace le système des urnes jugé compliqué et couteux. Cette assemblée élue pour cinq ans est une véritable caisse de résonnance qui ne fait qu’entériner les lois préparées par le Bureau politique du MPR.
1977
Suite à la dislocation anticipée du parlement élu en 1975, sont organisés les 15 et 16 octobre les élections législatives afin d’adapter le Conseil législatif aux réformes annoncées par Mobutu le 1er juillet en vue de renforcer le processus de démocratisation du pays. Les candidats sont tous membres du MPR et versent une caution non remboursable de 100 zaïres. Ils sont choisis dans les circonscriptions sur la liste établie par le parti. L’élection se déroule sur la base de scrutin catégorique et majorité simple. La présidentielle a lieu le 3 décembre. Le vote n’est ni libre ni secret. Mobutu est le candidat unique du parti unique au pouvoir. Pour choisir le candidat imposé par le MPR, l’électeur doit comme en 1970 prendre le bulletin vert à la vue de tout le monde avant de le glisser dans l’urne. Mobutu recueille le score soviétique de 98,2 %.
1982
Les 18 et 19 septembre ont lieu le renouvellement de tous les membres du Conseil législatif à l’échéance normale de leur mandat. Les candidatures sont retenues par le Comité central du MPR sur recommandation des cellules locales et régionales du parti. Les commissaires du peuple sont choisis au scrutin majoritaire simple dans les circonscriptions.
1984
L’élection présidentielle a lieu le 29 juillet. Le Guide est candidat unique à sa propre succession. Le président sortant obtient 99,1 %. Plus de 14 millions de bulletins verts ont été glissés dans l’urne pour celui qui s’est présenté sans opposition.
1987
Le scrutin est organisé le 6 septembre pour renouveler les membres du parlement en fin mandat. Chaque candidat paie environ 170 dollars non remboursables. Les élections sont au scrutin majoritaire simple. Elles sont les dernières organisées par Mobutu Sese Seko et le MPR.
RDC
2005
Le troisième référendum constitutionnel est organisé par la Commission électorale indépendante (CEI) sous Joseph Kabila les 18 et 19 décembre en remplacement de la Constitution de la transition de 2003. A la question : Approuvez-vous le Projet de Constitution qui vous est soumis ? Le oui l’emporte avec 84,31 % des voix.
2006
Les premières élections pluralistes depuis 1965 ont lieu. La présidentielle à deux tours est organisée par la CENI. Le septennat introduit par le MPR est aboli et est remplacé par le quinquennat. Ce premier scrutin post Mobutu est aussi le premier qui met en lice plusieurs prétendants. Pour le premier tour du scrutin le 30 juillet, ils sont en effet 33 candidats pour le fauteuil présidentiel. Étienne Tshisekedi qui a boycotté les élections pour manque de transparence et le grand absent de ce rendez-vous majeur. Le second tour oppose Kabila et Jean-Pierre Bemba le 29 octobre sur fond de tensions entre les deux hommes. Les résultats rendus public par la CENI le 15 novembre proclament le président sortant vainqueur avec 58,05 %. Bemba (41,95 %) introduit des recours pour les fraudes massives constatées. Mais la cours suprême les rejette. Les Congolais sont unanimes et reconnaissent que la vérité des urnes n’a pas été celle qui a été proclamée, que Kabila et la CENI leur ont volé leur victoire. Parallèlement à l’élection présidentielle a aussi lieu le même jour les élections des membres de l’Assemblée nationale pour remplacer les institutions transitoires mises en place en 2003.
2007
Pour les élections sénatoriales du 19 janvier, les sénateurs sont choisis par élection indirecte par les membres des assemblées provinciales. Suite aux irrégularités, les membres de Bundu dia Kongo contestent les résultats, ils sont massacrés par l’armée.
2011
L’élection présidentielle a lieu le 28 novembre. C’est un scrutin uninominal majeur à un tour pour un mandat de cinq ans renouvelable une fois. Plusieurs candidats sont en lice. L’opposition s’engage en ordre dispersé. L’UDPS en la personne de son leader charismatique Étienne Tshisekedi est présent. L’organisation est chaotique. Des fraudes sont constatées. L’objectif affiché est de faire gagner le président sortant malgré son impopularité. La proclamation des résultats confirme cette tendance. Kabila avec 48,9 % des voix obtenus par le rembourrage des urnes est réélu pour un dernier mandat. Pour beaucoup d’observateurs, c’est Étienne Tshisekedi à qui la CENI avait faussement attribué 32,3 % des voix des Congolais qui a été le grand vainqueur de cette joute électorale. Le président de l’UDPS qui conteste les résultats s’autoproclame président et prête serment dans sa résidence.
2018
Les élections législatives, provinciales et la présidentielle sont marquées par une innovation controversée : la machine à voter qualifiée de machine à tricher. Dix-neuf candidats se lancent dans la conquête du pouvoir suprême. Kabila contraint de se mettre à l’écart ne se représente pas. Plusieurs coalitions dont les plus importantes sont Lamuka, CACH et le FCC voient le jour. Le scrutin, Initialement prévu le 23 décembre, a finalement lieu le 30 décembre. Les raisons avancées par la CENI pour cet ultime report ne convainquent personne. L’élection présidentielle est annulée à Beni, Butembo et Yumbi. L’organisation est chaotique le jour du rendez-vous. Plusieurs électeurs ne se retrouvent sur aucune liste électorale. Certains bureaux ouvrent à 17 heures. Malgré l’imbroglio, les élections tant attendues ont lieu.
La proclamation des résultats tarde à venir. Dans cette attente, la Cenco qui a placé quelque 40.000 observateurs dans les bureaux de vote à travers le pays dispose du nom du vainqueur de la présidentielle. Le vendredi 4 janvier dernier, sur fond de tension entre les prêtres catholiques et le pouvoir, l’Abbé Donatien Nshole et sa délégation auraient confié à Kabila le nom du gagnant de la présidentielle conformément au dépouillement en leur possession. Ils lui ont également demandé d’aider la CENI afin qu’elle publie les vrais résultats de ces élections.
Par Samuel Malonga (Mbokamosika.com)