Par Angelo Mobateli
Les fortes tensions en cours, entre le Cap pour le changement (CACH) du président Félix Tshisekedi et le Front commun pour le Congo (FCC) dont l’Autorité morale est son prédécesseur Joseph Kabila, deux plateformes politiques en coalition au pouvoir, ont poussé certaines voix à accuser le Raïs de bloquer les actions de son successeur.
« Raïs alingi na ye makambo te, bo tika ye tranquille » (Le Raïs ne veut pas de problèmes, laissez-le tranquille), a révélé à Congoreformes.com sous anonymat, jeudi 26 novembre 2020, une source proche de Kingakati, la ferme du Raïs Kabila Kabange.
L’UDPS ET SES ALLIÉS ACCUSENT LE FCC DE « BLOQUER LA MACHINE DU DÉVELOPPEMENT DE LA RDC »
« Nous sommes dans une coalition, mais les actes que posent nos amis du FCC ne donnent pas l’envie de continuer et n’accorde pas au Chef de l’État l’occasion de bien gérer la nation. Les grandes têtes sont passées aux consultations (Katumbi, Bemba, Kyungu etc..). Nous avons besoin d’une Union sacrée. Kabila doit continuer avec ses retraites, et nous on s’en fout. Le FCC freine la machine du développement de la nation suite aux actes que commettent ses partisans », a dit un cadre de l’Union pour la démocratie et le développement social (UDPS) aux militants du parti et à ceux des regroupements politiques alliés engagés, samedi 14 novembre 2020 à Tshikapa.
La manifestation a été organisée pour soutenir les consultations présidentielles entamées le 02 novembre au Palais de la nation, à Kinshasa.
« Nous attendons la reconfiguration de la majorité parlementaire ainsi que la nomination d’un informateur en vue de la formation du nouveau gouvernement », a déclaré à la presse Bruno Tshibangu Kabaji, président fédéral de l’UDPS/Lubumbashi (Haut-Katanga), le 26 novembre 2020.
« Depuis Kikwit, j’envoie le message à Kabila et à l’ensemble de sa famille politique, la coalition FCC et CACH se conjugue désormais au passé », a déclaré le président intérimaire de l’UDPS, Jean-Marc Kabund, dimanche 15 novembre 2020, après la marche organisée par l’UDPS et ses alliés, pour soutenir les consultations présidentielles.
« KABILA N’A JAMAIS DÉCLARÉ QU’IL VA BLOQUER LES ACTIONS DE TSHISEKEDI »
Député provincial de Kinshasa et cadre de l’UDPS, également vice-président de l’Assemblée provinciale de Kinshasa, Francis Tshibalabala, avait affirmé, le 28 janvier 2020, qu' »en réalité, la coalition se porte bien ».
« Sauf qu’il y a quelques lieutenants du FCC qui ne veulent pas que le président réussisse. Mais, jusque-là, l’Autorité morale du FCC n’a jamais déclaré publiquement qu’il va bloquer le président de la République. Ce sont plutôt les caciques du FCC qui ne sont pas contents de voir Félix Tshisekedi travailler pour le peuple parce qu’eux avaient échoué en travaillant pour leurs intérêts. La coalition demeure encore. Nous sommes en train de peaufiner des stratégies pour que, chaque fois qu’il y aura blocage, nous puissions les contourner », avait-il expliqué à la presse.
FCC et CACH, TOMBÉS D’ACCORD, DEMANDENT À TSHISEKEDI DE NOMMER UN FORMATEUR DU GOUVERNEMENT
Le Front Commun pour le Congo (FCC) et le Cap pour le Changement (CACH) affirment leur volonté commune de gouverner le pays « dans le cadre d’une coalition gouvernementale ».
Les deux plateformes ont signé un communiqué de presse, mercredi 6 mars 2019 à Kinshasa, pour demander « à l‘Autorité du FCC (…) d’accomplir les devoirs de sa charge permettant au Chef de l’État de procéder à la désignation du formateur du gouvernement ».
Dans le même document, les deux regroupements politiques demandent à Félix Tshisekedi de « nommer diligemment ledit formateur du gouvernement ».
Néhémie Mwilanya et Jean-Marc Kabund rapportent que les deux plateformes ont discuté du 4 au 6 mars 2019 et sont arrivés à la conclusion que le FCC « détient de manière documentée, la majorité absolue à l’Assemblée nationale au sens de l’article 78 alinéa 1er de la Constitution ».
FÉLIX TSHISEKEDI NOMME SYLVESTRE ILUNGA, » VU L’ACCORD », PREMIER MINISTRE
Le président Félix Tshiseked, aux termes de l’Ordonnance n-19/056 du 20 mai 2019, après son investiture le 24 janvier 2019, nomme Sylvestre Ilunga Ilunkamba Premier ministre, ”Vu la Constitution du 18 février 2006 (…), spécialement en ses articles 78, 79 et 90; Vu l’Accord politique entre les forces politiques membres du Cap pour le changement (CAC) et celles du Front commun pour le Congo (FCC) en vue de la formation d’un Gouvernement de coalition représentatif de ces regroupements politiques; Vu la personnalité proposée au poste de Premier ministre en date du 17 mai 2019 par le Front commun pour le Congo (FCC)“.
Les particularités de cette ordonnance présidentielle sont aussi les dates.
Le 17 mai rappelle “l‘entrée de Laurent Désiré Kabila et ses troupes de l’AFDL en 1997 à Kinshasa d’où s’était enfui le maréchal Mobutu“.
Le 20 mai fait penser à la date de la création du Mouvement populaire de la révolution (MPR) par Joseph Désiré Mobutu en 1967.
Étaient-ce des choix fortuits ? Seuls les ” fondateurs” de l’Accord de Kingakati, tous encore vivants, peuvent éclairer la lanterne du peuple congolais et celle de l’opinion internationale.
FÉLIX TSHISEKEDI SALUE LE COURAGE DE SON “FRÈRE” JOSEPH KABILA
Le 13 décembre 2019, devant l’Assemblée nationale et le Sénat réunis en Congrès au Palais du peuple à Kinshasa, le président Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo rend hommage à son “frère”Joseph Kabila, dans son premier discours sur l’état de la nation.
“Ce jour est un jour merveilleux. Pour la première fois, depuis la promulgation de notre Constitution en février 2006, j’allais dire, depuis l’accession de notre pays à l’indépendance, un autre Président de la République élu vient s’adresser à la Nation, à travers vous, pendant que son prédécesseur est en vie, à l’issue d’une alternance démocratique et une passation pacifique de pouvoir. C’est un jour rêvé pour tous les acteurs qui ont porté notre beau pays dans ce qu’il a de noble, tout en éveillant nos consciences. Un grand jour pour notre volonté commune de franchir ensemble les rivages de notre destin. Nous honorons un Congo réconcilié. Notre Nation ne sera plus un Congo de la division, de la haine ou du tribalisme. Nous avons affirmé la volonté de construire un Congo uni et fort dans sa diversité culturelle et son attachement à la mère patrie. Un Congo tourné vers son développement dans la paix et la sécurité. Un Congo pour tous dans lequel chacun mérite sa place. Je voudrais ici saluer le courage de mon prédécesseur et frère, Joseph Kabila Kabange, qui a tenu à respecter son engagement constitutionnel, celui de permettre au peuple congolais de choisir librement ses nouveaux dirigeants“, s’enorgueillit-il.
OLENGANKOYI : “IL AURAIT ÉTÉ SOUHAITABLE QUE LE PRÉSIDENT TSHISEKEDI CONSULTE D’ABORD KABILA”
“Il aurait été souhaitable que le président Tshisekedi consulte d’abord son prédécesseur Kabila. On aurait souhaité que les deux se rencontrent d’abord pour la simple raison que ce système politique est nouveau en République démocratique du Congo. D’ailleurs, le Chef de l’État Félix-Antoine Tshisekedi l’a, lui-même, reconnu lors de son adresse aux deux Chambres du parlement réunies en Congrès“, a déclaré Joseph Olengankoyi, qui conduisait une délégation du Conseil national de suivi de l’accord de Saint Sylvestre (CNSA) aux consultations du Chef de l’État, lundi 2 novembre 2020 au Palais de la nation à Kinshasa.
“Il aurait fallu qu’ils en discutent à deux, sans la présence de leurs acolytes qui sont parfois extrémistes. Ce tête-à-tête, dans toute intimité, devait leur permettre de parler de la situation qui prévaut au pays. C’est par là que le Chef de l’État aurait trouvé de solutions à tous ces problèmes. Ce n’est qu’après cette rencontre, le président de la République pouvait rencontrer, en deuxième lieu, le Parlement, le Sénat, les autres Institutions du pays“, a-t-il insisté.
Parce que “notre rôle, ce n’est pas de dire des mensonges, mais notre mission est de l’orienter vers la voie de la paix“, a expliqué le président du CNSA.
LA CIME APPELLE FÉLIX TSHISEKEDI À “INTERROGER SA CONSCIENCE”
“Nous avons interpelé le président de la République parce que c’est lui qui a prêté serment, c’est lui qui doit interroger sa conscience et Dieu parce que c’est Dieu qui lui a donné cette autorité. J’ai insisté pour qu’il interroge sa conscience, qu’il craigne Dieu pour qu’on n’exacerbe pas la crise (…), qu’on trouve une solution », a indiqué à la presse l’Imam Moussa Rachidi, qui conduisait la délégation de la Commission d’intégrité et de médiation électorale (CIME), qui conduisait la délégation, lundi 02 novembre 2020, aux consultations présidentielles.
En effet, a-t-il dit, “la CIME est consciente des difficultés que connaît le pays“.
“Elle espère que ces consultations sortiront des résultats susceptibles de sortir notre pays de la zone de turbulence (…). C’est notre pays, nous devons insister pour qu’il y ait l’unité et la stabilité du pays. Il y a plusieurs solutions pour sortir de cette crise. Et c’est ce que nous avons mentionné dans notre cahier de charges“, a conclu l’Imam Moussa Rachidi au sortir de l’entrevue avec Félix Tshisekedi.
QUE VA DÉCIDER FÉLIX TSHISEKEDI ?
Les consultations présidentielles ayant été clôturées mercredi 25 novembre 2020 au Palais de la nation, les décisions en résultant sont attendues par le peuple congolais.
La date du prochain discours présidentiel n’ayant pas été révélée, l’opinion nationale et internationale se perd en conjectures, surtout à près d’un mois de la prise de fonctions de Félix Tshisekedi à la présidence tournante de l’Union africaine (UA), en janvier 2021.
Par Angelo Mobateli