En République démocratique du Congo, les autorités parlent de relance de la filière café depuis au moins 3 ans. Mais les progrès sont difficiles à évaluer. Ce sujet a fait l’objet d’un forum qui s’est tenu à Kinshasa en juin dernier sous le thème de l’amélioration du climat des affaires dans les filières café et cacao. Selon certains acteurs, pour relancer la filière du café dans ce pays, il faudrait réorganiser la collecte, la logistique et réhabiliter les usines de traitement de la récolte.
Cinq mille tonnes de café, c’est le volume officiel des exportations annuelles du Congo-Kinshasa, pour une valeur de 10 millions de dollars, contre 100 000 à 120 000 tonnes il y a au moins 25 ans, pour une valeur de 250 millions de dollars, ce qui représente une chute vertigineuse. Richard Lukusa, de la société Duke Equities. « On estime que la RD Congo produit plus ou moins 30 000 tonnes, ça veut donc dire qu’on est autour d’un volume d’affaires de 60 à 70 millions de dollars par an. Or, officiellement, nous n’exportons que 5 000 tonnes. Il est donc clair que nous avons un manque à gagner annuellement entre 50 et 200 millions de dollars. »
La différence entre la production officielle et la production réelle de café s’explique par les volumes enregistrés à l’exportation… Paul Tumsifu travaille pour une société d’exportation du café et du cacao dans l’est du Congo-Kinshasa. « C’est difficile aujourd’hui de connaître la production au niveau de l’est du pays, puisqu’il y a par exemple au niveau des provinces du Nord et du Sud-Kivu une grande partie de la production qui traverse de manière incontrôlée vers le Rwanda ».
Des conséquences de la guerre et de l’insécurité
La caféiculture a été l’une des filières les plus touchées par les années de guerre et d’insécurité. La production a survécu grâce aux acheteurs étrangers, notamment dans l’ouest du pays, explique Richard Lukusa. « Les productions de l’Ouest sortent frauduleusement par la République centrafricaine jusqu’au Cameroun par le port de Kribi. Ce n’est pas forcément un point négatif, parce que ces acheteurs qui viennent de l’Afrique de l’Ouest, de la RCA et du Cameroun ont permis qu’il y ait la continuité de la production, mais elle sort et n’apparaît pas dans les statiques officielles de la RD Congo. »
Du café bradé par les producteurs, qui n’ont pas d’autres débouchés, par manque d’acheteurs locaux. Faute d’une organisation bien huilée de la filière, il y a aujourd’hui peu de Congolais qui s’intéressent à la production de café sur les petites parcelles, selon Richard Lukusa. « Sur le terrain, les producteurs ont vieilli. Donc, il faut encourager les jeunes à rester et à reprendre la culture du café. Il y a tout un travail à refaire et le forum qui vient d’être organisé il y a quelques semaines par le gouvernement va dans ce sens-là. Maintenant, voyons ce que ça va donner de façon réelle et de façon concrète. Mais c’est une prise de conscience de ce qu’est le café dans ce pays. Le café dans ce pays a été pendant longtemps la 2e source de devises après le cuivre ».
Le café ne représente plus aujourd’hui que moins de 1 % du PIB du Congo-Kinshasa. Au lieu de s’intéresser au secteur agricole, les jeunes congolais qui le peuvent préfèrent travailler dans le secteur minier.
Par Stanislas Ndayishimiye (RFI: 23/07/2018)