Le comité de politique monétaire a décidé de resserrer davantage son dispositif de la politique monétaire à travers le relèvement du taux directeur à 18,5% venant de 7,5%. C’est l’une des mesures prises pour stabiliser la monnaie, a déclaré le gouverneur de la Banque Centrale du Congo, lors de la conférence de presse qui a suivi la 7ème réunion du comité de politique monétaire, le vendredi 14 août 2020.
Avant le confinement, « nous étions à 9%, puis nous avons baissé à 7,5% afin de soutenir l’activité économique et permettre le refinancement », a poursuivi Deogratias Mutumbo Mwana Nyembo avant d’ajouter que c’est une mesure prise par beaucoup de pays en Afrique.
« C’est pour contenir l’expansion monétaire vu la sur liquidité actuelle, nous avons résolu de relever le taux directeur et le taux d’inflation. C’est pour atteindre la positivité au délà du taux d’inflation en annualisé. On est presque en positivité car le taux d’inflation attendue au 31 décembre est de 20% ce qui n’est pas mauvais », a expliqué l’autorité monétaire.
À l’entendre, » la politique monétaire reste toujours coordonnée de manière étroite à la politique budgétaire parce que nous devons suivre l’exécution du plan de trésorerie ».
« Avec le bon du trésor nous avons l’avantage de ponctionner de la liquidité du marché pour financer », a-t-il ajouté.Une autre mesure est le contrôle de rapatriement des recettes d’exploitation des entreprises minières qui est en cours.
« Nous avons déjà le premier rapport intérimaire d’une partie de rapatriement concerné par les miniers qui sont du régime général de 100%. Nous sommes en train d’examiner la situation de ceux qui n’ont pas encore rapatriés sur 210 millions exportés, on a rapatrié 146 millions pour savoir pourquoi la différence n’a pas été rapatriée », a fait remarquer le numéro 1 de la BCC.
En outre, il a indiqué que la BCC poursuit avec la sensibilisation des bureaux de change sur les bonnes pratiques de cette profession.
Le Comité de Politique Monétaire a tenu, ce vendredi 14 août 2020, sous la présidence de Monsieur Déogratias MUTOMBO MWANA NYEMBO, Gouverneur de la Banque Centrale du Congo, sa septième réunion ordinaire de l’année.
Les échanges se sont focalisés sur les derniers développements économiques aussi bien au plan extérieur qu’intérieur ainsi que sur les facteurs de risque susceptibles d’affecter la stabilité du cadre macroéconomique à court terme et les mesures idoine de politique monétaire et de change à observer. Il en ressort ce qui suit :
:Au plan extérieur,
L’économie mondiale demeure fortement affectée par les conséquences de la Covid-19. L’impact de cette pandémie dans les économies africaines devrait être plus sévère, particulièrement en 2020, que celui des crises précédentes qu’a connu ce continent ces dernières années.
En effet, pour la Banque africaine de développement (BAD), l’activité économique continentale devrait se contracter de 3,4 % en 2020 contre une progression de 3,9 % prévue initialement. Une tendance analogue est prédite par le FMI qui table sur une récession de -3,2 % pour l’Afrique Subsaharienne.
Ce recul de l’activité économique résulte principalement des effets de mesures prises par les autorités des différents pays pour limiter la propagation de la maladie, occasionnant ainsi l’arrêt de l’activité dans tous les secteurs.
Cette situation est de nature à saper les performances enregistrées ces deux dernières décennies, notamment en matière de la réduction de la pauvreté.
Dans ce contexte et compte tenu des vulnérabilités structurelles du continent, les Gouvernements sont encouragés à prendre des mesures adéquates et urgentes visant non seulement à atténuer l’impact socioéconomique de la crise mais surtout à protéger les populations les plus vulnérables grâce à des mesures de protection sociales bien ciblées.
Toutefois, une reprise de l’activité est attendue à partir de 2021, sous réserve de la trajectoire de la maladie et des mesures qui seront prises par les autorités, notamment les mesures de santé publique, de politique monétaire et budgétaire.
Concernant l’évolution des cours mondiaux des matières premières intéressant l’économie congolaise, il est noté la poursuite à la hausse des cours du cuivre et du pétrole, amorcée depuis le mois de mai dernier.
En effet, au mois de juillet 2020, les prix de ces produits ont augmenté de près de 11,0 % et 6,0 %, se fixant en moyenne à 6.336,0 USD la tonne et 43,1 USD le baril. Quant au cours du cobalt, il a enregistré une baisse de 2,1 %, s’établissant en moyenne à 28.554,4 USD la tonne.
Au plan intérieur
La contraction de l’économie congolaise devrait être moins forte que celle estimée sur base des réalisations à fin mars, en raison notamment du bon comportement des activités dans le secteur minier à la faveur du confinement des ouvriers dans les mines ainsi que de la tendance à la bonne tenue des cours mondiaux.
En effet, sur base des réalisations de la production à fin juin 2020, le taux de croissance en 2020 reculerait à -1,7 % contre une chute estimée à -2,4 % en mars.Les résultats encourageants enregistrés au premier semestre conjugués aux mesures de riposte prises par les autorités pour atténuer les effets néfastes de la Covid-19 ont contribué à améliorer la confiance de chefs d’entreprises au mois de juillet 2020.
Ainsi, le solde global d’opinions s’est amélioré passant de -22,3 % en juin à -15,1 % en juillet.Sur le marché des biens et services, en rythme mensuel, il apparait une légère accélération de l’inflation en juillet, soit 2,95 % venant de 2,55 % le mois précédent, sur fond notamment du déficit de l’offre des biens dans un contexte de sortie des mesures de confinement aussi bien aux plans externe qu’interne.
En cumul glissement annuel, l’inflation a atteint respectivement 12,31 % et 14,59 %. Dans ce contexte, à condition inchangée, l’année pourrait se clôturer avec un taux d’inflation de 20,76 % contre un objectif à moyen terme de 7,00 %.
Au niveau des finances publiques, les opérations financières de l’Etat en juillet se sont clôturées avec un déficit de 182,0 milliards de CDF, résultant d’un niveau des recettes de 604,3 milliards et celui des dépenses de 786,3 milliards.
Toutefois, ce déficit a été financé par les émissions nettes des Bons du Trésor pour 23,7 milliards de CDF ainsi que par une quotité des ressources provenant de l’appui budgétaire du FMI, soit 158,2 milliards.Sur le marché des changes, les mesures prises par la BCC, au mois de juillet dernier, ont permis de contenir les pressions observées sur le marché.
En effet, à la cinquième semaine du mois de juillet, la monnaie nationale s’est dépréciée, à l’indicatif, de 0,6 % contre une dépréciation de 1,0 % la semaine précédente.
Au parallèle, il a été noté une appréciation de 0,3 % à la dernière semaine du mois contre une dépréciation de 1,0 % la semaine d’avant.
En outre, il est observé une tendance à l’appréciation du franc congolais au mois d’août courant sur les deux segments, attestée par taux d’appréciations respectifs de 0,9 % au 12 août 2020.
Par ailleurs, les réserves de change se sont établis à 832,1 millions de USD à fin juillet, soit une diminution de 47,3 millions, expliquée notamment par l’intervention indirecte de la Banque Centrale sur le marché afin d’améliorer l’offre des devises sur le marché.
Ce niveau de réserves correspond à 3 semaines et 2 jours d’importations des biens et services sur ressources propres, contre une couverture de 3 semaines et 3 jours au mois de juin.
Sur le plan monétaire, il ressort une contraction de la base monétaire de 9,2 milliards de CDF par rapport à fin juin 2020, expliquée par la baisse des avoirs extérieurs nets.Quant aux instruments de la politique monétaire, ils sont tous orientés vers la ponction de la liquidité. Cette coordination des instruments a contribué à l’assèchement de la liquidité bancaire comme l’atteste le niveau des avoirs libres des banques devenu négatif.
Ainsi, eu égard des risques des tensions aussi bien sur les marchés des biens et services que celui de change, le CPM a décidé de resserrer davantage son dispositif de la politique monétaire à travers le relèvement du taux directeur à 18,5 % venant de 7,5 %.
Quant aux coefficients de la réserve obligatoire, ils sont maintenus à leurs niveaux respectifs, soit 13% sur les dépôts en devises à vue et 12% sur ceux en devises à terme et à 0,0 % pour les dépôts en monnaie nationale toutes maturités confondues.
La régulation de la liquidité va se poursuivre avec le Bon BCC devenu plus attractif à la suite du relèvement du taux directeur.
Enfin sur fond de la coordination des politiques macroéconomiques, le CPM exhorte le Gouvernement à poursuivre et à densifier les efforts d’ajustement budgétaire et de mobilisation des recettes en vue de contribuer davantage à la stabilité macroéconomique indispensable pour jeter les bases d’une reprise économique forte et résiliente.
Par Mathy MUSAU (FDA)