Les communautés locales d’Inga, représentées par leurs six clans ont tenu une conférence de presse, le 26 août 2020 Ils ont exprimé leurs craintes sur leur sort au sujet du projet Inga 3.
Face aux journalistes, des chefs de clans et ayant-droits la peur au ventre. Ils représentent les six clans que composent les communautés locales d’Inga: Numbu, Mbenza, Ngimbi, Makhukhu Vunda, Makhukhu Manzi et Makhukhu Futila. Au-dessus de ces chefs de clans, une banderole affiche un message de détresse: « Le peuple d’abord: les communautés locales d’Inga sont aussi le peuple. Il n’y a pas que le projet Inga 3 qui compte. Elles comptent elles aussi ».
Ces communautés veulent justement être prises en compte et que les autorités du pays en l’occurrence le président Félix Tshisekedi fasse attention sur leurs craintes, leurs revendications, leurs préoccupations et leur sort liés au projet Inga 3 et les contentieux à régler des Inga 1 et 2.
Quid des communautés locales?
Mercredi 26 août 2020, des investisseurs Allemands ont signé un protocole d’accord avec le gouvernement congolais pour la construction d’Inga 3 pour 12 milliards d’euros et d’une usine d’hydrogène à 13 milliards de dollars.
Auparavant, fin juin dernier, le président de la République a lancé la conférence panafricaine du projet: »Grand Inga », prélude à celle des chefs d’Etat qui se tiendra soit en septembre soit en octobre.
Tous parlent des recettes faramineuses que cela va générer et l’emploi. Peu ou prou font allusion à l’impact sur les communautés locales. François Vangu est le chef du clan Makhukhu Futila. Victime d’Inga 1 et 2, son clan n’a plus de terres. Il exprime son désarroi.
« Inga 1 et 2 ont fait de nous un clan sans terres. Nous avons tout perdu. Tout nous a été ravi et nous ne disposons même plus du moindre mètre car les projets Inga 1 et 2 ont été aménagés sur la terre de nos ancêtres. Nous ne pouvons exercer ni chasse, ni agriculture. Je me suis réfugié sur le peu de terres restantes du clan Ngimbi », regrette-t-il.
Ces communautés locales ont écrit et fait des pétitions aux autorités. Mais, aucune autorité ne s’est préoccupée de leur sort. Elles interpellent ainsi le chef de l’État à qui elles rappellent son credo: « Le peuple d’abord ».
« Le président porte haut le projet Inga 3 qui arrive à grande vitesse’’, fait remarquer Albert Tona, vice-président de la CODICLI (Convergence pour les droits et intérêts des communautés locales d’Inga).Plusieurs autorités viennent à Inga mais avant l’indépendance jusqu’à aujourd’hui personne ne se préoccupe de notre sort. Que le président Fatshi qui prône la culture du peuple d’abord puisse accorder attention à notre sort car nos clans se meurent. Nous sollicitons une rencontre avec lui, à Kinshasa ou à Inga pour vider le contentieux Inga 1 et 2 et enclencher un processus de dialogue, des discussions, des consultations pour que nous ayons cette fois la possibilité d’exposer nos revendications.’’(Fatshi, Félix Antoine Tshisekedi)
Clans sans terres
Avec les projets Inga 1 et 2, le clan Makhukhu Futila a perdu toutes ces terres, d’autres en ont perdu une grande partie et ne peuvent donc plus exercer leurs activités de subsistance. En effet, Inga 1 et 2 n’ont pas délocalisé les populations, mais le changement de configuration de terres où a été aménagé le site d’Inga sur la concession de la Société nationale d’électricité! (Snel), associé à la précarité de la vie et l’expansion démographique, n’a rien arrangé à la situation de ces communautés locales. Et pour elles, Inga 3 va sonner le glas de toutes leurs terres. « Inga 3 va nous tuer! », craint Médard Phambu du clan Numbu.
Communautés locales non consultées
« Inga 3 est un vaste projet porteur pour la RDC’’, renseigne un expert environnemental.‘’Mais avec 4 800 mégawatts pour la première phase jusqu’à 11 000 mégawatts à la fin du projet, il va nécessiter la délocalisation de quelques 37000 personnes», indique-t-il.
Aussi, précise-t-il, ‘’qu’une telle délocalisation nécessite une étude d’impact du projet sur les populations locales, l’élaboration d’un plan d’atténuation de cet impact, la mise en place des stratégies de relocalisation’’.
‘’Les lois exigent même les consultations avec des communautés locales qui ont le droit du consentement libre. Mais, à ce jour aucune autorité n’a jamais rencontré les communautés locales d’Inga, d’où leurs craintes que les choses se déroulent comme par le passé et que leur héritage soit à jamais relégué dans les oubliettes et effacé de la carte d’Inga.
Par Papy Matumpa (Infobascongo)