Devant le Centre Régional d’Études Nucléaires de Kinshasa(CREN).
Le commissaire général à l’Energie atomique, le Pr Vincent Lukanda Mwamba, a présenté lundi 09 novembre 2020 à l’ACP, une étude réalisée sur la stabilité du sol autour du réacteur TRICO II du Commissariat général à l’énergie atomique/Centre régional d’études nucléaires de Kinshasa (CGEA/CREN-K).
Selon le Pr Lukanda, cette étude a pour but de mettre en œuvre les recommandations de la mission INSARR conduite par CREN-K du 7 au 9 mai 2018, en particulier la partie portant sur l’érosion du sol, la stabilité de la pente et la stabilité de la fondation.
Il sera question pour le CREN-K de recourir à une expertise devant notamment faire un état des lieux de la situation actuelle en rapport avec l’érosion autour du site à l’Université de Kinshasa (UNIKIN), de recueillir, examiner et intégrer toute la documentation disponible sur le site, d’évaluer la stabilité du site en relation avec l’érosion des collines, de proposer un programme d’assainissement du milieu environnant et de la surveillance de l’érosion.
Le programme nucléaire de la RDC articulé autour de ses deux réacteurs
Le Pr Lukanda a indiqué que depuis plus d’un demi-siècle, le programme nucléaire de la RDC s’est articulé autour de deux réacteurs de Triga Mark I (TRICO I, 150 Kw et Triga Mark II (TRICO II, 1.000 Kw).
Il a rappelé que le premier réacteur nucléaire TRICO I, mis en service en Afrique, a fonctionné de 1959 à 1970 avant d’être remplacé en mars 1972 par un réacteur plus puissant de 1.000 Kw (TRICO II) présentement à l’arrêt pour des raisons techniques, après plus de 30 ans de fonctionnement sans incident majeur. Les deux réacteurs, a-t-il souligné, sont érigés sur le site de CREN-K à l’UNIKIN.
Face à la menace de l’érosion sur ce site, la réaction du gouvernement avait permis de stabiliser cette érosion le long de la limite Sud, notamment la construction de bassins de rétention des eaux sur le site et l’érection d’une clôture de protection du CREN-K.
De 2000 à 2004, quatre missions de l’Agence internationale à l’énergie atomique (AIEA) ont aidé les spécialistes de CREN-K à clarifier la stratégie de stabilisation de la pente contre l’érosion. Les travaux réalisés de 2008 à 2016 ont permis de maîtriser tant soit peu la situation.
Le centre nucléaire de Kinshasa se meurt sous bonne garde
Perché sur une colline d’un faubourg de Kinshasa, capitale de la République démocratique du Congo, un centre de recherche nucléaire se meurt. Son réacteur n’a pas servi depuis des lustres mais le lieu reste jalousement gardé en raison de la dangerosité du site, désormais menacé par l’érosion des sols.
Ce Centre régional de recherche nucléaire de Kinshasa (CREN-K) est né en 1959, à l’époque de la colonisation belge, et un an avant l’indépendance du pays. C’était alors le premier réacteur nucléaire d’Afrique subsaharienne.
En 2007, une équipe de l’AFP s’y était rendu alors que des barres d’uranium avaient été volées et que la communauté internationale s’inquiétait d’un possible détournement à des fins militaires.
Aujourd’hui, c’est l’érosion de la colline qui inquiète les autorités universitaires: depuis plusieurs années, elle gagne du terrain et la butte sur laquelle est construite la petite centrale de recherche se lézarde. Le ruissellement des eaux des pluies tropicales abîme le sol et laisse derrière lui des sillons qui menacent la clôture du CREN-K.
Le réacteur actuel — un TRICO II d’un mégawatt, en vogue pour la recherche dans les années 1970– a été installé en mars 1973 mais ne fonctionne plus depuis 1994, faute de moyens.
Il fut à l’époque l’une des victimes de l’effondrement de l’économie nationale saignée par la dictature de Mobutu.
Le pays a ensuite connu deux guerres qui ont achevé de le réduire en miettes, entre 1996 et 2003, et le réacteur n’a jamais repris son activité de recherche.
Collecteur d’eau
Face à l’érosion, le directeur du CREN-K, le Pr Vincent Lukanda, qui est également Commissaire général à l’énergie atomique de la RDC, se veut rassurant. Il explique que des dispositions ont été prises pour parer à toute éventualité: grâce à un « collecteur d’eau » censé drainer les eaux de pluies sans dommage pour la butte, le mont Amba.
Le journaliste de l’AFP ne sera pas autorisé à visiter le réacteur et le dépôt de stockage des déchets fissiles, il ne verra que les autres bureaux et locaux. Pas question d’en savoir plus sur la quantité d’uranium que le centre recèle ou sur les déchets fissiles hérités du premier réacteur et stockés dans l’enceinte. « Secret d’État », lance le Pr Lukanda, en concédant simplement que « c’est très dangereux »..
Pas question non plus de s’entretenir avec deux inspecteurs de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) venus à Kinshasa animer un atelier de quatre jours sur la « protection physique des installations nucléaires du CREN-K ». « Secret professionnel », affirme le gardien du temple nucléaire.
A Livulu, quartier populaire au pied de l’université, la population préoccupée par sa survie immédiate a d’autres soucis en tête que la dangerosité du centre nucléaire et l’érosion de la colline qui l’héberge.
« Le cuivre ne met pas en danger. Si l’uranium est aussi un minerai, il ne mettra personne en danger », assène un vendeur de cigarettes.
« En très bon état »
Quant aux chercheurs employés sur place, plusieurs se plaignent d’un manque criant de moyens pour le CREN-K, mais au moins ont-ils la satisfaction d’être payés –peu, mais dans les délais– ce qui apparaît presque comme un privilège vu la misère dans laquelle se débattent neuf Congolais sur dix…
En 2004, alors que le pays sorti des guerres regardait de nouveau l’avenir avec espoir, le directeur de l’époque tablait sur l’arrivée imminente au CREN-K d’un nouveau tableau de contrôle censé permettre, enfin, de redémarrer l’engin. Il n’en fut rien.
Treize ans plus tard, son successeur le Pr. Vincent Lukanda veut encore y croire, alors que le petit réacteur reste désespérément à l’arrêt.
Il est « en très bon état », assure-t-il à l’AFP. « Nous attendons du gouvernement un financement de l’ordre de 3 millions de dollars américains » devant permettre l’installation d’un « pupitre [de commande] numérique », dit-il.
Sur le papier, le CREN-K mène diverses activités de recherche à visées médicales, biologiques, génétiques ou industrielles.
Plan de démantèlement ?
Et dans ses locaux peints en jaune et mieux entretenus que l’Université de Kinshasa dont le campus délabré accueillant 30.000 étudiants jouxte le CREN-K, le Pr Lukanda s’enflamme à l’idée que son pays –doté d’un immense potentiel hydroélectrique non exploité– puisse un jour produire du courant avec l’énergie nucléaire.
« Les outils de départ, nous les avons ! » affirme-t-il.
Mais il faut que « le pays s’engage politiquement » dans cette voie et sollicite l’aide de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), reconnaît-il.
L’heure ne semble toutefois pas à un redémarrage prochain de la petite centrale nucléaire congolaise.
L’argent manque et l’AIEA explique qu’elle « aide les autorités congolaises à mettre sur pied un plan de démantèlement ».
Ce qui toutefois ne signifie pas que l’idée d’un démantèlement soit actée: l’AIEA recommande l’élaboration de tels plans « pour tous les réacteurs de recherche installés (dans le monde), quelle que soit la date à laquelle il doivent être démantelés », précise le porte-parole de l’organisation, basée à Vienne.
Le Pr Lukanda, lui, est catégorique: le gouvernement « n’entend pas démanteler » le CREN-K. Au contraire, il veut la « moderniser la centrale », assure-t-il, plus de 25 ans après la mise à l’arrêt du réacteur.
Réacteur nucléaire de Kinshasa
Le réacteur nucléaire de Kinshasa est un réacteur nucléaire de recherche de l’université de Kinshasa (site du mont-Amba, commune de Lemba) en République démocratique du Congo. Il est le premier réacteur nucléaire installé en Afrique.
Histoire
En 1958, le « Gouvernement général » du Congo belge a acheté à la General Dynamics Corporation[1] (États-Unis) un réacteur de recherche de type Triga Mark I d’une puissance de 10 à 50 kW. Ce avec l’accord du ministre belge du Congo et du Ruanda-Urundi
Ce réacteur était destiné à la Commission consultative des sciences nucléaires, présidée par Monseigneur Luc Gillon, recteur de l’université Lovanium à Léopoldville de 1954 à 1967. Mg Luc Gillon est docteur en physique et a suivi l’enseignement de Robert Oppenheimer à l’université de Princeton.
Il fut construit sur le site du Centre Trico de l’université, et consistait en un ensemble de laboratoires de la Faculté des sciences, de la Faculté de médecine, ainsi que de l’hôpital universitaire qui y était rattaché. Il entre en service le 6 juin 1959 pour la recherche, l’enseignement et la production d’isotopes à usages médicaux et agricoles.
En 1970, le Centre Trico devient le Centre régional d’études nucléaires de Kinshasa (CREN-K). Le CREN-K décide rapidement de se doter d’un réacteur de recherche plus puissant, le Trico II. Celui-ci, d’une puissance de 1 MW est inauguré en 1972.
TRICO II est mis en service en mars 1973, mais depuis 1994, il ne fonctionne plus faute de moyens.
La première guerre du Congo (1996-1997) et la deuxième guerre du Congo (1998-2003) ont achevé de réduire le réacteur TRICO II « en miettes » selon l’AFP.
En 2007, des barres d’uranium sont volées en vue d’un possible détournement à des fins militaires ((source?)).
Contrôle
À l’origine, les autorités belges étaient chargées du suivi du projet. Après l’indépendance du Congo, une Convention générale de coopération technique et scientifique fut conclue, le 23 août 1968, entre le gouvernement du Royaume de Belgique et le gouvernement de la République démocratique du Congo. Celle-ci prévoyait la possibilité de conclure des accords particuliers de coopération technique. Un accord cadre fut signé le 9 novembre 1973, et régulièrement reconduit à l’époque de la République du Zaïre. Il permettait notamment l’accès aux installations pour des institutions scientifiques belges.
Le cadre juridique mis en place a permis au SCK-CEN de Mol d’apporter une contribution importante aux travaux qui précédèrent la mise en activité du réacteur Trico II, et à la maintenance du réacteur. L’Institut des radioéléments de Fleurus a apporté quant à lui son appui au CREN dans le domaine de la production de radioéléments à usages médicaux.
Cet accord ne fut cependant pas reconduit à partir de 1987.
L’autorité chargée de la gestion du réacteur nucléaire Trico II est actuellement le « Commissariat général pour l’énergie atomique de la République démocratique du Congo. » Fin des années 1990, celui-ci n’était toutefois plus en activité car aucune dotation budgétaire ne lui était allouée. Divers équipements et diverses difficultés techniques hypothéquaient sa gestion.
Le réacteur Trico II est cependant soumis au système de contrôle des garanties de l’Agence internationale pour l’Énergie atomique (AIEA) et fait l’objet d’une inspection annuelle.
L’AIEA a initié, en 1988, un projet de coopération technique portant sur la fourniture d’équipements et d’éléments de combustible de rechange. Ce projet n’est pas encore terminé.Erosion dans la cité Mama Mobutu, commune de Mont Ngafula, dans les environs de l’université
En effet, des équipements et des éléments de combustible (uranium enrichi à 20 %) avaient été commandés auprès de la firme américaine General Dynamics Corporation (fournisseur du réacteur) qui, en raison de l’embargo décrété par les États-Unis contre le régime du président Mobutu, a été empêchée de procéder aux livraisons demandées par l’agence.
Malgré le changement de régime au Congo, la politique américaine envers le pays ne s’est pas encore assouplie et l’agence est contrainte actuellement d’essayer d’acquérir des équipements de réacteurs du même modèle, qui sont sur le point d’être fermés, comme c’est le cas notamment en Allemagne. En ce qui concerne le combustible, le problème reste entier.
Même en l’absence de ces réparations et du remplacement des éléments de combustible défaillants, le réacteur Trico II reste en état de fonctionner à une faible puissance et pour une courte durée seulement. Une remise en activité de ce type a lieu, lors des inspections de garanties de l’AIEA, afin de démontrer que les éléments de combustible se trouvent toujours au cœur du réacteur.
Le site du réacteur nucléaire se trouve par ailleurs dans la zone des collines de Kinshasa, qui subit une importante érosion liées aux pluies et à l’urbanisation croissante de la zone, ce qui ne va pas sans poser de problème de sécurité.
Malgré ces différentes difficultés, des experts en sûreté nucléaire de l’AIEA ont régulièrement visité le site et souligné le bon état dans lequel le réacteur a été maintenu grâce au dévouement des techniciens locaux et malgré une absence totale de moyens budgétaires. Depuis le début des années 2000 cependant, la situation du réacteur se dégrade, souffrant du non investissement et de l’érosion qui affecte ce quartier de Kinshasa.
Fin 2014, le Commissariat général à l’énergie atomique de RDC recrute des ingénieurs, des physiciens et des géologues. Selon une enquête menée en 2015, le Mont-Amba est une colline sujet à une forte érosion qui pourrait provoquer l’effondrement du centre et de son réacteur.
Avec ACP/AFP/Wikipédia