
La controverse est forte entre le défenseurs et les dénonciateurs des dépassements budgétaires au sein de toutes les institutions étatiques.en République démocratique du Congo.
DÉNONCIATIONS
Pour l’Observatoire de la dépense publique (ODEP), « le dépassement budgétaire est une faute de gestion et viole la loi des Finances publiques ».
» Les charges de l’État sont déterminées dans le budget de l’État ou la loi des finances. Dans cette loi, chaque service présente ses besoins annuels au cours des conférences budgétaires organisées par le ministère du Budget. Au cours de l’année, nous constatons que dans l’exécution, certains services ont déjà dépassé tout ce qu’on leur a accordé comme budget, voté par le Parlement. Les dépassements budgétaire sont des fautes de gestion », argumente son chargé de communication, Valéry Madianga.
Le député Juvenal Munubo est du même avis. « Le dépassement budgétaire est est une faute de gestion sanctionnable par la loi ».
DÉFENSE
« Il y a trois façons de considérer la question. La première, c’est sur le plan juridique. La deuxième, il y a des imprévus. Et la troisième, il y a des questions de souveraineté », se défend le gouvernement par le biais du ministre des Finances, Nicolas Kazadi, devant l’Assemblée nationale.
Sur le plan juridique, Nicolas Kazadi soutient que le pouvoir de modification règlementaire existe bel et bien, et il est non seulement précisé dans la loi, mais également encadré.
« En substance, le parlement vote la loi des Finances que le pouvoir réglementaire, l’Exécutif, peut justifier d’adapter le budget, sa nouvelle circonstance aux aléas et aux impératifs. Sur la base de ce dépassement constaté, on peut donner cette approche à la loi des finances rectificatives.Dans les faits, ce qui explique ces divergences, ces dépassements ou ces faiblesses dans l’exécution, la première raison, c’est d’abord la qualité de la prévision budgétaire. C’est aussi une leçon que nous devons tirer de l’exercice dans lequel nous sommes par rapport au projet 2022 », argue-t-il.
Ensuite, sur la question de souveraineté, le ministre des Finances pousse plus loin le bouchon.
« Quoique nous soyons en difficulté budgétaire, parce qu’il faut le dire, il faut le reconnaître, 10% du PIB c’est trop faible pour gérer efficacement un pays, il faut qu’on se le dise. La moyenne africaine est à 20-22% du PIB. Donc, nous avons un gros effort à faire pour donner au gouvernement le moyen de gérer correctement le pays. Mais, lorsque nous n’avons que 10%, c’est un petit gâteau, vous devez le partager, ça donne directement des tensions ».
Au bout du compte, le ministre des Finances demande à l’Assemblée nationale et au Sénat d’ « aider le gouvernement à trouver des réponses adéquates ».
Parmi les avocats des départements budgétaires, figure l’inspecteur général des finances, chef de service Jules Alingete Key.
» Je voudrais vraiment que les gens retiennent, une fois pour toutes, que le dépassement budgétaire n’est ni un acte de détournement ni un acte de mauvaise gestion. On déforme, on est en train vraiment de faire circuler des choses qui ne sont pas correctes en finances publiques. Le dépassement budgétaire c’est, au fait, le constat d’un service qui a des crédits budgétaires de X montant mais, à l’exécution, il se retrouve avec X+ mais comment on y arrive ? Le fait qu’on a X+ ne signifie pas détournement. Ça ne signifie pas aussi mauvaise gestion. Mais, comment arrive-t- on à un dépassement budgétaire ? La loi a prévu que toute dépense doit passer par un circuit. Le circuit, c’est le gestionnaire, celui qui a besoin d’effectuer la dépense, membre de gouvernement ou de service public, commence à engager les dépenses. On arrive au budget, le budget liquide. La liquidation consiste à vérifier si la dépense que vous demandez a un crédit disponible. Si les crédits n’existent pas, le budget ne laisse pas passer la dépense ou le budget va procéder au réaménagement. Alors, lorsque le budget autorise par la liquidation le ministre des Finances paie. Si tout le monde respecte le circuit en passant par l’engagement, la liquidation par le budget, et le paiement il n’y a aucun dépassement budgétaire », argumente encore Jules Alingete.
Et de conclure :
» Le dépassement budgétaire nous arrive avec ce que nous appelons, en finances publiques, les paiements en procédure d’urgence qui sont les paiements. Lorsqu’il y a extrême nécessité, on passe directement chez le ministre des Finances demander un paiement. Et si le paiement est fait, le malheur c’est que le ministère du Budget parfois n’est pas informé. Et quand on va à la fin de la période, du mois ou l’année, mettre le compte ensemble, prendre ce qui est passé par le budget et ce qui n’est pas passé par budget et qui fait partie du ministère des Finances vers la banque centrale du Congo, on met tout ensemble. On trouve qu’il y a eu dépassement, mais ce n’est pas un détournement », conclut Jules Alingete Key.
LOI N° 11/011 DU 13 JUILLET 2011 RELATIVE AUX FINANCES PUBLIQUES
Article 129
» Est passible d’une sanction pour faute de gestion au niveau du pouvoir central, toute personne:
- qui n’aura pas respecté les règles d’engagement des dépenses;
- qui aura engagé des dépenses sans en avoir le pouvoir ou reçu délégation;
- qui aura engagé des dépenses sans disponibilité des crédits;
- qui aura effectué une dissimulation de nature à permettre la fausse imputation d’une dépense;
- qui se sera procuré à soi-même ou à autrui un avantage injustifié, sous toute forme, entraînant un préjudice pour le pouvoir central;
- qui aura omis en méconnaissance de la loi fiscale, de remplir les obligations qu’elle impose aux fins d’avantager indûment les contribuables;
- qui aura enfreint les règles relatives à l’exécution des recettes et des dépenses du pouvoir central ou à la gestion des biens appartenant au pouvoir central ou qui, chargée de la tutelle ou du contrôle des services du pouvoir central, aura donné son approbation aux décisions incriminées.
La sanction pour faute de gestion réside dans la condamnation de la personne incriminée, à une amende dont le montant ne pourra atteindre le double du traitement ou salaire brut annuel alloué à la date de l’infraction sans être inférieur au quart.
Outre les sanctions énumérées ci-dessus, le fonctionnaire encourt une sanction disciplinaire, civile et/ou pénale ».
Par Angelo Mobateli