En RD Congo, avec un taux de faussaires qui dépasse les 10 %, le problème de la fiabilité des statistiques des personnes réellement qualifiées pour prendre part aux scrutins se pose avec acuité.
Les chiffres des doublons et mineurs enrôlés par la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) dans le cadre du cycle électorale de 2018-2019 et publiés le vendredi 06 avril 2018 à Kinshasa a procuré des sueurs froides à plus d’un Congolais soucieux de participer à des élections transparentes.
Les responsables de cette institution d’appui à la démocratie devraient expliquer au commun de nos concitoyens comment plus de six millions de « faussaires » ont pu infiltrer un mécanisme d’enrôlement présumé verrouillé, où les doublons auraient dû être détectés en amont, au moment même de la capture des données relatives à leur identité, âge, lieu de résidence, sexe, état civil, etc. ?
Pourquoi la CENI n’a-t-elle ciblé que deux catégories de faussaires, à savoir les doublons et les mineurs, alors que des milliers, sinon des millions d’étrangers ont aussi infiltré le fichier électoral, notamment au Sud-Ubangi, au Nord-Ubangi, en Ituri, au Nord-Kivu, au Sud-Kivu, au Tanganyika, où des forces négatives font la loi et où vivent de fortes colonies de réfugiés centrafricains, sud-soudanais, ougandais, rwandais, burundais et autres ? A Kinshasa comme dans plusieurs villes du pays, nombre d’Africains se sont fait délivrer des cartes d’électeurs moyennant espèces sonnantes et trébuchantes.
Pourtant, parmi les précautions élémentaires arrêtées en marge des opérations d’identification et d’enrôlement des électeurs, il était exigé des requérants de la carte d’électeur de se munir soit de leur ancienne carte de 2011, soit d’une attestation de perte de pièces, soit de leur passeport, soit de leur permis de conduire, soit de deux témoins qui devaient attester de leur lieu de résidence et de leur congolité.
Au vu du « potopoto » qui a entouré l’enregistrement des électeurs, chacun est en droit de douter de tout : statistiques brutes des électeurs et statistiques partielles.
Face un serveur central encore et toujours inaccessible aux témoins des partis politiques et aux observateurs neutres, il est difficile de croire à un toilettage exhaustif et objectif du fichier électoral. En sortant brutalement de ses « laboratoires » un tableau présumé actualisé et complet des électeurs, province par province, sans audit et sans témoins, la CENI, au lieu de rassurer, a davantage installé les doutes dans les esprits.
Le triste constat à faire est que le doute plane sur l’ensemble du corps électoral, quand on pense notamment aux provinces telles que l’Ituri, le Nord-Kivu et le Sud-Kivu, touchées par l’insécurité récurrente depuis une vingtaine d’années et qui affichent des statistiques d’électeurs dépassant le million, voire les deux millions d’âmes. C’est assez curieux que des entités territoriales au taux ahurissant de déplacés internes, où nos compatriotes sont tués tous les jours par des forces négatives, présentent des statistiques d’électeurs plus élevées que celles n’ayant connu aucun conflit armé depuis plus de deux décennies et créditées d’un fort taux de croissance démographique.
Lorsque l’on s’attarde sur le chiffre de plus de 40 millions d’électeurs contre plus de 6 millions de doublons, l’on a du mal à résister à la tentation d’affirmer que les cartes d’électeurs, comme en 2005 et en 2011, ont été distribuées comme des cacahuètes en 2017 et 2018. La Ceni reconnaît d’ailleurs la forte «pollution» du ichier électoral par ses propres cadres et agents, contre qui elle brandit des sanctions administratives et des poursuites judiciaires.
La question de fond reste à savoir s’il faut réellement accorder du crédit à un fichier électoral tenu secret par la centrale électorale nationale, et par ricochet la clef de répartition des sièges par circonscription électorale. Le sentiment qui va continuer à habiter la majorité de nos compatriotes est que le jeu électoral est faussé à la base, avec tous les risques que cela ait un impact négatif sur les résultats des scrutins, en décembre 2018 d’abord avec les élections présidentielle, législatives nationales et provinciales, et plus tard avec celles des sénateurs, gouverneurs de provinces, maires et maires adjoints des villes, bourgmestres et chefs des secteurs.
Tableau des électeurs enrôlés par province
- Bas-Uélé : 474.932
- Equateur : 969.381
- Haut-Katanga : 2.461.838
- Haut Lomami : 1.313.985
- Haut Uélé : 1.229.875
- Ituri : 2.236.607
- Kasaï : 1.500.525
- Kasaï Central : 1.556.729
- Kasaï Oriental : 1.081.248
- Kinshasa : 4.557.019
- Kongo Central : 1.926.040
- Kwango : 980.814
- Kwilu : 2.313.568
- Lomami : 1.232.359
- Lualaba : 1.023.342
- Maindombe : 966.820
- Maniema : 1.028.045
- Mongala : 971.983
- Nord-Kivu : 3.863.721
- Nord-Ubangi : 3.863.721
- Sankuru : 1.267.610
- Sud-Kivu : 2.554.513
- Sud-Ubangi : 1.306.451
- Tanganyika : 1.164.710
- Tshopo : 1.221.150
- Tshuapa : 775.538
Kimp