Le Portugais était seul en lice pour diriger l’organisation internationale entre 2022 et 2026. Sa nomination devra être officiellement confirmée par l’Assemblée générale.
Il était seul en lice. Le Conseil de sécurité a approuvé, mardi 8 juin 2021, l’attribution d’un deuxième mandat à Antonio Guterres, 72 ans, pour diriger l’ONU entre 2022 et 2026. Une dizaine de candidatures individuelles n’ont pas été retenues au motif qu’elles n’étaient pas soutenues par l’un des 193 pays membres de l’Organisation des nations unies. L’ex-premier ministre portugais, en poste depuis janvier 2017, devra être officiellement confirmé par l’Assemblée générale de l’ONU.
Après un premier mandat consacré à limiter les conséquences potentiellement drastiques pour l’Organisation de la politique unilatéraliste de Donald Trump, Antonio Guterres devra avoir « un plan de bataille pour toutes les crises brûlantes », juge un diplomate.Article réservé à nos abonnés Lire aussi Antonio Guterres : « La pandémie met à l’épreuve le respect de l’engagement pris au nom de l’égalité et de la dignité humaine »
Dans ce domaine, son bilan est maigre depuis cinq ans, Syrie, Yémen ou Mali restant désespérément en panne d’une solution politique. Un nom a été trouvé pour la Macédoine du Nord et une pacification s’amorce en Libye, mais l’ONU a surtout un rôle d’accompagnant dans un processus engagé par les Libyens.
Adepte d’une diplomatie de coulisses, Antonio Guterres assure se dépenser sans compter, pour éviter ici une aggravation du conflit à Chypre, tenter là de contenir les velléités guerrières du pouvoir éthiopien au Tigré, et mobiliser le Conseil de sécurité.
Des résultats limités
Les résultats de son action sont limités, selon plusieurs sources diplomatiques qui s’expriment anonymement, dont certaines rappellent la passivité de l’ONU face au génocide, à partir de 2017, des Rohingya en Birmanie.
Au début de mai, Antonio Guterres soulignait que « les éléments clés de ses activités » reposaient sur la discrétion. « Parfois, pour être efficace, il faut le faire discrètement, pour établir des canaux de liaison entre les parties ». Ceux-ci sont « essentiels pour éviter le pire dans les confrontations et essayer de trouver des solutions », précisait-il alors.
Fin politique, sous pression constante des grandes puissances comme des plus petites, le chef de l’ONU ne s’est mis à dos aucun des cinq membres permanents du Conseil de sécurité (Etats-Unis, Chine, Russie, France et Royaume-Uni), verrouillant ainsi sa reconduction.
« On lui est redevables que l’ONU n’ait pas explosé sous Trump, ce qui aurait pu être le cas. Ce n’est pas assez, mais ça sera le défi du second mandat », prédit un diplomate issu de l’un de ces cinq pays. « Il a eu du mal à peser pour résoudre des crises, mais ses prédécesseurs ont-ils fait mieux ? », ajoute une autre source, également sous anonymat.
Sans levier majeur face aux grandes puissances qui continuent à se livrer des guerres par procuration, Antonio Guterres s’est investi dans la lutte contre le changement climatique.Archives : Antonio Guterres : « Nous devons arrêter de subventionner les combustibles fossiles »
« Silence public sur les violations des droits humains en Chine »
« Nous ne pourrons pas atteindre nos objectifs face au changement climatique si nous n’avons pas une approche combinée des trois domaines » que sont les océans, la pollution et la biodiversité, où l’absence de progrès est flagrante, relevait-il récemment.
Face au Covid-19, il a souvent trouvé les mots justes en tant que lanceur d’alertes sur les ravages en cours et à venir de la pandémie. Mais, là aussi, sa marge de manœuvre est restée limitée face à des nations qui ont préféré le repli individuel plutôt que la coopération dans la lutte contre un ennemi commun.Article réservé à nos abonnés Lire aussi Antonio Guterres : « Le monde a changé, il est plus dangereux »
Les critiques les plus virulentes à l’égard de l’ex-Haut commissaire des Nations unies pour les réfugiés (2005-2015) viennent d’ONG qui lui reprochent de ne pas en faire assez sur les droits humains. Lui s’en défend, assurant en privé en faire bien davantage dans les réunions de dirigeants que ces derniers.
Pour Kenneth Roth, directeur de l’ONG Human Rights Watch, « le premier mandat de Guterres s’est traduit par son silence public sur les violations des droits humains commises par la Chine, la Russie et les Etats-Unis ». Il « devrait utiliser les cinq prochaines années pour devenir un ardent défenseur des droits » comme il a commencé à le faire pour la Biélorussie et la Birmanie, depuis le coup d’Etat, a-t-il ajouté dans un communiqué.Article réservé à nos abonnés Lire aussi Antonio Guterres au chevet d’un monde déstabilisé
Par Le Monde avec AFP