Transmettre un message de « compassion nationale » aux habitants de Goma après les dégâts causés par l’éruption du volcan Nyiragongo et évaluer l’état de siège. Tels sont les deux objets de la visite que le président Felix Tshisekedi a entamé samedi 12 juin 2021 à Goma. Le chef de l’Etat se rendra, par ailleurs, à Beni et en Ituri. A Kinshasa, le climat politique paraît de plus en plus maussade. La confiance mutuelle au sein de l’Union sacrée de la nation n’est plus que de façade. Un certain « ras le bol » est perceptible tant au sein de « l’Ensemble pour la République » de Moïse Katumbi que dans l’UNC de Vital Kamerhe. Leader du MLC, Jean-Pierre Bemba a donné de la voix. Le pays a besoin d’un « démineur ».
Trente-quatre morts et près de 3.500 maisons détruites par les laves. C’est le bilan établi, une vingtaine de jours, après l’éruption du volcan Nyiragongo, situé près de Goma. On dénombre 17.000 personnes qui se retrouveraient aujourd’hui sans abri. De l’avis des observateurs, la « crise humanitaire » tant redoutée semble « écartée ».
Au cours de la conférence de presse qu’il a animée, dimanche 13 juin 2021 à Goma, le président Felix Tshisekedi a précisé le but de son séjour dans cette partie du pays. A savoir, écouter et réconforter les Gomatraciens. De même, « superviser » le relogement des compatriotes dont les maisons ont été détruites par cette calamité naturelle.
Pour « Fatshi », la « délocalisation » du chef-lieu du Nord-Kivu n’est pas à l’ordre du jour. Par contre, le « dégazage » du lac Kivu reste une priorité pour éloigner le danger qui menace les habitants de cette ville.
Le chef de l’Etat a annoncé qu’il se rendra ensuite à Beni et en Ituri. Il en profitera pour procéder à l’évaluation de l’état de siège. Il n’a pas exclu la prorogation de cette mesure exceptionnelle jusqu’à l’éradication du phénomène « bandes armées ».
CRISE LATENTE AU SEIN DE L’UNION SACRÉE
Sans vouloir faire une digression, le séjour présidentiel à l’Est intervient au moment où l’ambiance générale est plus que délétère au pays. Les voyageurs en provenance notamment de Kinshasa clament en chœur: « La vie quotidienne devient de plus en plus difficile du fait de manque d’eau courante et de l’électricité ». Tous les yeux sont tournés vers « Fatshi ». D’aucuns s’étonnent que la SNEL (Electricité) et la Regideso soient toujours dirigées par les mêmes comités de gestion. Comme si de rien n’était.
Dans un communiqué daté du 11 juin 2021, l’ancien vice-président de la République, Jean-Pierre Bemba Gombo, est sorti de son silence. « JPB » dit avoir constaté un « déferlement d’intolérance ». Il impute cette situation au personnel politique. « Les discours séparatistes, haineux, portent atteinte à la cohésion et l’unité nationale et font reculer la paix, la stabilité », souligne-t-il avant de condamner « avec la dernière énergie, tout acte et discours visant à semer le tribalisme et inciter le peuple congolais au séparatisme ».
On peut gager que le « chairman » dont la formation politique fait partie de l’Union sacrée de la nation évoque en termes à peine voilés l’absence de solidarité de plus en plus perceptible entre les alliés de l’USN. Sans omettre la polémique qui oppose Noël Tshiani Mwadianvita au « clan Katumbi ».
Ancien candidat à l’élection présidentielle du 30 décembre 2018, Tshiani a initié un « projet » destiné à légiférer le « verrouillage » de ce qu’il appelle les « fonctions de souveraineté ». Il faudrait, selon lui, être Congolais de père et de mère pour postuler notamment au poste de Président de la République. Pour les « katumbistes », on voudrait barrer la route vers la présidentielle de 2023 à l’ancien gouverneur du Katanga. Tshiani est suspecté de « rouler » pour Felix Tshisekedi. Une allégation balayée du revers de main par des « Fatshistes ». « On peut tout reprocher à Felix sauf ce genre de coup bas ». D’aucuns espèrent néanmoins que le chef de l’Etat « sifflera la fin de la recréation ».
« LES RELATIONS NE SONT PLUS BONNES ENTRE L’UDPS ET L’UNC »
Après l’insécurité à l’Est, le président Felix Tshisekedi devrait jouer les « démineurs » pour ramener la sérénité au sein de l’USN. Invité, mardi 8 juin, à l’émission « Bosolo ne Politik », Billy Kambale, le tout nouveau secrétaire général de l’UNC, a menacé d’attaquer en justice certains « thuriféraires » proches de l’UDPS. « Nous en avons marre des injures proférées contre notre leader », a-t-il martelé en affirmant que « les relations ne sont plus bonnes entre l’UNC et l’UDPS ». Pour lui, il faut qu’on clarifie cette situation.
Dans un communiqué conjoint publié le 9 juin 2021, la Conférence nationale épiscopale du Congo (Cenco) et l’Eglise du Christ au Congo (ECC) disent tout le mal qu’elles pensent des réformes opérées sur la loi portant organisation et fonctionnement de la Ceni (Commission électorale nationale indépendante). Les signataires déplorent ce qu’ils considèrent comme un acte de politisation de cette Centrale électorale du fait de « la composition de la Plénière de la Ceni reste disproportionnées entre la composante politique prévue à 10 et celle de la société civile prévue à 5 ». Ils « constatent avec regret » la faible représentation de la société civile au sein du Bureau.
Revenons à Goma. Le président Felix Tshisekedi – qui est accompagné de la première dame Denise Nyakeru – a salué la « chaîne de solidarité » qui s’est organisée pour secourir les déplacés. Le chef de l’Etat congolais parait décidé à aller jusqu’au bout de la logique de démantèlement des bandes armées.
Au cours de sa réunion de vendredi 11 juin, le Conseil des ministres a adopté un projet de loi d’habilitation permettant au Président de la République d’agir par ordonnance-loi sur certaines matières relevant de la loi. C’est le cas notamment de la prorogation de l’état de siège. A Kin, le climat politique, lui, appelle une intervention urgente du chef de l’Etat.
Par Baudouin Amba Wetshi (Congo Indépendant)