La Haute Cour militaire au procès en introduction des massacres de Yumbi le 26/05/2021 à la prison militaire de Ndolo.
Le procès des massacres de Yumbi ouvert mardi 25 mai 2021, a été renvoyé au 6 juillet. Au cours d’une brève audience publique d’introduction à la prison militaire de Ndolo, la Haute Cour militaire a décidé de la remise à la demande des parties pour leur permettre de s’imprégner de dossiers des prévenus, accéder aux procès-verbaux afin d’en avoir la maitrise avant l’instruction.
Deux ans et demi après les massacres de Yumbi, une quarantaine de victimes se sont constituées en parties civiles. Selon des sources de la Haute Cour militaire, ces personnes qui réclament justice et réparation pour les préjudices subis, ont été représentées au procès par leurs avocats.
Dans le box des accusés, se trouvaient près de 90 prévenus des crimes contre l’humanité par meurtre, transfert forcé de population, déportation, d’association de malfaiteurs, d’incendie volontaire, de destruction méchante, de violation de consignes, de tentative de vol, de détention illégale d’armes et munition de guerre ainsi que d’usurpation de tenue de la police nationale congolaise.
Nombreux parmi eux sont en fuite. D’autres en détention provisoire. Seuls 79 sont présents.
Pusieurs témoins sont attendus lors de prochaines audiences.
Massacres de Yumbi : la RDC reconnaît la responsabilité d’« acteurs politico-administratifs »
Le massacre de Yumbi mi-décembre en République démocratique du Congo « a été instrumentalisé par certains acteurs politico-administratifs locaux », a reconnu Kinshasa pour la première fois, en livrant de nouveaux détails atroces.
« Je peux vous dire que ce qui s’est produit à Yumbi en décembre 2018 n’est pas un motif de fierté pour mon pays », a déclaré mardi à Genève la ministre congolaise des Droits humains, Marie-Ange Mushobekwa, devant le Conseil des droits de l’homme des Nations unies.
« Un conflit inter-communautaire, lié essentiellement à la terre, a été instrumentalisé par certains acteurs politico-administratifs locaux et a abouti malheureusement à ce cauchemar que nous vous décrivons aujourd’hui », a-t-elle ajouté dans ses propos transmis sur la Web TV de l’ONU et repris par la presse congolaise.
Au moins 535 civils, hommes, femmes et enfants,ont été massacrées les 16 et 17 décembre dans trois villages du territoire de Yumbi sur les bords du fleuve Congo à 300-350 km au nord de Kinshasa.
Les victimes étaient principalement des membres de la communauté banunu victimes d’une communauté rivale, les Batende, qui officiellement contestaient le lieu d’inhumation d’un chef coutumier banunu.
« Missions d’enquête »
« Des enfants de moins de dix ans, des innocents ont été tués parce qu’ils appartenaient simplement à une certaine communauté », a poursuivi la ministre congolaise.
« Des jeunes garçons ont été non seulement massacrés mais émasculés pour les mêmes raisons. Des femmes enceintes ont été également tuées puis éventrées. Leur bourreau ont même mutilé des foetus. Je vous épargne d’autres détails ».
Elle a indiqué que le nouveau président Félix Tshisekedi « a diligenté des missions d’enquête à Yumbi ».
Un rapport d’enquête « sera envoyé au Haut commissaire des Nations unies aux droits de l’homme dans les tout prochains jours ».
« Quoi qu’il en soit, les auteurs de ces massacres vont et doivent répondre de leurs actes devant les juridictions congolaises. Nous sommes bien conscient que sans la justice il n’y aura pas une paix durable en RDC », a conclu Mme Mushobekwa, qui s’est félicitée de « la première transmission pacifique » du pouvoir dans son pays en janvier.
La responsabilité étatique non établie par l’ONU
Le massacre de Yumbi pourrait « constituer des crimes contre l’humanité », avait estimé la semaine dernière le bureau conjoint de l’ONU pour les droits de l’homme, dénonçant une violence « facilitée par l’absence de l’Etat » et des tueries « planifiées ».
Une mission des Nations unies a enquêté du 17 au 26 janvier 2019 dans la région de Yumbi. Un reportage de l’AFP fin janvier-début février à Yumbi avait aussi mis en évidence le côté « planifiée et organisée » des tueries visant les Banunu.
L’enquête des Nations unies n’a pas permis d’établir « une responsabilité étatique ». « Néanmoins, la responsabilité de l’État peut être engagée dans la mesure où l’enquête a permis d’établir que les autorités nationales et provinciales avaient été informées du risque élevé de violences, mais n’ont pris aucune mesure préventive », selon les enquêteurs.
Avec RO et Jeune Afrique (20 mars 2019)