Une famille à Kaya, dans la province de Sanmatenga, au Burkina Faso, partage un repa après avoir reçu des rations du PAM.
Plus d’une quarantaine de pays dans le monde auront besoin d’une aide alimentaire extérieure, a alerté jeudi 2 juillet 2020 l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).
Dans un rapport sur les Perspectives de récolte et situation alimentaire, l’agence onusienne a ainsi listé ces 44 pays dont 34 se situent en Afrique : le Burkina Faso, le Burundi, Cabo Verde, le Cameroun, la République centrafricaine (RCA), le Tchad, la République du Congo, la République démocratique du Congo (RDC), Djibouti, l’Erythrée, l’Eswatini, l’Ethiopie, la Guinée, le Kenya, le Lesotho, le Libéria, la Libye, Madagascar, le Malawi, le Mali, la Mauritanie, le Mozambique, la Namibie, le Niger, le Nigéria, l’Ouganda, le Sénégal, la Sierra Leone, la Somalie, le Soudan, le Soudan du Sud, Tanzanie, la Zambie et le Zimbabwe.
En Asie, il s’agit de l’Afghanistan, du Bangladesh, du Myanmar, de la République populaire et démocratique de Corée, de l’Iraq, du Pakistan, de la Syrie et du Yémen. Dans les Caraïbes et le continent américain, seuls le Venezuela et Haïti font partie de ces pays ayant besoin de l’aide alimentaire extérieure.
Mais le sort des pays diffère selon une classification établie par la FAO basée à Rome. Elle fait ainsi état d’un déficit exceptionnel de la production de l’approvisionnement alimentaire concernant la Syrie et la RCA. Pour Bangui, l’agence onusienne met en avant le conflit et les mouvements de populations.
Or selon la dernière analyse de la classification intégrée de la phase de sécurité alimentaire (IPC), le nombre de personnes en situation de grave insécurité alimentaire dans ce pays (phase 3 de l’IPC : « crise » et au-delà) est estimé à 2,4 millions pendant la période de soudure (mai-août 2020).
Il s’agit d’une augmentation de 15 % par rapport aux 2,1 millions prévus avant la pandémie de Covid-19.
La Covid-19 a également provoqué des pertes de revenus
S’agissant de la Syrie, la FAO alerte sur l’impact du conflit civil et d’une « économie stagnante ». L’agence onusienne rappelle qu’en 2019, près de 8 millions de personnes étaient incapables de subvenir à leurs besoins alimentaires et presque 2 million d’autres risquaient l’insécurité alimentaire.
« Ce chiffre devrait augmenter en 2020 en raison des prix élevés des denrées alimentaires, de la stagnation des salaires et des possibilités de subsistance limitées, amplifiés par les mesures de confinement introduites pour limiter la propagation de la pandémie de Covid-19 », relève la FAO. En outre, les réfugiés syriens exercent également une pression sur les ressources des communautés d’accueil dans les pays voisins.
Au sujet d’un manque d’accès large et d’une insécurité alimentaire localisée sévère, la FAO s’inquiète ainsi de l’insécurité au Burkina Faso. Selon la dernière analyse du « Cadre harmonisé », le nombre de personnes ayant besoin d’une aide humanitaire est estimé à plus de 2 millions pour la période juin-août 2020, principalement en raison de l’insécurité civile dans le nord du pays.
« Alors que les conflits et les chocs climatiques demeurent des facteurs importants soulignant les niveaux élevés de grave insécurité alimentaire dans les pays nécessitant une aide alimentaire externe, la pandémie de Covid-19 a également provoqué des pertes de revenus », relève la FAO. D’une manière générale, elle estime que les effets de la pandémie de Covid-19, principalement canalisés par les chocs économiques, devraient entraîner une détérioration des conditions d’insécurité alimentaire dans le monde entier.
Hausse des besoins en aide alimentaire, la pandémie affecte les revenus
Si la production agricole n’a relativement pas été touchée et si les approvisionnements en aliments de base sont généralement abondants ou stables, les pertes de revenus dues aux mesures mises en œuvre pour contenir la propagation de la maladie et le ralentissement économique général risquent d’accroître la gravité et la prévalence de l’insécurité alimentaire, précise la FAO.
Toutefois malgré ces problèmes, la récolte mondiale de céréales devrait croitre dans toutes les régions, sauf en Europe. La production céréalière en Afrique pour 2020 devrait augmenter de 1 % bien que des baisses soient attendues dans les régions du nord, de l’ouest et du centre du continent.
Les prévisions de la FAO pour l’ensemble de la production céréalière dans les pays à faible revenu et à déficit vivrier (PFRDV) pour la saison 2020/21 s’élèvent à plus de 492 millions de tonnes, soit 6 % au-dessus de la moyenne. Ce qui marque ainsi une hausse de la production pour la cinquième année de suite. Néanmoins, les populations augmentent plus vite et le total des importations en provenance des PFRDV est estimé à plus de 73 millions de tonnes, soit en hausse de 5 % par rapport à l’année précédente. « Ce qui reflète également des baisses de production dans plusieurs pays », a fait remarquer la FAO.
Le niveau record de la production mondiale de céréales stimulera les stocks
Par ailleurs, le Bulletin de la FAO sur l’offre et la demande de céréales, publié également ce jeudi, montre que la production mondiale de céréales devrait atteindre cette année un niveau record de 2.790 millions de tonnes. Il s’agit d’une hausse de 9,3 millions de tonnes depuis les prévisions de mai et dépassant de 3 % le niveau record enregistré en 2019.
Les prévisions concernant la production de blé ont également augmenté en Inde et en Russie, compensant largement une réduction attendue de la production dans l’Union européenne et au Royaume-Uni.
Les prévisions de la FAO pour la production mondiale de riz tablent maintenant vers 509,2 millions de tonnes, soit 400.000 tonnes de plus que le niveau de juin, reflétant surtout de meilleures perspectives dans les pays sud-américains, où des conditions météorologiques favorables ont permis de faire grimper les prévisions.
Dans le même temps, l’utilisation mondiale de riz devrait atteindre un niveau assez élevé avec 510,4 millions de tonnes attendues en 2020/21, soit en hausse de 1,6 % depuis en juin.
L’utilisation mondiale de céréales pour l’année à venir devrait également augmenter pour atteindre 2 735 millions de tonnes – en hausse de 1,6 % par rapport aux prévisions du mois précédent. La FAO prévoit aussi que les stocks mondiaux de céréales atteignent 929 millions de tonnes d’ici la fin de la saison en 2021, représentant une croissance de 6 % sur l’ensemble de l’année.
Les prix mondiaux des produits alimentaires connaissent un rebond en juin 2020.
En juin, les prix mondiaux des produits alimentaires ont augmenté pour la première fois depuis le début de l’année suite au rebond qu’ont connu les cotations pour les huiles végétales, le sucre et les produits laitiers. La plupart des prix sur les marchés des céréales et de la viande ont persisté vers une tendance à la baisse face aux incertitudes du marché causées par la pandémie de Covid-19.
Dans ce lot, l’Indice FAO du prix des huiles végétales a augmenté de 11,3 % en juin après avoir baissé pendant quatre mois d’affilée. Ce rebond reflète surtout une forte hausse du prix des huiles de palme suite à la relance de la demande mondiale d’importations favorisée par un relâchement des mesures de confinement liées à Covid-19 dans de nombreux pays et aux inquiétudes concernant d’éventuels reculs de production face aux pénuries de main d’œuvre. Les cotations des prix pour l’huile de soja, de tournesol et de colza ont également augmenté.
Le prix du sucre a augmenté de 10,6 % en juin par rapport au mois précédent. La hausse du pétrole brut a contribué à faire augmenter les marchés du sucre, encourageant les raffineries de sucre au Brésil à puiser dans leurs stocks de canne à sucre pour produire de l’éthanol au lieu du sucre et ont de ce fait, affecter les disponibilités à l’exportation de sucre ainsi que les prix.
Les produits laitiers ont aussi augmenté de 4 % depuis mai, marquant ainsi sa première hausse après quatre mois de déclin consécutifs. La relance des demandes d’importations pour des stocks immédiatement disponibles, en particulier en provenance du Moyen-Orient et d’Asie de l’Est, associée à la baisse saisonnière des stocks en Europe et à une disponibilité limitée en Océanie, ont contribué à la hausse récente des prix.
Toutefois, les prix des céréales et de de la viande ont baissé de 0,6 pour cent depuis mai. « Les cotations pour la viande de bœuf et de volaille ont baissé en grande partie dus à la hausse des disponibilités à l’exportation dans les principales régions productives tandis que les prix de la viande de porc ont enregistré une petite hausse, principalement en Europe, alors que se profile un nouveau relâchement des restrictions mises en place sur les marchés suite à la pandémie du Covid-19 », analyse la FAO.
Par CR/Canu