Encore méfiante, la Banque mondiale reprend ses engagements financiers au bénéfice de la RD Congo ; son représentant presse le pouvoir de Félix Tshisekedi aux réformes politiques et économiques, mais acte sa bonne volonté apparente.
La Banque mondiale pourrait financer jusqu’à 3 milliards de dollars à la RD Congo mais exige toujours des garanties. En particulier, l’institution de Washington s’inquiète des nouvelles tensions entre les partisans du président Félix Tshisekedi et ceux de son prédécesseur Joseph Kabila.
Néanmoins, quelques projets trouvent enfin leurs financements. De plus, le déremboursement des financements engagés, déjà en cours de négociation, pourrait permettre au gouvernement de faire face, ces 18 prochains mois, aux crises économiques et sociales engendrées par la crise sanitaire et le conflit en cours à l’est du pays.
La croissance de la RD Congo n’est ressortie qu’à 0,8% en 2020. Ce chiffre était néanmoins un peu meilleur qu’attendu, le plus grand producteur mondial de cobalt et le plus grand producteur de cuivre d’Afrique ayant bénéficié du rebond des prix des matières premières.
Jusque-là, la Banque mondiale freinait ses engagements, tandis qu’elle attend du gouvernement qu’il mette en œuvre les changements attendus.
La RD Congo doit entreprendre des réformes en matière de gestion des finances publiques, de déréglementation, de gouvernance et de gestion des des entreprises publiques, insiste le directeur pays de la Banque mondiale, Jean-Christophe Carret.
« L’histoire politique compliquée de ce pays n’a pas encore créé d’espace pour instituer les réformes », a-t-il déclaré dans une série d’entretiens ces derniers jours, relève l’agence Bloomberg. La Banque mondiale a offert au Congo des milliards de dollars pour l’eau, l’électricité, l’agriculture, l’expansion de la fibre optique et d’autres projets de développement, fait observer le représentant de la BM.
Surtout, les deux parties ont signé un premier nouvel accord, une combinaison de 500 millions de dollars de prêts et de subventions pour soutenir les infrastructures de base à Kinshasa. La capitale compte de 14 millions d’habitants dont 9 millions demeurent dans une précarité que l’institution de Washington ne peut ignorer.
Ce projet financé par l’Association internationale de développement (IDA), baptisé « Kin Elenda » permettra de renforcer les capacités institutionnelles de gestion urbaine et d’améliorer l’accès aux infrastructures et aux services. En outre, le projet comporte un important volet d’aménagement urbain et de gestion du foncier, ainsi que de gouvernance locale.
Un argent frais bienvenu
La banque devrait fournir 250 millions $ pour soutenir la campagne de vaccination contre la Covid-19, qui n’est pour l’heure pas un grand succès. Seuls 10 000 environ des 100 millions d’habitants du Congo ont été vaccinés, et le pays a dû restituer une grande partie de son envoi initial de vaccins, redoutant qu’ils n’arrivent à expiration. Certes, le virus ne circule pas très activement dans le pays, mais reste présent, et les épidémiologistes redoutent la création d’un « variant congolais ».
La Banque mondiale pourrait dégager plus de 200 millions $ de fonds sans restriction si le gouvernement congolais remplit un certain nombre de critères, y compris la mise en œuvre d’un nouveau programme de prêt avec le FMI, s’est engagé Jean-Christophe Carret. Le FMI et le Congo sont en pourparlers depuis que Félix Tshisekedi a pris le pouvoir, en 2019.
Cet argent frais sera le bienvenu : les réserves du Congo sont tombées à environ 500 millions $ et la croissance n’est ressortie qu’à 0,8% en 2020. Ce chiffre était néanmoins un peu meilleur qu’attendu, le plus grand producteur mondial de cobalt et le plus grand producteur de cuivre d’Afrique ayant bénéficié du rebond des prix des matières premières.
Jean-Christophe Carret attend toujours les résultats d’une enquête gouvernementale sur le détournement de fonds pour l’éducation avant que la banque ne soit en mesure de reprendre sans restriction son soutien à l’initiative de gratuité scolaire, grand chantier présidentiel.
Il considère qu’une meilleure gestion financière est la clé du soutien et que la bonne volonté des autorités de répondre à l’enquête menée témoigne de leur engagement en faveur des réformes.
Soutien de la Suède
Sur ce point donc, les choses avancent aussi. La Banque mondiale va décaisser quelque 100 millions $ dans le cadre du Projet d’urgence pour l’équité et le renforcement du système éducatif.
Tony Mwaba, ministre de l’Enseignement, en a reçu l’assurance. Cette décision « fait suite aux preuves fournies par le Gouvernement congolais dans le respect des conditions de retraits annoncés dans l’accord de financements », explique le ministère.
De son côté, la Suède va doubler son assistance à la RD Congo, a-t-on appris le 28 mai ; elle passera de 40 millions $ à 80 millions $ en 2022.
Le Premier ministre Jean-Michel Sama Lukonde et l’ambassadeur de Suède, Henric Rasbrant « ont ciblé ensemble quelques différentes priorités communes », révèle le diplomate suédois.
Qui cite le développement démocratique, l’État de droit, le respect des droits humains, l’égalité de genre, la lutte contre la corruption, et la lutte contre l’impunité. « Nous avons soulevé aussi l’importance des réformes électorales et aussi les réformes dans les domaines sociaux pour le peuple congolais. »
Par Véronique Clara-Véronne (Le Magazine de l’Afrique)