À condition que la vaccination suive, les économies africaines devraient sensiblement rebondir, ces deux prochaines années, calcule la Banque mondiale. Qui prévient que les niveaux de PIB par habitant seront encore inférieurs à ceux de 2019.
La Banque mondiale publie son édition de juin de ses « Perspectives mondiales », affinant ses prévisions économiques, plutôt dans le sens de la hausse. Concernant l’Afrique subsaharienne, les experts prévoient une croissance moyenne des PIB de 2,8% en 2021 et de 3,3% en 2022. Après avoir dressé le constat d’une récession de 2,4% moins forte qu’initialement redouté, en 2020.
Lors des premiers mois de 2021, l’économie africaine a bénéficié du renforcement de l’activité économique mondiale, avec notamment une hausse des prix du pétrole et des métaux, « et des progrès accomplis dans la lutte contre la pandémie, en particulier en Afrique de l’Ouest et centrale ».
Néanmoins, la crise sanitaire a creusé les déficits et augmenté la dette publique. L’activité s’est partiellement redressée dans les trois plus grandes économies, Angola, Nigeria et Afrique du Sud.
La région MENA est exposée aux risques de conflits et de troubles sociaux, à l’endettement élevé de certaines économies et à l’évolution défavorable des prix des matières premières, s’inquiète la Banque mondiale qui craint une résurgence de la pandémie dans cette zone.
Tandis que resurgissent ici et là, pas seulement en Afrique, des craintes quant à une résurgence passagère de l’inflation, la Banque mondiale prévient : dans certains pays (Angola, Nigeria), le recours à des politiques budgétaires et monétaires accommodantes, la dépréciation des monnaies nationales et la hausse des prix des denrées alimentaires et de l’énergie ont un effet inflationniste. Ailleurs (Kenya, Afrique du Sud), la faiblesse de la demande a permis de contenir l’inflation.
Quelques facteurs de résilience ont tenu : les investissements étrangers se sont rétablis à hauteur d’environ 90 % des niveaux pré-Covid, tandis que les envois de fonds des migrants ont mieux résisté que prévu. Les prévisions pour les prochains moins sont étayées par la hausse de la demande extérieure, essentiellement en provenance de la Chine et des États-Unis, la hausse des prix des produits de base et l’endiguement de la pandémie.
Beaucoup dépendra de la vaccination
Sachant que les retards dans la vaccination pourraient retarder la reprise et les investissements dans les infrastructures et les mines, notamment en Centrafrique, en Guinée équatoriale, au Niger et au Kenya. Et que la situation restera difficile dans les pays dits « fragiles » ou touchés par un conflit. En revanche, chez les pays exportateurs de produits agricoles, la croissance devrait s’accélérer pour atteindre 4,5 % par an en moyenne en 2021-2022.
Il subsiste divers risques, outre ceux directement liés à la pandémie, reconnaissent les économistes. Une baisse des prix pétroliers pourrait réduire les recettes de certains exportateurs de pétrole. L’insécurité alimentaire demeure : les prix des denrées ont augmenté de plus de 20% au début de cette année en Angola, en Éthiopie et au Nigeria.
La région est également exposée à des risques d’inondations et de sécheresses qui pourraient détruire les récoltes, pousser les prix des aliments à la hausse et peser lourdement sur la consommation des ménages.
A contrario, les campagnes de vaccination pourraient être plus rapides qu’anticipé, ce qui rétablirait la confiance des consommateurs et des entreprises, et contribuerait à une reprise plus soutenue. De même, un redressement plus important que prévu des prix des métaux et du pétrole pourrait accroître les recettes.
Rebond de 5,6% du PIB mondial
Malgré des signes encourageants de reprise à l’échelle mondiale, la pandémie a aggravé la pauvreté et les inégalités dans les pays en développement, commentele président de la Banque mondiale, David Malpass. Selon qui « Il est essentiel de mener une action coordonnée au niveau mondial pour accélérer la distribution des vaccins et les allègements de dette, surtout pour les pays à faible revenu ».
À mesure que l’on sort de la crise sanitaire, les dirigeants politiques devront faire face aux effets durables de la pandémie « et prendre des mesures pour promouvoir une croissance verte, résiliente et inclusive tout en préservant la stabilité macroéconomique ».
Dans l’ensemble, la Banque mondiale a revu en hausse ses prévisions de croissance pour les pays aux économies les plus avancées, dont la demande pourrait bénéficier à l’Afrique. Le PIB mondial est estimé en hausse de 5,6% en 2021 (+1,5 point par rapport à la dernière estimation) et de 3,1% en 2022 (+0,5 point).
Les économistes se montrent particulièrement rassurés concernant les États-Unis, et ont sensiblement revu en hausse leurs prévisions. Ajustements plus modestes concernant la Zone euro, dont la croissance pourrait atteindre 4,2% et 4,4% ces deux prochaines années.
Enfin, la Banque mondiale note une croissance relativement faible pour la région MENA, 2,4% en 2021 et 3,5% en 2022. La région est pénalisée par l’échec, jusqu’à présent, des campagnes de vaccination. Prévisions plus flatteuses pour le Maroc (4,6% et 3,%, après la récession de 7,1% en 2020) que pour la Tunisie (4% et 2,6% de croissance) et l’Algérie (3,6% et 2,3%).
Deux pays pour lesquels les prévisions 2021 ont été ajustées en baisse. Au Maroc, la production devrait rebondir à 4,6 % en 2021 sous l’effet de plusieurs facteurs : diminution des problèmes liés à la sécheresse, maintien de politiques accommodantes et allègement des restrictions imposées aux déplacements internes.
Par Laurent Soucaille (lemagazinedelafrique.com)