L’échec généralisé des récoltes a exacerbé la malnutrition chronique dans la région de l’Afrique australe.
Sécheresse, inondations et difficultés économiques plongent nombre de pays africains dans des difficultés inédites depuis plusieurs années. Mais la pandémie de Covid-19 menace le sort d’un nombre record de 42 millions de personnes dans une douzaine de pays d’Afrique australe, a averti mardi le Programme alimentaire mondial (PAM).
« La pandémie de Covid-19 risque considérablement d’aggraver l’insécurité alimentaire déjà très répandue en Afrique australe », a déclaré Elisabeth Byrs, porte-parole du PAM lors d’un point de presse virtuel ce mardi à Genève.
Selon l’Agence onusienne, quelque 42 millions de personnes pourraient avoir besoin d’une aide alimentaire cette année dans une douzaine de pays d’Afrique australe où il opère (Angola, République démocratique du Congo, Eswatini, Lesotho, Madagascar, Malawi, Mozambique, Namibie, République du Congo, Tanzanie, Zambie et Zimbabwe).
Près de 16 millions de personnes pourraient être impactées directement par les conséquences socio-économiques du nouveau coronavirus dont 3 millions dans les zones rurales et 13 millions dans les zones urbaines. Dans le monde rural, 26 millions de personnes sont déjà en situation d’insécurité alimentaire en raison de la sécheresse, d’inondations, de conflits ou de crises économiques.
8,5 millions de personnes à aider en RDC
Mais l’Agence onusienne s’attend à des jours préoccupants avec l’impact des mesures prises pour limiter la propagation du nouveau coronavirus. « Comme la pandémie ne devrait pas atteindre son point culminant en Afrique australe avant juillet et septembre, les gouvernements nationaux ont déjà du mal à répondre aux besoins croissants d’aide alimentaire », a ajouté Mme Byrs.
Selon l’Agence onusienne, certains pays de la région doivent faire face à de lourdes dettes et des déficits budgétaires ainsi qu’une dépréciation des devises et « des investissements sociaux insuffisants ».
Alors que la récolte imminente devrait soulager la faim dans les zones rurales, les blocages et autres restrictions peuvent entraver l’accès des petits exploitants agricoles aux marchés. Outre l’aide aux personnes traditionnellement vulnérables – parmi lesquelles les réfugiés, les personnes déplacées et les agriculteurs de subsistance – le renforcement de l’aide comprend l’introduction d’un soutien à grande échelle pour des millions de personnes désormais démunies dans les villes et les villages.
Par ailleurs, la fermeture des écoles provoquées par la pandémie a conduit à la suspension des repas quotidiens du PAM pour 2,8 millions d’enfants du primaire. Des rations à emporter sont fournies pour maintenir un filet de sécurité vital pour les familles en difficulté dans certains pays.
En République démocratique du Congo (RDC), l’Agence onusienne augmente de près d’un million, le nombre de personnes aidées cette année, pour atteindre plus de 8,5 millions. Cela permet de répondre aux besoins alimentaires accrus liés à la Covid-19.
Au Zimbabwe, le plan d’intervention du PAM relative à la Covid-19, d’un montant de 38 millions de dollars, prévoit que 200.000 personnes supplémentaires dans les zones urbaines recevront des transferts en espèces. Ce qui portera le total à 300.000. Au Mozambique, le PAM prévoit, sous réserve de financement, d’aider jusqu’à un demi-million de personnes dans les zones urbaines avec des transferts d’argent liquide pendant trois mois (46 dollars par mois par famille).Selon le PAM, plus de la moitié de la population du Zimbabwe est en situation d’insécurité alimentaire en 2020.
Le PAM a besoin de toute urgence de plus de 400 millions de dollars.
Cette aide est perçue comme une bouffée d’oxygène car la plupart des pays de la région sont fortement dépendants des importations alimentaires. Or certains de ces pays d’Afrique australe sont enclavés (Zimbabwe, Zambie, Malawi, Lesotho et Eswatini).
« Les stocks nationaux sont très limités pour soutenir les opérations clés du PAM, notamment en RDC, au Zimbabwe et au Mozambique », a dit Mme Byrs. Conformément à son plan de prépositionnement de trois mois d’aide alimentaire pour les communautés particulièrement vulnérables, le PAM achète 69.000 tonnes de produits, principalement des céréales et des légumineuses, pour compléter les stocks existants.
D’ailleurs le PAM est en train d’établir un centre régional à Johannesburg, en Afrique du Sud, pour les cargaisons et le personnel humanitaire. Bien que la fermeture des ports et des frontières due au coronavirus ait quelque peu ralenti, le PAM continue à recevoir et expédier de la nourriture et d’autres produits essentiels relativement librement grâce au soutien des pays de l’Afrique australe (SADC).
« Cela doit continuer. Les chaînes d’approvisionnement de l’Afrique australe sont vulnérables », a insisté Mme Byrs.
Pour financer toutes ses opérations, le PAM a besoin urgemment de 413 millions de dollars pour couvrir le coût du prépositionnement de trois mois d’aide alimentaire dans la région. Au total, les besoins de financement non satisfaits du PAM pour la région jusqu’en octobre, y compris les besoins d’aide alimentaire supplémentaires anticipés générés par le virus, s’élèvent à 797 millions de dollars. Les trois plus grandes opérations – Zimbabwe, République démocratique du Congo et Mozambique – s’élèvent à elles seules à 690 millions de dollars.
Par CR/Canu