La Cour d’appel de Paris a confirmé jeudi 3 juin 2021 la saisie d’un jet appartement au président congolais Denis Sassou-Nguesso. L’affaire remonte à juin dernier : l’appareil, un Falcon 7X avait été immobilisé en France à la demande de la société Commisimpex, qui traque depuis des années les biens du Congo pour se faire rembourser un impayé qui remonte à 1992 s’élève aujourd’hui à près d’1,5 milliard d’euros.
C’est un nouveau revers juridique pour le Congo-Brazzaville dans la bataille juridique qui oppose le président Denis Sassou Nguesso et Mohsen Hojeij, patron de Commisimpex. En juin dernier, l’homme d’affaire libanais a fait immobiliser le Falcon 7X un jet estampillé « République du Congo » alors qu’il venait de se poser à l’aéroport de Bordeaux en vue d’une maintenance.
Dans la foulée la justice confirmait alors la légalité de cette saisie. En février 2020 et au terme d’une longue bataille juridique, la justice française avait en effet autorisé Commisimpex à saisir tout actif de l’Etat congolais, à l’exception « des biens utilisés ou destinés à être utilisés dans l’exercice de ses fonctions diplomatiques ».
Depuis, les avocats de Brazzaville en France multiplient les procédures pour tenter précisément de faire reconnaître que ce jet serait justement un bien diplomatique, protégé à ce titre par la convention de Vienne. Mais jeudi, la cour d’appel a rejeté cet argument, en expliquant que ce traité international ne protège que les biens affectés à une représentation diplomatique, en l’occurrence l’ambassade de France au Congo, ce qui n’est pas le cas de cet aéronef. Par ailleurs, si cet avion a autrefois été utilisé par la président Sassou, c’était rarement le cas ces dernières années. « Son utilisation n’est reliée à aucune activité diplomatique établie » pouvait-on lire dans la décision rendue en juin dernier par la justice en première instance.
« C’est un petit peu facile sinon, bas de gamme comme raisonnement juridique que de se contenter de dire : ce n’est pas l’avion de l’ambassadeur donc il en peut pas bénéficier de la convention de Vienne » a réagi Me Kevin Grossman, avocat de l’Etat congolais dans ce dossier. « Tout ce que protège la convention de Vienne s’applique par nature et par essence à la plus haute représentation diplomatique c’est-à-dire le chef de l’Etat », maintient l’avocat. « Mais la République du Congo se battra pour que ses droits soient reconnus », assure-t-il. Il annonce donc un pourvoi en cassation.
Qu’elle que soit l’issue de cette procédure en cassation, du côté de Commisimpex on se réjouit que la décision rendue jeudi par la Cour d’appel « ouvre la porte à la vente de l’avion », le pourvoi en cassation n’étant pas suspensif.
« On a désormais une décision de la Cour d’appel qui balaie tous les arguments qui ont pu être avancés jusqu’ici par le Congo », réagit Me Alexandre Genet, avocat de Commisimpex. « Le pays a fait plein de recours devant toutes les juridictions qu’ils ont pu, pour essayer de conteste cette saisie. Ils ont tous été rejetés, donc logiquement l’avion sera vendu aux enchères en principe d’ici la fin de l’année ». Une vente qui pourrait rapporter à Commisimpex plusieurs dizaines de millions d’euros. Le jet est pour le moment immobilisé dans un entrepôt à Bordeaux.
« D’autres procédures sont en cours, au-delà même la Cassation. Nous ferons en sorte que cet avion ne bouge pas », promet toutefois Me Grossman. Quelles procédures ? « Ce n’est pas quelle que chose dont je vais discuter avec vous, évidemment », rétorque l’avocat.
Ces dernières années, Commisimpex a pu récupérer l’équivalent 40 millions d’euros sur sa créance. Mais on est encore loin du compte : la dette de l’Etat congolais vis-à-vis de la société a été évaluée au 3 mars dernier à environ 1 milliards 400 000 euros, une somme qui – intérêts oblige – continue d’augmenter chaque année au rythme de 7% par an.