Arrivé dans la capitale belge, quasi-incognito, le dimanche 5 juillet 2020, le chef de l’Etat s’est entretenu avec le Roi Philippe avant d’être reçu à dîner, dans la soirée de mardi 7 juillet, par la Première ministre, la libérale francophone (MR) Sophie Wilmès (Photo d’archives). Le dirigeant congolais a échangé avec plusieurs autres personnalités politiques belges. Selon des informations parcellaires, il est attendu jeudi 9 juillet à Kinshasa où il devrait présider une réunion avec les officiers généraux de l’armée ayant en charge les zones de défense. A l’ordre du jour, la situation sécuritaire alarmante aux différentes frontières du pays.
A Kinshasa, le monde politique est en ébullition. En cause, des « marches pacifiques » prévues, jeudi 9 juillet, d’un côté par l’Udps (Union pour la démocratie pour le progrès social) et de l’autre par le Pprd (Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie). Que revendiquent-ils?
Le parti présidentiel justifie sa démarche par la nécessité de« faire échec » à l’entérinement de Ronsard Malonda, membre de l’équipe sortante de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni), en qualité de Président de cette institution d’appui à la démocratie. Alors que la « priorité des priorités », dit-on dans les milieux udépésiens, doit être la réalisation d’un audit sur les activités de la Ceni suivie des réformes structurelles « afin que la Commission ne retombe plus dans les erreurs du passé ». Le débat sur le successeur de Corneille Nangaa ne devrait, dans cette logique, intervenir qu’en dernier lieu.
La formation politique kabiliste le « Pprd », elle, entend battre le pavé, jeudi, pour « défendre les institutions ». Lesquelles? Mystère! Le Pprd dont les méthodes n’ont rien à envier à celles d’une secte entend surtout « défendre » l’Assemblée nationale où les kabilistes représentent la « majorité ». Présidente de cette Chambre du Parlement, Jeanine Mabunda est accusée, à tort ou à raison, de défendre plus les intérêts de l’ex-président « Joseph Kabila » que ceux de la nation toute entière.
Sur les réseaux sociaux, un message pour le moins belliqueux circulait dans la soirée de mercredi. On peut lire notamment: « Pprd c’est toi, Pprd c’est moi. Tout celui qui se reconnait comme fils et fille politique de Joseph Kabila, retrouvons demain jeudi pour mettre fin à la barbarie des talibans(entendez: les tshisekedistes, Ndlr). Nous sommes le plus grand parti dans ce pays et nous devons le prouver ». Le texte émanerait d’un certain « Me » Popol Badjegate Masodi.
LA CENI A BESOIN DU SANG NEUF
Inutile de souligner que les élections chaotiques du 30 décembre 2018 continue à hanter les esprits. « Contrairement à ce qui se raconte, nul n’en veut à la personne de Ronsard Malonda qui fait partie des experts qui entourait Corneille Nangaa, le président sortant de la Ceni. La Ceni a besoin du sang neuf pour lui éviter de replonger dans les errements du passé », commente une personnalité politique jointe au téléphone à Kinshasa.
Au moment où ces lignes étaient écrites, on apprenait que le gouvernement central, en accord avec le gouverneur de Kinshasa, « a formellement interdit »l’organisation des marches publiques sur toute l’étendue du territoire national. C’est la teneur d’une déclaration lue, mercredi, par le vice-Premier ministre, Gilbert Kankonde Malamba. Celui-ci a exhorté les irréductibles du Fcc et ceux du Cach « à entamer des discussions sur leurs divergences ». Sera-t-il entendu? C’est à voir.
A Bruxelles, le président Felix Tshisekedi Tshilombo devait achever, mercredi 8 juillet, une visite privée « très officielle », débutée le dimanche 5 juillet. Dès lundi, il a eu des entretiens avec des responsables de l’Union européenne. Mardi, il s’est rendu au Palais royal où il s’est entretenu avec le Roi Philippe. Les deux chefs d’Etat seraient revenus sur la commémoration du 60ème anniversaire du Congo ex-belge. Dans la soirée, un dîner a été organisé par la Première ministre, la libérale francophone (MR) Sophie Wilmès. « Entre Belges et Congolais, c’est une affaire de famille », ricane un ancien coopérant.
Selon un proche de « Fatshi » qui a requis l’anonymat, les entretiens tant avec le Souverain belge qu’avec la « Première » Sophie Wilmès ont tourné autour de la« consolidation des liens entre les deux pays et les deux peuples ». Il a été convenu de mettre sur pied une « commission belgo-congolaise », composée des historiens, avec pour mission d’expliquer aux générations présentes et à venir les bons et mauvais côté de l’époque colonial . « La volonté commune exprimée lors de ces entretiens est de tourner les yeux résolument vers l’avenir en tirant un trait sur le passé ».
A en croire notre interlocuteur, « Fatshi » a reçu la visite de deux ministres d’Etat belges. Il s’agit du libéral flamand (Open VLD) Herman De Croo et du socialiste francophone (PS) André Flahaut.« Au cours de cette visite purement privée, le chef de l’Etat n’a rencontré ou reçu que les personnalités belges qui en avaient exprimé le désir ».
FCC-CACH: LE BAISER DE LA FEMME-ARAIGNÉE
Sur les réseaux sociaux, on apprenait qu’une rencontre Tshisekedi-Fayulu devait avoir lieu à Bruxelles. « Il n’ y a pas eu de rencontre dans ce sens. Vous le savez autant que moi que Martin Fayulu se trouve aux Etats-Unis suite aux mesures de confinement », répond le conseiller. Ne pense-t-il pas que l’heure a sonné pour que « Fatshi » tende la main à ses ex-amis de « Lamuka »? Réponse: « Le président Felix Tshisekedi a déjà tendu la main en autorisant les personnalités qui vivaient en exil à regagner le pays. Sans omettre la levée des scellés à l’hôtel Faden House de Fayulu. Je peux vous assurer que Kabila n’avait pas bondi de joie. Cette mesure de décrispation a été le premier motif de friction entre le Cach et le Fcc. Je peux vous assurer également que Felix n’a jamais considéré les leaders de Lamuka comme des ennemis. Ce sont des adversaires ».
Ne pouvant entrer en contact avec « Fatshi » himself, nous n’avons pu nous empêcher de poser la question qui hante les esprits. Il s’agit de « l’avenir de la coalition Cach-Fcc ». « La coalition Cach-Fcc aura un avenir tant que la mouvance kabiliste veillera à jouer franc-jeu et non de tenter de nous donner le baiser qui tue de la femme araignée ».
A l’appui de cette métaphore, notre interlocuteur de confier que le président Tshisekedi était ulcéré au cours de la toute dernière rencontre avec son prédécesseur. « Pendant qu’ils étaient en réunion, samedi 4 juillet, la présidente de l’Assemblée nationale Jeanine Mabunda a procédé à l’entérinement de la candidature de Ronsard Malonda en qualité de Président de la Ceni ». Pour ce proche de Fatshi, celui-ci tient à un « processus électoral sans reproches en 2023 ».
Par Baudouin Amba Wetshi